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Le docteur Jean Vial présent
à un rassemblement d'anciens élèves
du collège Victor-de-Laprade, en 1946
Hommage
au docteur
Jean Vial
(1876-1968)
Les doigts d'une main
suffisaient à compter les médecins de Montbrison.
Mais chacun d'eux était bien connu. Ces praticiens étaient
des médecins de famille connaissant souvent toute la lignée
familiale de leurs patients, de l'aïeul au dernier-né.
Parmi eux, le docteur Jean Vial a laissé un grand souvenir.
C'était un homme du pays. La famille Vial
tenait une ferme, aujourd'hui démolie, dans le bourg de Champdieu.
Une branche s'était installée au faubourg
de la Madeleine. Jean Auguste Vial,
fils de Jean et de Marguerite
Laurent, était né à Montbrison le 2
février 1876. Il avait été élève
au petit séminaire de Montbrison. Et ensuite, toute sa vie,
il était resté attaché à son vieux collège.
Devenu médecin, il prit la responsabilité sanitaire
de l'institution, toujours disponible pour surveiller affectueusement
la santé des maîtres et des élèves. C'était
aussi un fidèle participant aux grands "congés
de famille" de la maison.
Barbe blanche et
pince-nez d'or
Nous l'avons connu dans son grand âge alors
qu'il exerçait encore. Silhouette pittoresque : costume sombre,
gilet, chapeau mou, vaste barbe blanche et pince-nez d'or. Le vieux
docteur aurait fait bonne figure dans un roman de Balzac.
Les anciens Montbrisonnais se rappellent encore
qu'il habitait au 22 du boulevard Lachèze.
Il avait acheté en 1923 le bel
hôtel néo-gothique bâti par la famille Leconte.
L'élégante et sévère demeure est à
l'image de l'homme : digne et réservé.
Jean Vial a été
un grand médecin de campagne, au diagnostic sûr, à
l'intelligence du métier sans faille. Simple et familier,
bougon parfois, il répondait sans détour, bien compris
des plus humbles. Lors d'une épidémie de typhoïde,
à qui lui demandait si la maladie était contagieuse,
il répondit : "ça ne
saute pas après". Aux élèves
de l'Institution Victor-de-Laprade
qu'il trouvait frileux, il rappelait les bienfaits de l'eau fraîche.
De son temps, au petit séminaire, il fallait casser la glace
pour se débarbouiller
Parfois, disait-on, chez les pauvres, il oubliait
de se faire payer. D'aucuns disent même qu'il lui arrivait
de laisser, avec l'ordonnance, de quoi acheter les remèdes
Il fut aussi pendant très longtemps le médecin chargé
de l'hôpital et de la maison de retraite
de Montbrison.
Un homme de
devoir
Au service des malades, Jean
Vial l'est aussi à celui de ses concitoyens. Il siège
au conseil municipal pendant plusieurs décennies. Tradition
ancienne à Montbrison où le corps médical a
déjà donné, avant lui, plusieurs maires : les
docteurs Rey, Dulac, Rigodon...
Son tour arrive à un moment difficile :
1943, la défaite
et l'occupation. Il faut trouver un
remplaçant à Maître Pierre
Gaurand qui est malade. La position de maire n'est guère
enviable. Homme de devoir, le docteur Vial accepte de devenir maire
de la ville le 18 juin 1943. Il fait
de son mieux puis s'efface aussitôt sa tâche accomplie.
En 1949, il perd son
épouse. Il continue jusqu'à un âge avancé
à pratiquer la médecine. Pour les Montbrisonnais,
il devient "le Vieux Vial",
appellation affectueuse qui sert à le distinguer de son fils
Jean-Louis, médecin aussi comme
son petit-fils, Jean-Yves.
Pour finir ses jours, le docteur Vial se retire
à l'hôtel-dieu de Montbrison
auprès des surs augustines. Il y occupe discrètement
une petite chambre jusqu'à son décès le 24
octobre 1968. A ses funérailles, un grand nombre de
Montbrisonnais se sont retrouvés pour dire un amical adieu
à un homme qui a honoré son métier et sa ville.
Pourquoi notre ville n'aurait-elle pas une rue dédiée
au docteur Jean Vial ? (1)
Joseph
Barou