Epidémies d'autrefois à Montbrison

(études concernant les épidémies et l'état sanitaire
de la région montbrisonnaise, autrefois)


Hôpital de Montbrison


Lettres patentes de fondation de la Charité



La Charité


Maladrerie Saint-Lazare de Moingt

Meurtrière épidémie chez les frères de Saint-Jean-de-Dieu de Savigneux


Prieuré Sainte-Croix de Savigneux

L'épidémie de variole de 1848 à Montbrison


1897 : les religieuses augustines à l'honneur



Seigneur, délivre-nous de la peste, de la famine et de la guerre !

Ainsi priaient nos ancêtres. A Montbrison, dans le chœur de Notre-Dame, la croix dite d'Estiallet rappelle les misères du temps passé : quand la peste sévissait.

La peste fut au cours des siècles une épouvantable calamité. De 1629 à 1632, une terrible épidémie ravage
le Forez. Saint-Bonnet-le-Château, Chazelles-sur-Lyon, Saint-Galmier, Saint-Marcellin sont frappés.
A Feurs, l'église est fermée et le curé dénombre 700 victimes du 17 juin au 30 septembre 1631.

A Montbrison, l'herbe pousse dans les rues. La population fuit. Les religieuses clarisses qui n'ont pas quitté leur couvent souffrent de la faim...

La croix d'Estiallet

Pour demander la fin de la peste et, à l'avenir, la protection du ciel, les habitants érigent une croix,
sur la rive du Vizézy, au hameau d'Estiallet, à un quart de lieu à l'ouest de la ville. Ils font bien les choses car ce petit monument est remarquable.

La "croix des Saints" ou d'Estiallet, en grès, porte sur un fût haut de 2 m 21, six statues étagées
deux par deux de saints invoqués contre les épidémies. Ce sont : Jean-Baptiste, Laurent, Catherine, Barbe, Madeleine et Pierre. Ces statues étaient peintes de couleurs vives comme en témoignent encore des traces de polychromie. Le croisillon d'origine a malheureusement été perdu. Louis Bernard datait de 1628
le monument.

Cette croix qui avait franchi sans dommage l'époque révolutionnaire fut restaurée une première fois
en 1820. Elle était encore en place près de la rivière au début du 20e siècle. Renversée,
en grand péril de disparaître, elle fut ensuite transportée au musée de la Diana.

Le croisillon manquant a été reconstitué par Louis Bernard. Au temps du père Jacques Court,
curé de Notre-Dame, on a eu l'heureuse idée de la tirer de sa retraite. Elle est installée dans le chœur
de la collégiale, à la gauche de l'autel. Un tel monument se trouve rarement dans une église. Ainsi protégée et mise en valeur, elle constitue un attrait de plus pour le bel édifice.



De nombreuses croix rappellent en Forez ces temps difficiles. Citons seulement la "croix des Argnats"
entre Faury et Essertines-Basses qui a été bien restaurée

.

Le vœu de ville

La menace étant toujours là, après la dernière peste, celle de 1646, les habitants de Montbrison firent, comme en beaucoup d'autres lieux, un vœu solennel :

L'an 1646, et le 2e jour de juillet, fête de la Visitation de Notre-Dame, les habitants de Montbrison,
par la bouche des échevins ont voué et promis à Dieu et à la Sainte-Vierge de faire annuellement
et perpétuellement, à pareil jour, une procession générale en l'esglise collégiale Notre-Dame de ladite ville, laquelle procession partira de ladite église, sortira dans la ville, fera le tour des murailles et puis retournera en ladite église où sera célébrée la grand-messe.


C'est l'origine du "Vœu de ville" qui fut plus ou moins respecté jusqu'en 1966. Il y a quelques années,
la tradition a été reprise mais à une date différente, au début de l'automne. Il fallait bien qu'elle coïncide avec les festivités locales célébrant la fourme !

