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François de Beaumont,
baron des Adrets
(B.N., Cabinet des Estampes)

Voir aussi
les pages suivantes :


Prise
de Montbrison
(1562)


Tour de la Barrière
à Montbrson


Dôme du tribunal

 

 

 

 

 

 

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Le château de Montbrison
(détail de l'Armorial de Guillaume Revel)

 

Le feu du ciel
sur le donjon
de Montbrison

Antoine Granjon est né à Saint-Etienne le 16 juin 1752 mais il exerce le métier d'avocat à Montbrison. Pendant la Révolution, il se cache en Suisse. De retour, il devient magistrat au tribunal de Montbrison où il meurt le 9 octobre 1815. Homme curieux, il s'intéresse à tout : le droit, l'histoire, les sciences naturelles, l'agriculture…

Il nous laisse un volumineux manuscrit : 650 pages d'une écriture menue ! Recueilli par L.-P. Gras, cet ouvrage est aujourd'hui à la Diana. "Le Granjon", un recueil de notes collectées ici et là sur Montbrison et le Forez, fourmille d'anecdotes. Il y a là, bien sûr, à prendre et à laisser… Prenons.

Granjon
nous conte la fin du donjon de Montbrison. Depuis des siècles, cette haute tour carrée, symbole de pouvoir et de puissance, domine le château des comtes qui couronne la colline. De là tout le Forez, montagne et plaine, paraît soumis. Le donjon impose, protège et… donne aussi l'heure. Au 16e siècle, une horloge y est installée avec une curieuse cloche.


La colère du Ciel

Le 31 août 1582 est jour d'orage. Il y a menace de grêle. Et pour l'éloigner, selon une coutume générale dans le pays, il faut carillonner. Une femme nommée "la Reverdine" grimpe vitement au sommet de la tour, tout près du ciel. C'est l'épouse du serrurier qui fait fonction de sonneur et entretient l'horloge publique. A elle revient cette tâche dangereuse. En effet, violent coup de tonnerre ! Le donjon est foudroyé.

Rapportant les propos du père Foderé, un ancien chroniqueur, Antoine Granjon écrit : "L'action de la foudre fut si violente qu'elle en dispersa les matériaux tellement qu'on ne retrouva aucune chose de la dite tour sur la place sinon une femme sans aucun mal, et auprès d'elle, d'un côté toutes les roues du grand horloge [sic] de la ville en leur entier et de l'autre la grosse cloche".

Les habitants firent aussitôt le rapprochement avec les événements survenus, au même lieu, vingt ans plus tôt. Le 14 juillet 1562, le baron des Adrets, à la tête d'un parti protestant, avait pris Montbrison. La ville avait connu massacres et pillages. Plusieurs prisonniers avaient été jetés du haut du donjon. Ces crimes abominables avaient frappé les esprits.

Revenons au coup de foudre de 1582. Un incendie suit. Mais il reste certainement des débris sur place. L'histoire nous semble embellie pour devenir symbolique. La "Reverdine", brave femme et figure d'innocence, est très "étonnée", au sens propre - mais indemne, par miracle. Le mécanisme de l'horloge démantibulé a peu souffert. La cloche est épargnée. Seule la tour maudite a totalement disparu… L'anecdote devient un conte. C'est une leçon. Chacun a ce qu'il mérite.



"Pour expier le crime des ennemis"



Granjon
rapporte que "Les Montbrisonnais persuadés que la vengeance céleste s'était exercée sur cette tour à cause des crimes dont elle avait été en quelque sorte l'instrument firent sculpter autour de leurs armes : ad expiandum hostile scelus", pour expier le crime des ennemis. La devise rappellerait donc cet accident mémorable.

Quant à la cloche, elle fut installée dans le clocher de Notre-Dame. Et brisée en 1793. Granjon d'ailleurs le regrette beaucoup car, dit-il, "elle était unique dans son genre". "Elle avait la forme d'un pain de sucre". Et il la rattache aux fameuses cloches de Nole, en Campanie, là où l'évêque saint Paulin avait, suivant la tradition, installé les premiers campaniles.

Finissons avec une coutume plus gentillette concernant notre donjon disparu. "Le soir du dimanche après le mercredi des cendres, on était dans l'usage de jeter du haut de cette tour des brandons de paille ou de bois dont les flammes étaient aperçues de plusieurs lieues à la ronde. C'est ainsi que nos bons aïeux terminaient les plaisirs du Carnaval", se réjouit Granjon. Des torches enflammées, c'était mieux que des prisonniers de guerre !

Joseph Barou

[la Gazette du 15 juin 2007]


ad expiandum
hostile scelus


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