Patois vivant

Couzan


Couzan, Mario Guichard, extrait de l'ouvrage de Guy Chastel,
Couzan
, imp. Dumas, Saint-Etienne, 1935

poème de Valérie Laurent

 

Couzan
poème de Valérie Laurent
(patois du canton de Saint-Georges-en-Couzan)


lu par l'auteur au cours d'une veillée patois en 1977
au Centre social de Montbrison, rue des Clercs

pour écouter cliquer ci-dessous

(3 min 23 s)

Ancienne citadelle
bâtie sur un nid d'aigle
appuyée sur la roche
au flanc de la montagne
sur des côtes aussi vieilles que le monde est monde
sauvage et imprenable
au-dessus du Lignon
Couzan
tu as fait la loi
mis plus d'un obstacle
défendu la montagne
et surveillé la plaine
tenu tête aux voisins
aux barons, à l'Anglais
le comte de Forez
ne s'y frottait pas.

Tu gardes tes secrets
tes vieilles légendes.
Sur tes remparts rôdent combien d'ombres étranges.
Les sentiers sont les mêmes qu'au temps des chevaux.
Le même lierre y pousse
et les mêmes genêts.
Le vent quand il y passe
se fâche et se tourmente.
le chat-huant y loge
Et chaque nuit y chante
à son tour d'être maître
Par-dessus la barbacane.

C'était avant les Croisades
et avant Charlemagne.
Le Sarrazin barbare ravageait la plaine
sans pitié sans merci
Poursuivait l'habitant
Brûlait les villages et massacrant.
La population proche s'abritait au château.
Un grand nombre avait fuit à Chalmazel.
Montverdun était pris.
Les hordes s'avançaient
mais il y avait
Couzan
Couzan qui résistait
.

Au nord le pont-levis
de l'autre côté des ravins
trois remparts, quatre tours
et d'épaisses courtines
un puits intarissable
des réserves de grain
plusieurs centaines d'hommes, de femmes et d'enfants
tenaces dans l'épreuve
du courage à revendre
décidés à tenir jusqu'au bout
pour défendre le pays, les château, nos terres
et puis nos vies
au four et au moulin
à la tour, au créneau
à chacun sa ration, à chacun sa place.

Les Maures ennemis s'installent sur les pentes.
Les vignes n'étant plus travaillées ni les terres
ils vivaient de rapines, de pillage et de chasse.
Cela dura le printemps
cela dura tout l'été.
Les soldats trouvaient que le temps était long
l'hiver avançait, l'hiver s'annonçait
et Couzan tenait bon.

Mais venait l'inquiétude aussi dans son camp.
Plus guère de farine, de bétail ni de glands
Faudra-t-il devoir s'incliner et se rendre
tout livrer, tout laisser
que la mort à attendre ?
Il oublie sa faim le fier seigneur Renaud
prend la dernière tourte
monte au plus haut créneau
ne se résigne pas à la desespérance
de voir son horizon lui redonne confiance.
en bas, dames et pages
chevaliers et manants
prient la bonne Vierge
d'éloigner le brigand.

Tout à coup l'oliphant sonne
sonne et résonne.
L'Arabe tend l'oreille.
Qu'est-ce donc qui résonne ?
Il pense à une attaque
et cherche un abri proche
sans doute un renfort
qui va nous prendre en traitre.
Mais qu'est-ce que qui descend ?
Et qui saute ? Qu'est-ce que c'est ?
Une tourte de pain
bien levé et tout frais !
Nous qui vivons d'écorces, de feuilles et de racines
mal nourris, mal soignés
guettés par la vermine
nous n'en viendrons pas à bout
de ce maudit château
nous crèverons avant.
Il faut décamper
que nous rapporteraient ces ravins du diable ?
Le sort est contre nous
Couzan est imprenable.

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mise à jour le 18 janvier 2010