Joseph Barou (La Gazette du 22 décembre2006)

Pour en savoir plus : Le remarquable ouvrage du père Jean Canard : Les pestes en Beaujolais, Forez, Jarez, Lyonnais du 14e au 18e siècle.

 

 

 


1884 : Les festivités du 14 juillet et de la Saint-Aubrin seront-elles annulées ?

La typhoïde, à cause de la mauvaise qualité de l'eau a souvent sévi à Montbrison, dans le passé. Au cours de l'été 1884, l'épidémie trouble les festivités de juillet.

Emotion en mairie de Montbrison. Ce 10 juillet 1884, le pharmacien Henry Dupuy, maire de la ville, réunit son conseil et annonce gravement "qu'il a reçu la visite de quelques personnes de Montbrison qui lui ont demandé de ne pas laisser célébrer la fête du 14 juillet". En effet la ville de Montbrison est en deuil par suite d'une épidémie de fièvre typhoïde.

Une discussion passionnée

Qu'en pensent ces Messieurs ? Il y a deux camps, comme le plus souvent. "Certains font observer qu'il faut célébrer cette fête, que d'autres épidémies ont éclaté à Montbrison et que les fêtes n'ont pas pour cela été abandonnées. Ce serait faire croire", disent-ils, "que l'épidémie est beaucoup plus grave qu'elle n'est en réalité". Du cran, que diable !

Un certain M. Périer explique, chiffres en mains, que la mortalité n'est pas beaucoup supérieure à celle des années précédentes. Selon lui, il s'agit de pusillanimité : "l'épidémie n'a pas causé autant de morts que les gens peureux ou de mauvaise foi ont intérêt à le faire croire". Du reste l'épidémie frappe non seulement à Montbrison, mais aussi Noirétable, Roche et Gumières. Alors pourquoi donc s'inquiéter ?

Et que viennent faire les cloches ?

M. Cognasse entre dans la discussion par une demande hors sujet : il prie M. le Maire de faire sonner les cloches des églises à l'occasion du 14 juillet. Ce à quoi le magistrat répond que si la loi lui donne bien le droit d'avoir la clef du clocher elle dit aussi que le règlement des sonneries ne peut se faire qu'après accord du préfet et de l'archevêque. On évite de justesse Clochemerle.

Fêtons la Saint-Aubrin en septembre !

Le notaire Chialvo, qui deviendra plus tard maire de la ville, prie le conseil de bien réfléchir avant de décider de la célébration du 14 juillet. Il demande même le renvoi de la fête patronale qui doit suivre à la fin de septembre : "L'épidémie est grave, dit-il, il ne faut pas l'exagérer, il ne faut pas non plus laisser croire à une sécurité qui malheureusement n'existe pas." Les conseils d'hygiène de Paris et Lyon demandent de prendre des précautions. De plus, selon lui, l'état sanitaire de la ville est déplorable.

De toute façon la fête sera gâchée

Et il suggère de distribuer aux indigents, aux familles nécessiteuses, aux malades qui ne peuvent pas acheter les médicaments indispensables, les fonds votés pour célébrer la Saint-Aubrin.

D'ailleurs, dit-il, "la fête de Montbrison sera pâle à côté des fêtes des années précédentes. On dira dans le dehors que la ville est contaminée, nous n'aurons pas d'étrangers et le plus bel ornement de cette fête, le bal, ne sera-t-il pas une cause de recrudescence de l'épidémie que tous nous voudrions conjurer, mais que nous sommes impuissants à détruire".

Après une vive discussion le conseil ne suit pas le prudent Maître Chialvo. Il décide, à une très grande majorité, que la fête du 14 juillet et la fête Saint-Aubrin auront lieu, comme les années précédentes, et aux époques indiquées. Na !

Joseph Barou (Petites histoires montbrisonnaises et foréziennes, n° 40-58 des Cahiers de Village de Forez, 2008-2009)

 

 

 
Conception
David Barou
textes et documentation
Joseph Barou


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mise à jour : 18 mars 2020

 

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