De
Gumières... Mais je vais vous dire [parler] du temps
très vieux, très passé qui date, le premier
départ, de 1922, 1923, il y a 73, 74 ans. Ce n'est pas
d'aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, j'en ai 85, bientôt.
Quand on commençait, à la campagne, ma mère
nous parlait toujours patois.
Et
quand il fallait aller à l'école, on ne savait pas
un mot de français. Alors quand le maître d'école
nous donnait le livre, le premier livre [...?]
qui
s'appelait "l'épi" pour apprendre les lettres
alphabétiques, il fallait apprendre le français.
Et puis ça arrivait à se faire...
Mais
c'était très pénible pour aller à
l'école parce qu'à cette époque ce n'était
pas comme cette année [en
2000],
il y avait bien plus de neige qu'il n'y en a[maintenant]
et il y avait deux kilomètres environ à faire à
pied avec des sabots.
Les
chaussures, les souliers, les bottes n'existaient pas [chez
nous].
Donc, ils
[les sabots]
"talochaient" comme on disait. La neige se collait aux
sabots. Il fallait taper par terre pour faire tomber la neige
et remarcher un peu.
Et
c'est pour ça que j'ai retenu un bout
[de chanson] d'un
sabotier qu'il y avait à Gumières - ils étaient
deux, trois - mais il y en avait un qui faisait bien des sabots
pour les petits et pour les grands et qui avait fait une petite
chanson, qui est très courte, que je vais vous en dire
deux couplets qui disaient :
Je
taille, je creuse
Je les fais beaux
Ma vie est heureuse
Dans mes sabots.
Dans sa chaumière
La sabotière
Joyeuse et fière
A mis mes sabots.
Je taille, je creuse
Je les fais beaux
Ma vie est heureuse
Dans mes sabots.
Quand
l'enfant pleure
Sourit à l'heure
[?]
Et frappe encore, frappe encore
avec mes sabots.
Je
ne vais pas plus vous parler bien plus longtemps parce que si
je voulais expliquer toute ma vie jusqu'à mon âge,
il faudrait rester jusqu'à demain.

Neige dans les monts du Forez
(cliché Marcel Roinat)

Gumières

Joseph Vente
prisonnier de guerre