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Quelques dates
pour l'histoire
du cinéma
à Montbrison
Avant 1907,
les premiers films muets sont présenté à
Montbrison sur la place Grenette par des forains.
1910 :
première séance de cinéma à la salle
Saint-Pierre de la rue du Collège :
on annonce la première
séance
de cinéma, dans le cadre
du patronage du dimanche.
Elle aura lieu, dans la salle
des uvres de la rue du Collège, évidemment.
Jusque là
les abbés se contentaient
de la lanterne magique.
La séance commencera exactement à 4 h 1/2, heure
du clocher de Notre-Dame.
Cette heure une fois passée les portes seront fermées
Il en coûte 1 F pour voir
les merveilles du cinématographe et on attend
la grande foule
En effet, la salle est bondée.
La séance dure deux heures.
Elle comprend un petit film
sur le pèlerinage à Lourdes
puis une "partie amusante"
avec "le généreux dévouement
du médecin de campagne",
"La punition méritée
de deux petits vauriens",
"les débuts malheureux d'un chauffeur",
"les multiples farces de Toto"...
A mesure que se déroulaient
les vues, sous la direction habile de M. l'Abbé Pâtissier,
M. l'Abbé Planchet en donnait
une courte et claire explication .
Le chroniqueur
du bulletin paroissial
est enthousiasmé :
" Il
mérite vraiment bien son nom de "Merveilleux"
le Cinématographe,
dernière création
de la maison Pathé,
de Paris, dont Mme de la Bâtie vient de doter l'uvre
du patronage du dimanche...
On se croyait à Lourdes...
(extrait de J. Barou, L'école
Saint-Aubrin, notes d'histoire, Cahier de Village de Forez,
n° 32, 2007)
Avant la guerre de 1914-1918,
chaque année à l'occasion de la fête patronale
, un petit cinéma ambulant, le Royal-Bio s'installe sur
la place Grenette avec une vaste baraque
de toile et de bois. La déclaration de guerre arrive
alors qu'il est
à Montbrison. Il reste donc
sur place. En 1921, il s'installe pour quelque temps dans l'ancienne
chapelle des Pénitents.
En 1916 le Royal-cinéma
est installé rue du faubourg
Saint-Jean dans la salle
Franchisseur.
1913
: inauguration
de la salle des oeuvres
de Notre-Dame.
1917 :
création, quai de la Porcherie
du cinéma l'Astrée
par MM. Farjot et Bourges.
1920
: installation du
Cinéma des Familles
dans la salle des oeuvres
du boulevard Lachèze.
1938
: le Cinéma des Familles devient le Lux
1943
: Le Lux change de nom.
Sa gestion passe de la paroisse de Notre-Dame à une association
loi de 1901.
1982
: la salle unique du Rex
est remplacée par plusieurs salles.
1999 :
modernisation de l'établissement.
2004 :
le Rex passe un contrat avec la
ville de Montbrison (contrat d'objectifs et de moyens lui reconnaissant
un statut de service culturel à destination
de tous les publics)
Aujourd'hui
(jusqu'en novembre 2016) :
3 salles et 440 fauteuils,
son numérique
et climatisation
de toutes les salles,
vaste hall d'accueil,
100 000 spectateurs par an
un classement Art et Essai, Label Jeune Public
Un réseau de 40 salles
et 5 circuits itinérants.
[selon la documentation fournie par le Rex]
Mercredi 30 novembre, ouverture du nouveau cinéma Rex,
10, avenue Charles-de-Gaulle :
5 salles,
840 places.
Et
l'Astrée :
L'Astrée, carte postale
ancienne
(ce jour-là, à l'affiche Salambô
de Gustave Flaubert)
Le
vieil homme
et son cinéma
(presse locale du 24 mai 1995)
Le même jour publicité
pour le cinéma Rex
Aujourd'hui
quai d'Astrée
Façade de l'ancien cinéma
L'ASTREE
Le
Rex
(décembre
2008)
En
1943
1939
: la guerre
L'Astrée
doit réduire ses activités
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gestion
du site : Joseph Barou
questions,
remarques ou suggestions :
s'adresser :
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Le
Rex
à Montbrison
LA MAISON DES UVRES
DE NOTRE-DAME
AUJOURD'HUI CINEMA
"REX" A TRAVERS 3/4 DE SIECLE
par Marguerite Fournier
Tous les Montbrisonnais connaissent le bel immeuble
du REX dont les panneaux publicitaires éclaboussent chaque
soir de lumière le coin du boulevard Lachèze, mais ils
se font de plus en plus rares ceux qui l'ont vu construire et ont
suivi ses destinées pendant plus de trois quarts de siècle...
