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En ligne :

L'oeuvre de la Miséricorde
de Montbrison
(format pdf, 13 p.)

 

 

concernant la pauvreté
et l'assistance :

L'oeuvre des Petits bergers
du Forez
(format pdf, 1 p.)

La Société des jardins ouvriers
de Montbrison (1908-1983)
(format pdf, 6 p.)

La bannière
des Ouvriers Réunis

(format pdf, 1 p.)

voir aussi
les pages spéciales


La mutualité


La Ruche
montbrisonnaise


Les vols alimentaires
au 19e siècle

 

 

Conception
David Barou

textes et documentation
Joseph Barou


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Forez
 


L'ancien collège des Oratoriens de Montbrison
devenu préfecture puis sous-préfecture

Dernières fêtes
dans les salons de la préfecture
de Montbrison

 

1854 : Napoléon III commence son règne. Montbrison est encore préfecture de la Loire. Et Monsieur le Préfet reçoit.

Dans vos fêtes d'hiver, riches, heureux du monde
Quand le bal tournoyant de ses feux vous inonde...
Oh ! songez-vous parfois, que de faim dévoré,
Peut-être un indigent dans les carrefours sombres
S'arrête, et voit danser vos lumineuses ombres
Aux vitres du salon doré ?


(Victor Hugo, Pour les pauvres, feuilles d'automne)

Le gouvernement impérial souhaite qu'à l'image de la Cour une vie mondaine anime les préfectures. Les fêtes sont utiles tant sur le plan politique qu'économique. Le Moniteur, journal officiel de l'Empire, n'en doute pas : Les dépenses d'un grand bal retombent comme une pluie d'or sur toutes les industries. M. Ponsard, préfet de la Loire, suit bien la consigne. Il utilise chaque occasion pour louer la politique "paternelle" de l'Empereur. Et il organise des collectes en faveur des indigents.


La femme du préfet et les dames de la Miséricorde

L'hiver est, par excellence, la saison des fêtes et des réceptions. Le 31 décembre 1853, les employés de la préfecture présentent leurs vœux au préfet. "Spontanément et à l'unanimité", paraît-il, "ils manifestent l'intention d'abandonner au profit de la classe nécessiteuse, une portion de leur traitement". Le préfet les félicite de ce beau geste. Il met, lui aussi, la main à la poche. 350 F sont ainsi versés au bureau de bienfaisance.
Le jour de l'an 1854, le préfet reçoit la municipalité de Montbrison. Au cours des vœux, il invite avec chaleur "les classes aisées à suivre l'impulsion et les généreuses pensées de l'Empereur en venant au secours des malheureux sur qui pèsent cet hiver des souffrances exceptionnelles".

Le 19 janvier suivant, il y a une grande soirée dans les salons de la préfecture. La fête rassemble une "gracieuse affluence où l'on remarque les dames aux toilettes brillantes, les principaux fonctionnaires et les notabilités"... Le théâtre de la Préfecture donne deux vaudevilles : "Bertrand et Suzette" et "l'Homme blasé".

Avant de passer dans les salons, l'épouse du préfet fait le tour des invités avec son "aumônière des malheureux". La quête produit 530 F. Elle est répartie entre le bureau de bienfaisance et l'œuvre des dames de Miséricorde dont fait partie madame Ponsard. Le 16 février, il y a une autre fête à la préfecture et une collecte donne 310 F. Avec cet argent une distribution est faite aux nécessiteux dans le mois qui suit. 500 kg de pain et 100 quintaux de charbon vont à 121 familles soit 700 personnes. Pas si mal !


La politique de l'aumônière

Le pouvoir se sert d'œuvres charitables, comme celle des dames de la Miséricorde, pour saupoudrer un peu d'aide envers les miséreux. Chaque fois, il en fait un acte de propagande en faveur du régime. Vivres et combustibles sont donnés à des moments choisis : fête nationale du 15 août, baptême du prince impérial, réception à la préfecture... Ces festivités sont bien jugées par la presse locale. Elles rappellent un peu l'Ancien Régime, époque où les pauvres de la ville bénéficiaient des "habitudes libérales" de quelques familles riches.

Napoléon III a écrit dans "l'Extinction du paupérisme" : "La pauvreté ne sera plus séditieuse lorsque l'opulence ne sera plus oppressive". Pour lui la lutte contre la misère permet d'assurer la tranquillité politique. Mais il n'est pas question de changer l'ordre social établi. Le 1er janvier 1856 la préfecture quitte Montbrison pour Saint-Etienne. Les pauvres restent. Et les fêtes suivantes auront moins d'éclat...

Joseph Barou

[La Gazette du 5 janvier 2007]

Armes du second Empire sur la façade de la Diana à Montbrison