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Joseph Barou
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L'ancien collège des
Oratoriens de Montbrison
devenu préfecture puis sous-préfecture
Dernières
fêtes
dans les salons de la préfecture
de Montbrison
1854
: Napoléon III commence son règne. Montbrison est
encore préfecture de la Loire. Et Monsieur le Préfet
reçoit.
Dans vos fêtes d'hiver, riches, heureux du monde
Quand le bal tournoyant de ses feux vous inonde...
Oh ! songez-vous parfois, que de faim dévoré,
Peut-être un indigent dans les carrefours sombres
S'arrête, et voit danser vos lumineuses ombres
Aux vitres du salon doré ?
(Victor Hugo, Pour les pauvres, feuilles
d'automne)
Le gouvernement impérial souhaite qu'à l'image de
la Cour une vie mondaine anime les préfectures. Les fêtes
sont utiles tant sur le plan politique qu'économique. Le
Moniteur, journal officiel de l'Empire, n'en doute pas : Les
dépenses d'un grand bal retombent comme une pluie d'or sur
toutes les industries. M. Ponsard, préfet de la Loire,
suit bien la consigne. Il utilise chaque occasion pour louer la
politique "paternelle" de l'Empereur. Et il organise des
collectes en faveur des indigents.
La femme
du préfet et les dames de la Miséricorde
L'hiver est, par excellence, la saison
des fêtes et des réceptions. Le 31 décembre
1853, les employés de la préfecture présentent
leurs vux au préfet. "Spontanément et
à l'unanimité", paraît-il, "ils
manifestent l'intention d'abandonner au profit de la classe nécessiteuse,
une portion de leur traitement". Le préfet les félicite
de ce beau geste. Il met, lui aussi, la main à la poche.
350 F sont ainsi versés au bureau de bienfaisance.
Le jour de l'an 1854, le préfet reçoit la municipalité
de Montbrison. Au cours des vux, il invite avec chaleur "les
classes aisées à suivre l'impulsion et les généreuses
pensées de l'Empereur en venant au secours des malheureux
sur qui pèsent cet hiver des souffrances exceptionnelles".
Le 19 janvier suivant, il y a une grande soirée dans les
salons de la préfecture. La fête rassemble une "gracieuse
affluence où l'on remarque les dames aux toilettes brillantes,
les principaux fonctionnaires et les notabilités"...
Le théâtre de la Préfecture donne deux vaudevilles
: "Bertrand et Suzette" et "l'Homme blasé".
Avant de passer dans les salons, l'épouse du préfet
fait le tour des invités avec son "aumônière
des malheureux". La quête produit 530 F. Elle est répartie
entre le bureau de bienfaisance et l'uvre des dames de Miséricorde
dont fait partie madame Ponsard. Le 16 février, il y a une
autre fête à la préfecture et une collecte donne
310 F. Avec cet argent une distribution est faite aux nécessiteux
dans le mois qui suit. 500 kg de pain et 100 quintaux de charbon
vont à 121 familles soit 700 personnes. Pas si mal !
La
politique de l'aumônière
Le pouvoir se sert d'uvres charitables, comme celle des
dames de la Miséricorde, pour
saupoudrer un peu d'aide envers les miséreux. Chaque fois,
il en fait un acte de propagande en faveur du régime. Vivres
et combustibles sont donnés à des moments choisis
: fête nationale du 15 août, baptême du prince
impérial, réception à la préfecture...
Ces festivités sont bien jugées par la presse locale.
Elles rappellent un peu l'Ancien Régime, époque où
les pauvres de la ville bénéficiaient des "habitudes
libérales" de quelques familles riches.
Napoléon III a écrit dans "l'Extinction
du paupérisme" : "La
pauvreté ne sera plus séditieuse lorsque l'opulence
ne sera plus oppressive". Pour lui la lutte contre
la misère permet d'assurer la tranquillité politique.
Mais il n'est pas question de changer l'ordre social établi.
Le 1er janvier 1856 la préfecture
quitte Montbrison pour Saint-Etienne. Les pauvres restent. Et les
fêtes suivantes auront moins d'éclat...
[La Gazette du 5 janvier
2007]
Armes du second Empire sur la façade
de la Diana à Montbrison
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