C'est en effet en 1912 qu'une bienfaitrice de la paroisse Notre-Dame,
Madame de la Bâtie, fit élever
ce magnifique bâtiment pour servir de Maison des uvres.
Les soins les plus éclairés furent apportés à
sa construction.
D'importantes fondations furent nécessaires ; les différentes
couches de terrain rencontrées n'étant pas assez solides,
il fallut aller au-dessous de l'ancien lit du Vizézy qui devait
s'étendre jusque là autrefois.
On choisit aussi des matériaux solides pouvant résister
longtemps à toutes les intempéries : un moellonnage
en pierre de Moingt, façonné et tiré par rang
pour les murs, un mélange judicieux de briques sur-cuites,
provenant des environs, et de pierres de taille de calcaire jaune
clair de Saint-Maurice-de-Châteauneuf (Saône-et-Loire),
quelques briques de couleur émaillées, jaunes ou vertes,
disséminées ça et là dans les bandeaux
et intercalées avec la brique rouge des arcades pour jeter
une note de gaîté sur l'ensemble... Les piles du préau
étaient en pierre de Saint-Maurice, leurs bases, ainsi que
les perrons extérieurs en beau granit bleu de Civens, près
de Feurs.
Nous extrayons ces renseignements de l'almanach paroissial qui décrit
ainsi le bâtiment :
La Maison des uvres de la paroisse
Notre-Dame, située à l'intersection de la rue Rivoire
et du boulevard Lachèze est un bâti rectangulaire de
25,70 m de longueur et de 12 m de largeur avec deux ailes aux extrémités.
Elle est séparée du boulevard par la cour et sa face
latérale est en bordure de la rue Rivoire.
Le rez-de-chaussée est occupé
par un vaste préau de 14 mètres sur 12 mètres
; à gauche, en bordure de la rue, logement d'un concierge composé
de deux pièces ; à droite, salle de réunion de
12 m de long sur 5 m de large, enfin, dans les deux ailes, cages d'escalier
accédant aux étages.
Le premier étage est occupé en entier par la salle de
spectacle. La salle proprement dite s'étend sur 19 m de long
et 11 m de large. Elle est étagée en gradins. Tribune,
au fond, de 11 m sur 5. Scène à l'extrémité
de droite : 11 m sur 5. Coulisses en dessous de mêmes dimensions.
La hauteur d'étage de la salle est de 6 m.
Le deuxième étage comporte un vaste couloir et plusieurs
grandes salles à l'usage des jeunes gens et des hommes du Cercle
catholique.
La bénédiction solennelle de l'édifice avait
lieu le 6 avril 1913 par Mgr Vindry, coadjuteur de l'archevêque
de Lyon. Il allait bientôt connaître une intense activité.
LES UVRES
PAROISSIALES
Les oeuvres ne manquaient pas à Montbrison
en ce temps-là. De jeunes vicaires les dirigeaient. A M. l'abbé
Freyssinet incombait la direction du patronage et des chorales : l'une
d'hommes et de jeunes gens comprenant une trentaine de membres, l'autre
d'enfants connue sous le nom des Petits Chantres
de Notre-Dame, au nombre de 40 en 1913. Toutes les répétitions
avaient lieu à la Maison des uvres y compris celles des
clairons et tambours de la Société de Gymnastique, les
P'tits Fifres Montbrisonnais.
M. l'abbé Baleydier dirigeait les divers cercles : celui des
hommes, ouvert les mercredis et jeudis de 8 à 10 h du soir,
et les dimanches de 3 h de l'après-midi à 10 h du soir.
On y jouait à la manille, au billard, on discutait, on trinquait,
on passait de bons moments dans la camaraderie et l'amitié...
Quelquefois le Cercle organisait une veillée familiale à
laquelle femmes et enfants étaient invités.
Le Cercle des jeunes gens ouvert aux jeunes de plus de 15 ans fonctionnait
chaque dimanche "après les vêpres". Enfin le
Cercle d'Etudes Religieuses et Sociales s'adressait à tous
ceux qui voulaient approfondir leurs connaissances en ces domaines
; des personnalités montbrisonnaises ou stéphanoises
- tel Maître Auguste Preynat - des membres du barreau ou des
fonctionnaires de l'administration mettaient leur compétence
au service de leurs concitoyens.
