Gumières
est un village du Haut-Forez, à quelques lieues de l'Auvergne,
par le col de la Croix de l'Homme Mort. Ce n'est pas là son
histoire, mais sa mémoire, évoquée par un enfant
du pays. À ces mots donnez leur sens fort : " remontant
sa race ", comme dit Péguy, enracinée en ce terroir,
l'auteur bat le rappel de tout ce qu'il entrevoit au-delà
des souvenirs émerveillés de son enfance.
L'étude
des documents a pris le relais : des origines, en 952, à
nos jours, ils sont nombreux et divers, légendes et histoire
mêlées au travers des monographies, des archives de
toute nature, des journaux et mémoires, des témoignages
de famille, des cartes postales, des photographies, j'en oublie
et ne peux entrer dans le détail.
Ce
qui importe, c'est l'originalité de la manière. Si
l'objectivité conserve ses droits dans les citations, A.
Chassagneux lui adjoint une dimension poétique qui s'affranchit
de la chronologie pour obtenir une vérité intemporelle.
L'écriture littéraire, accompagnée par Gaston
Roupnel ou Julien Gracq, ouvre une méditation sur la "suite
des humains, dans les bourgades, les campagnes" selon le mot
de Pourrat dans son Histoire des gens dans les Montagnes du Centre.
"Quels songes mener sur ces pères et ces mères
perdus, dont Dieu seul a connu l'histoire !"
Voilà le songe que mène A. Chassagneux, et l'essentiel
se lève sous sa plume, qui est leur fidélité
de terriens et de chrétiens au sein des épreuves (quelle
suite de figures religieuses simplement héroïques !),
le témoignage qu'ils ont donné, à leur insu,
au gré des âges et au croisement de l'Église
et de la République, de leur dignité dans ce qu'ils
avaient de plus précieux dans leur pauvreté, leur
foi, leur famille, leur travail, et qui leur vaut aujourd'hui cet
admirable hommage.
Bernard
PLESSY
pour
le Bulletin des Lettres