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Bergère
dessin du docteur Noëlas

Bibliographie

Joseph Barou,
Aspects de la vie sociale
sous l'Ancien Régime,
les femmes séduites
et abandonnées
dans le Montbrisonnais
au 18e siècle,

La Diana, 2000, Montbrison.

En ligne :

Femmes séduites
et abandonnées en Forez

d'après les déclarations
de grossesse.
(format pdf, 40 pages)

Voir aussi le site :

forez.enfantstrouves.free.fr

 

 

 

 

 

 

Conception
David Barou
textes et documentation
Joseph Barou


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Le château de Vaugirard, Champdieu

(carte postale ancienne)

En 1740, à Champdieu :

Marie et Michel
au château de Vaugirard

Marie et Michel vivent au château de Vaugirard, à Champdieu. Mais ils sont plus souvent dans les communs que dans la salle du Carrousel. Cela se passe, il y a 267 ans, au temps du roi Louis XV, celui qu'on nomme encore le Bien-Aimé.

Marie est la fille d'Antoine Saignes, un journalier de la paroisse de Jas. Elle a été engagée aux fêtes de Noël 1739 comme servante au château. Michel Coret, lui, est natif de Magneux-Haute-Rive. Il est valet à Vaugirard depuis Pâques 1740.

De plus en plus ému d'amour

Voilà que les deux jeunes gens se plaisent. Ils se promettent mariage dès que ce sera possible. En attendant, ils font Pâques avant les Rameaux… Quelques mois passent. Marie Saignes est enceinte. Mais Michel tombe malade. Assez malade pour qu'il fasse, le 5 décembre 1740, une déclaration en forme de testament devant le notaire Flachères appelé à Vaugirard.

Michel déclare qu'il a de " l'amitié " pour Marie Saignes, qu'il a été fort assidu auprès d'elle, se sentant de plus en plus ému d'amour . Il lui a toujours verbalement promis de l'épouser en vrai et loyal mariage et d'observer toutes les cérémonies en tel cas requises. Et c'est dans ces vues que Marie Saignes s'est laissé aller et lui a accordé ses faveurs... Mots étonnants ! Très rares sont alors les actes où figure le mot amour. Les choses sont donc bien claires. Michel Coret ne fuit pas ses responsabilités comme cela arrive souvent. D'ailleurs, par testament, il laisse tout ce qu'il possède à sa promise. Et le notaire écrit :

Au cas que ledit Coret vienne à décéder de cette maladie... il veut et entend que si tôt après son décès, il soit délivré à ladite Marie Saignes tant pour fournir aux frais de ses couches que pour aider à la nourriture et entretien de l'enfant qu'elle porte… tout son avoir. Mais c'est un legs bien modeste.

Un pauvre héritage

Il s'agit, tout d'abord, d'une somme de 60 livres qui lui est due par un certain Antoine Barnier habitant au bourg de Mornand. Puis de seize boisseaux de pois, de la variété Calabre, et encore de cinquante poignées de chanvre non teillé conservées au château. Ce sont des récoltes qu'il a faites lui-même sur un petit lopin de terre concédé par le maître et qu'il cultivait pour son compte en plus de son travail de valet.

Constatons la pauvreté de Michel Coret qui n'a pour tout bien qu'une créance, un peu de chanvre et quelques mesures de légumes secs. Le seigneur du lieu, Pierre Girard de Vaugirard, écuyer, est présent. Il signe tout bonnement comme témoin ainsi que Pierre Perrin, un maître pharmacien de Montbrison.

Onze jours plus tard, le 16 décembre, maître Flachères revient au château. Pour obéir aux édits royaux, la future mère doit faire une déclaration de grossesse comme toute femme enceinte non mariée ou veuve. Cette formalité imposée par Henri II depuis 1556 a pour but de lutter contre les infanticides et les abandons d'enfants. Marie Saignes confirme point par point les dires de Michel. Le notaire note à nouveau que ledit Michel Coret aurait été fort assidu auprès de ladite comparante et l'aurait sollicité de lui accorder ses dernières faveurs sous les promesses qu'il lui faisait verbalement de l'épouser...

Michel Coret se rétablit-il ? Put-il épouser, tout à fait officiellement, Marie ? Que devint la servante et son enfant ? Malheureusement nous ne savons rien de plus que cette émouvante tranche de vie. C'était il y a si longtemps…

Joseph Barou

[La Gazette du 14 septembre 2007]

Vaugirard
(cliché J. Barou, 20-02-2011)