Toutes ces réunions avaient lieu au second étage de
l'immeuble. L'uvre des Jardins Ouvriers, fondée en 1908,
y avait également son siège ainsi que l'Union Catholique
du Personnel des Chemins de Fer dont les réunions se tenaient
le premier mercredi de chaque mois.
LES PREMIERS SPECTACLES
Ainsi que nous l'avons dit, le premier étage était occupé
par une vaste salle de spectacle éclairée par de hautes
fenêtres aujourd'hui condamnées. Un magnifique rideau,
représentant une vue panoramique de la ville peinte par des
Montbrisonnaises de talent, séparait la scène de la
salle et était aux dires du chroniqueur de l'époque
"une fête pour les yeux".
Des spectacles divers allaient se succéder. Le premier dont
il est fait mention dans le bulletin paroissial est le concert vocal
donné le dimanche 5 mai 1913 par le chansonnier chrétien,
Henri Colas, au profit de l'uvre des Jardins Ouvriers.
Voici quelques titres de ses chansons : Les
grands oiseaux - Sur la place
de l'Église - Il faut aimer la vie - Le chemineau - Le vieux
clocher - Noce villageoise - Les vieux seuils...
Le 8 juin, une séance de cinéma comportant 2 000 m de
film permettait aux Montbrisonnais de voir alternativement du sérieux
et du comique... Mais la Veillée d'Austerlitz
et le 500e anniversaire des fêtes de
Jeanne d'Arc ne remportaient pas autant de succès
que Gribouille et Patouillard
!
LE NAUFRAGE DU TITANIC
Le plus grand événement cinématographique de
cette année 1913 fut, le dimanche 6 juillet, à 8 h du
soir, la projection du film relatant le naufrage du Titanic. Il s'était
produit l'année précédente dans la nuit du 14
au 15 avril, et le monde entier en avait été bouleversé.
C'était le plus terrible des "drames de la mer"
où 1 500 passagers avaient trouvé la mort.
Le spectacle annoncé à grand renfort d'affiches attira
la foule à la Maison des uvres ... La salle s'avéra
trop petite et on lit dans le compte rendu que de
nombreux spectateurs durent rester debout... (qu'en dirait
aujourd'hui le service de sécurité ?). Par contre, les
fenêtres étaient grandes ouvertes pour tempérer
la chaleur !
L'émotion fut à son comble lorsque, pendant que le paquebot
s'enfonçait dans la mer, la chorale chantait "Plus
près de Toi, mon Dieu" ... Les Montbrisonnais
vécurent alors des moments inoubliables !
LE COMIQUE BENOIST MARY
La gaîté reprenait ses droits avec le comique lyonnais
Benoist Mary qui après s'être produit plusieurs fois
sur la scène de la salle Saint-Pierre, rue du Collège,
venait pour la première fois salle Notre-Dame le dimanche 30
novembre.
Au programme Bas bleu ou Les
aventures d'une femme de lettres, comédie inédite
en trois actes, et de nombreux intermèdes comiques : chansons,
monologues, scènes d'imitation, scènes militaires, etc.
Avec son accent du pays de Guignol, Benoist Mary annonçait
la Mère Cottivet qui devait
venir à la radio quelque vingt ans plus tard. Certains de ses
gags sont restés légendaires.
LES OBERLE
Le 7 juin 1914 eut lieu, salle Notre-Dame, la représentation
par le Groupe Artistique de la
pièce patriotique tirée du roman de René Bazin
: Les Oberlé.
Il faut se reporter à l'esprit de l'époque pour se faire
une idée de l'enthousiasme qui souleva alors nos concitoyens.
Le drame de cette famille alsacienne déchirée par le
désaccord profond entre les vainqueurs et les vaincus fut ressenti
avec une telle acuité qu'il s'en fallut de peu que le Montbrisonnais
qui tenait le rôle de l'officier allemand Wilhem von Farnow
ne fût sorti de la scène avec grand fracas !
Certes, l'idée de la revanche flottait dans l'air mais personne
ne se doutait ce jour-là que, deux mois plus tard, les Allemands
en chair et en os occuperaient la même place et que la toute
neuve Maison des uvres serait convertie en un camp de prisonniers
! Il y a parfois des événements prémonitoires
: la représentation des Oberlé en était un.
Les quatre ans qui suivirent, avec leur cortège de deuils et
de larmes, ralentirent le fonctionnement des activités paroissiales
transférées dans d'autres locaux... Enfin, après
l'Armistice, la Maison des uvres de Notre-Dame pouvait reprendre
vie et rayonner à nouveau sur la ville.
