
On
remarque le public clairsemé...
Montbrison,
la grande corrida de 1936
Du 20 mai au 1er
juin 1936, Montbrison organise la première foire-exposition du
département. Dix jours de festivités avec, comme point
d'orgue, une grande corrida... Ollé !
Annoncée
à cor et à cri
Expositions, concours, concerts, spectacles se succèdent.
Pour mettre du piment, les organisateurs ajoutent une corrida. une vraie.
La "Banda-Comico-Taurina El Emplastre"
de Barcelone et Valence avec les célèbres toréadors
du Cartel de Madrid entrent en scène. La troupe ne compte pas
moins de 40 personnes : matadors, toréadors, banderillos, capéadors,
musiciens, virtuoses... Deux séances sont annoncées, le
31 mai et 1er juin. Avec force publicité.
Le succès fut-il au rendez-vous ? Certainement pour le chroniqueur
du "Journal de Montbrison" :
"En
dépit d'un temps menaçant et d'une température
qui n'avait rien d'estivale... Le public amateur de spectacles d'un
genre nouveau s'entassait dans les arènes de la place Grenette
pour y assister à la grande corrida.Toutes les parties du spectacle
furent fort bien exécutées par la troupe "El Emplastre".
La partie musicale, fort bien réussie, suscita de chaleureux
applaudissements... Le même spectacle renouvelé le lendemain,
jour de Pentecôte, connut le même succès".
Un vrai four
Un triomphe ? Marguerite Fournier, l'historienne de Montbrison,
témoin oculaire, parle plutôt d'un grand flop. Elle raconte
l'échec de la corrida dans ces fameuses arènes transportées
d'Arles et installées à grands frais sur la place Eugène-Baune.
"Les Montbrisonnais boudèrent le spectacle d'où un
déficit énorme pour les organisateurs..."
Citons aussi les souvenirs de Jean Soleillant. Ils vont dans le même
sens :
"Le clou de la fête était l'organisation par la troupe
El Emplastre d'une corrida avec mise à mort, ce qui était
strictement interdit par la loi. L'arène édifiée
place Eugène-Baune était clôturée par des
palissades en bois. Ce ne fut pas un grand succès populaire.
Le pauvre taureau fut cependant exécuté. Un cheval de
la maison Perret lui fit faire son dernier trajet. Outre ses démêlés
avec la justice par suite de cette mise à mort non autorisée,
le directeur de la troupe, qui avait vu trop grand à Montbrison
et aussi ailleurs, fut placé en faillite."
De la corrida au basket
Mais à quelque chose malheur est bon, Jean Soleillant
poursuit : "Le matériel bloqué
à Montbrison fut mis aux enchères publiques trois ans
plus tard. Détail amusant, les palissades de "l'arène"
furent acquises pour un prix dérisoire par le trésorier
du BCM et constituèrent la clôture du terrain de basket
au parc Levet".
Pour le même prix le BCM avait obtenu
les tickets non vendus, si bien que par souci d'économie, les
spectateurs de basket ont reçu pendant plusieurs matches des
contremarques d'entrée troupe "El Amplastre !..."
El Emplastre ! le nom même
manquait de sérieux. Et puis en Forez les corridas ne sont pas
de saison. Tant mieux pour le taureaux !
Joseph Barou
Sources :
Journal de Montbrison du 6 juin
1936
Marguerite Fournier, "La première foire-exposition au
jardin d'Allard (1936)",
Village de
Forez n° 39, 1989
Jean Soleillant, "Souvenirs", Cahier
de Village de Forez, n° 2, 2004.