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La loge à la boule
La loge à la boule

du chemin des Raines


La loge. Chez nous, en Forez, elle n'a rien de maçonnique. Quatre murs, un toit, une porte et une fenêtre, voilà notre loge.

La loge, la boutasse et la grenouille

C'est la maisonnette du vigneron et du jardinier. Elle est modeste mais indispensable. Il n'y a pas de vrai clos ni de vigne digne de ce nom sans une loge. Sinon, où ranger les outils, la sulfateuse verdie et le chapeau de paille ? Et où se réfugier quand l'orage survient ?

Soubassement de pierre, banchées de pisé, tuiles creuses, parfois un étage : rien de plus simple et de plus poétique. Quelques-unes risquent un peu de fantaisie : décor de brique, rang de génoise, treille… Jamais rien de m'as-tu-vu.

Tout près, il faut la "boutasse". Non pas une quelconque mare comme dans la plaine. Mais plutôt une petite citerne à ciel ouvert, carrée et bien bâtie. Elle reçoit l'eau du ciel. Et ne craint pas la canicule. Dans les anciens jardins, tout un réseau de drains en terre cuite - les "touésons" - l'alimente grâce aux petites sources secrètes.

Toute verte de lentilles, cette petite pièce d'eau rustique est le royaume de la grenouille. Elle se chauffe au soleil sur les trois marches de pierre avant de plonger quand paraît le jardinier avec son arrosoir de zinc.

La loge à boule

Prenons le chemin des Raines, enfin celui des Grenouilles si l'on préfère. Aux confins de Maupas et Montaud, là où Montbrison s'étire vers Champdieu et Curtieu, il reste çà et là quelques loges.

Dont la loge à boule. Une sphère de pierre orne le faîte du pignon. C'est ce qui fait tout son charme. Elle a un étage et une aile. De pisé mais construite pour durer, elle a même servi de logis à toute une famille, avec plusieurs enfants, dans les années cinquante. Elle a été coquette, jolie, presque belle dans son innocence. On la croirait sortie d'un roman d'Henri Bosco.

Depuis longtemps, la famille a trouvé un autre toit. La vigne est devenue pré, le jardin inculte une broussaille. La loge se lézarde, perd ses tuiles. La fenêtre bée. Le volet bat. Couvertes de blessures, la vieille loge tient encore le coup. Mais ses jours sont comptés. Les lotissements se rapprochent de jour en jour.

A Montaud, Maupas, Martel, la chouette chevêche n'est plus en paix. Quand la dernière loge aura disparu où ira habiter l'oiseau de nuit ?

Peut-être ne restera-t-il bientôt en Forez que la loge qui orne le rond-point de l'entrée de Boën ? Une bonne idée de l'administration, cette pièce de musée en plein air. C'est mieux que rien.

Joseph Barou

[La Gazette du 9 mars 2007]

      P.S. : La loge à boule a été rasée en avril 2014, hélas !



la loge du rond-point de Boën


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