LE CINEMA DES FAMILLES
Il fallut pourtant attendre la fin
de 1920 pour la voir se lancer dans la grande aventure du cinéma
et y demeurer fidèle pendant plus de soixante années.
Le bulletin paroissial de Notre-Dame s'exprime ainsi :
Cette fois, c'est vrai ! Le Cinéma
des Familles va marcher. Il dormait depuis 1914 à la Maison
des uvres de Notre-Dame. L'installation a été
complètement transformée et faite d'après les
dernières découvertes de la science cinématographique.
L'inauguration aura lieu le dimanche 19 décembre
à 4 h. En voici le programme :
- Vie et scènes à Tanger, documentaire ;
- Les fêtes du 11 novembre à Paris ;
- Médecin malgré lui (comique) ;
Intermède
- Quand on conspire, opérette en un acte par le Groupe Artistique
;
- Les Indes noires, grand drame en deux parties ;
- Polydor ensorcelé, comique...
Prix des places : premières 1,50 F ; tribunes 1 F ; secondes
0,75 F
Et cela va continuer ! Tous les dimanches la salle se remplit et les
Montbrisonnais des années vingt en prennent pour leur semaine
! Le programme de cinéma est le plus souvent entrecoupé
de saynètes exécutées avec entrain par le Groupe
Artistique. C'est ainsi que les 3 et 10 avril 1921, le
grand film dramatique en 9 parties "Victime"
alterne avec des sketches comiques : Candidat
au conservatoire et Madame est
bien malade
Le public apprécie cette détente
et rit de tout son cur. Deux jeunes, "Rémi"
et "Miré", n'ont pas
leurs pareils pour engendrer la gaîté,
Certains dimanches, le Groupe Artistique
à lui tout seul accapare la scène... Son répertoire
est varié et passe sans effort du tragique au comique. On s'en
rend compte par ces quelques titres :
- le 5 juin 1921 : Chantepie,
drame en trois actes de Théodore Botrel.
- le 4 décembre 1921 : Les Jacobins,
drame de la Révolution en 4 actes.
- le 25 mai 1922 : Les crampons de sauvetage,
comédie en 4 actes d'une drôlerie exceptionnelle.
- le 11 novembre 1923 : Mirage d'Afrique,
drame du Sahara.
On n'a pas oublié le succès remporté sur cette
scène pendant plusieurs dimanches consécutifs par la
représentation de Jeanne d'Arc
avec ses tableaux somptueux, son orchestre, ses churs, et surtout
le jeu de ses acteurs qui y mirent tout leur enthousiasme et toute
leur foi... Il y aurait beaucoup à dire sur ce groupe artistique
montbrisonnais qui fit les beaux jours de la salle Notre-Dame... et
dont restent quelques survivants...
LE CINEMA LUX
Les années passent. Le parlant succède au muet avec
ses nouvelles vedettes...
On fait la connaissance de Gaby Morlay, Danielle Darrieux, Victor
Francen, Harry Baur, Marguerite Moreno, Lilian Harvey, Arletty, Henri
Garat, Charles Vanel, Larquey, Spencer Tracy et des inénarrables
Laurel et Hardy... Car le cinéma des familles veut se montrer
à la hauteur de sa réputation en ne donnant que des
films de qualité.
En voici quelques titres :
Crime et châtiment d'après
Dostoïevski avec Harry Baur et Pierre Blanchar.
Napoléon d'Abel Gance.
La chanson de l'adieu, évocation
de la vie de Chopin.
La Maternelle avec Madeleine Renaud.
Cigalon et
Merlusse, deux films de
Marcel Pagnol.
David Copperfield, Michel
Strogoff, Le baron tzigane,
Don Bosco, Pasteur
(avec Sacha Guitry), L'homme invisible,
Tarass Boulba, L'appel
du silence qui évoque la vie du Père de Foucauld,
Les deux gamines (film qui a
fait tirer bien des mouchoirs !), La charge
de la brigade légère, Nitchevo
ou l'agonie du sous-marin Port-Arthur, La
chanson du souvenir avec Martha Eggerth, Le
Mioche avec Lucien Baroux, L'escadron
blanc d'après le roman de J. Peyré, Rembrandt
avec Charles Laughton, San-Francisco, l'effroyable cataclysme
qui détruisit cette ville en 1900, Ces
dames aux chapeaux verts d'après le roman de Germaine
Acremant etc.
Un soir d'octobre 1938, les Montbrisonnais qui se rendent au spectacle
voient sur le portail d'entrée une belle enseigne au néon
composée de trois majuscules qui sont à elles seules
tout un programme : "Lux",
la lumière... Telle est la nouvelle appellation de leur cher
cinéma des familles...
Pour fêter ce changement, on leur offre une superproduction
Le tigre du Bengale et, la semaine suivante,
Le tombeau hindou. Il y aura ensuite Capitaines
courageux tiré du roman de Kipling. Les 26 et 27 novembre
Un grand amour de Beethoven avec
Harry Baur et Annie Ducaux. Puis, les Dieux
du stade, les jeux athlétiques de Berlin avec 1
000 athlètes et un million de spectateurs, film qui fera frémir
la France à la veille de la Seconde Guerre mondiale...
C'est le 16 mars 1939 que le "Lux" donne la merveille de
Walt Disney : Blanche-Neige et les sept nains
dont la poésie et la beauté n'ont jamais été
égalées...
Et puis ce fut le Rex dont l'histoire
continue...
Marguerite Fournier
Sources : Bulletins
paroissiaux de Notre-Dame, 1913-1939. Souvenirs personnels.
(Extrait de Marguerite
Fournier Raconte, Village de Forez-La Diana, 1993)
*
* *
6 avril 1913
Inauguration de la Maison des oeuvres
de Notre-Dame
d'après
le Bulletin paroissial de Notre-Dame,
année 1913
*
* *
Le cinéma
par
Marguerite Fournier
J'ai connu les premiers balbutiements
du cinéma comme tous ceux qui ont vécu au début
du siècle : images floues et sautillantes, scènes burlesques
et hilares.
Auparavant il y avait eu la lanterne magique et nous en avions une
à la maison. Eclairée d'abord par une lampe à
pétrole, elle le fut par la suite par une lampe à acétylène
dont la lumière éblouissante n'avait d'égale
que l'abominable odeur.
On nous menait aussi aux projections, salle Saint-Pierre, où
on nous passait des vues sur Lourdes et sur les missions. L'éclairage
de la lanterne était fourni par un gaz oxhydrique contenu dans
d'énormes bouteilles que nous observions avec crainte.
C'est dans cette même salle Saint-Pierre (et non à la
Maison des uvres Notre-Dame - aujourd'hui Rex - construite seulement
en 1912) que je vis les premiers films comiques de l'époque
: Toto apprenti, et surtout les
Tribulations de deux Chinois à Paris.
Un mauvais plaisant avait noué ensemble leurs nattes pendant
qu'ils dormaient sur un banc et ils s'étaient livrés
à une course folle à travers la capitale, renversant
les passants, les kiosques à journaux, les étalages
des magasins, les voitures des quatre-saisons, jusqu'à être
- enfin ! - arrêtés par la Tour Eiffel... C'était
si bien parti qu'on croyait qu'elle allait y passer elle aussi...
Le public riait aux larmes.
Voici, à titre de curiosité, le programme d'une de ces
séances, en date du 9 octobre 1910 :
Première partie
1 - La Valse à la mode (scène burlesque)
2 - Pèlerinage à Jérusalem
3 - Vengeance indienne (drame)
4 - Au pays de l'or (grande féerie en couleurs)
5 - Le sommier (comédie)
Deuxième partie
6 - Le port de Gênes
7 - On ferme à 5 heures, ou les mésaventures d'un petit
Parisien
8 - Un talent méconnu (scène comique)
9 - La fabrication du champagne (industrie)
10 - Haine d'esclave (drame)
Troisième partie
11 - Déménagement artistique (comique)
12 - Voyage en Chine. Visite de la ville d'Hang-Chou-Fu
13 - Le gendarme a bon il (scène comique)
14 - Le chien justicier (drame réaliste)
15 - Chez nos alliés les Touaregs
16 - La journée des dupes
Si l'on compte bien, cela fait seize films pour... 25 centimes, à
l'époque : cinq sous !
Je devais avoir six ans lorsque je vis le premier cinéma ambulant
s'installer Place Eugène-Baune, devant mon école. Son
propriétaire était Kobelkopf, l'homme tronc. Il était
actionné par une machine à vapeur toute blanche, véritable
bijou dans son écrin. L'école nous y mena. Je n'avais
encore jamais rien vu d'aussi beau. Je me souviens, comme si c'était
hier, d'un film sur la vie de Jésus commençant par l'Annonciation
: la Vierge était agenouillée à côté
d'un grand lis, l'Archange Gabriel s'avançait vers elle à
petits pas dans une lumière de rêve. Je me sentais tout
émue. De retour en classe, on nous fit écrire nos impressions
: ce fut certainement ma première composition française
; j'aurais dû la conserver.
Chaque année, pour la Saint-Aubrin, arrivait le cinéma
Royal-Bio. C'était une modeste
baraque bâchée dans laquelle le public prenait place
sur d'inconfortables banquettes disposées en plan incliné.
Tous les soirs, il y avait foule.
Une fois la fête passée, alors que les autres forains
démontaient leurs manèges, Royal-Bio s'attardait dans
notre sous-préfecture, ceci à la grande joie des habitants.
Ce séjour se prolongeait de deux à trois semaines. Au
crépuscule, la sirène de sa machine à vapeur
retentissait annonçant la représentation. Nous répondions
souvent à son appel. Nous aimions ses films où le comique
se mêlait au tragique : beaucoup de scènes burlesques,
de disputes, de scènes de ménage dans lesquelles, après
avoir cassé toute la vaisselle et esquinté le mobilier,
les protagonistes s'en prenaient invariablement à la suspension
de la salle à manger qui s'effondrait en entraînant le
plafond dans sa chute... des courses éperdues par monts et
par vaux : Gribouille a volé un tapis,
Dix femmes pour un mari, etc.
Plus cela allait vite, plus on riait.
Et puis, Royal-Bio était un cinéma...
parlant. Bien sûr, les films s'accompagnaient de légendes
que toute l'assistance lisait en chur, mais il y avait aussi
un employé de l'établissement (M. Bessmer) qui n'avait
pas son pareil pour les commenter. Il y mettait une intensité
propre à faire passer le frisson dans le public. Il avait aussi
la manie d'annoncer l'événement qui allait se produire
par une phrase rituelle : "Et à
seule fin
", ce qui donnait, par exemple :
Et à seule fin de ne pas se mouiller,
Gribouille se jette à l'eau.
Et à seule fin de sauver son enfant, la mère se précipite
au devant du fauve, etc.
Parfois on mettait en marche le phonographe pour accompagner les scènes
illustrant les chansons à la mode. Toute la salle chantait
avec lui :
Caroline, Caroline, mets tes petits souliers
vernis,
Ta robe blanche des dimanches et ton beau chapeau fleuri
C'est la valse brune, les chevaliers de la lune...
Viens Poupoule, viens Poupoule, viens etc.
Surpris à Montbrison par la guerre, Royal-Bio devait y demeurer
immobilisé pendant plusieurs années ce qui nous valut
de voir les grands films à épisodes du temps : Fantomas,
Les Mystères de New-York,
Judex... C'est aussi en pleine
guerre de 14 que s'ouvrit la première salle de cinéma
de la ville l'Astrée, avec, comme
film inaugural : La Flambée.
(Marguerite Fournier,
Montbrison au début du siècle, souvenir d'enfance,
Village de Forez,
n° 19, juillet 1984)
*
* *
Album
*
* *
Le nouveau Rex (cliché J. Barou, 27 novembre 2016)
*
* *
La
"réclame"
des cinémas de Montbrison
En avril 1916 une salle
Le
Royal-Cinéma
est ouverte rue du faubourg Saint-Jean
(Le
Montbrisonnais, avril 1916)
Le
Cinéma des familles
(1920-1938)
1928
Avant
la guerre de 1914-1918,
chaque année à l'occasion de la fête patronale,
un petit cinéma ambulant,
le Royal-Bio s'installe sur la place Grenette
avec une vaste baraque de toile et de bois.
La déclaration de guerre arrive
alors qu'il est à Montbrison.
Il reste donc sur place.
La
baraque du Royal-Bio en cours d'installation place Grenette
En
1921 le Royal-Bio devient le Royal
et s'installe dans la chapelle des Pénitents
1938
: le Cinéma
des Familles devient le Lux
on y fait aussi
du théâtre
juillet
1941
novembre
1941
mars
1943
juin
1948
*
* *
L'Astrée
fournit
depuis 1917
un copieux programme
janvier 1930 :
premier film sonore...
Le
cinéma Astrée est
devenu l'Astrée-Parlant
février
1937
avril
1937
octobre
1937
janvier
1938
février
1938
octobre
1938
décembre
1938
février
1939
février
1939
avril
1939
1939
: les menaces se précisent, les actualités
annoncent l'Anchluss...
mai
1939
(documentation : archives de
la Diana)
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