Lé
trufe
Tché nou ère le poyi de lé trufe, vegnon
bian. Tu le mondu n'in cuye. Mon père oye l'obitudo
de faire sé prumëré trufe dyin le dzordye,
le centiémou dzour de lo sëzu, ôtour de
lo semano sintye. Ere le z'obourive, lé rate qu'èron
bian boune o lo pêlo. Fouye otindre plu tar po mè
n'in planta. Fojan de bluye, bian boune ôche, de "fin
de siècle", de "fleur de péché"
po lou coyou.
Donc, plantèvan koké trufe dyin le dzordye
po le mondu de lo mësu, ma fojan churtu lé trufe
po lé tare, kokou tin opré. Djin le tin suyon
lé faire o l'orère, porë, in comblan
lo trufo dyin lo reye. Opré se fojon o lo tsoruo.
Kan no ri ère fètye, nan z'orétève
le bétya, vun foje lou portyu ô le pilö
pointyu dyin le vorso, in'otru djetève lo trufe dyin
le portyu è l'ocossève de taro ô le
piè.
Kan lé trufe sourtyon, qu'èron grussete, lé
fouye piôtsa ô lo piötche plato lé
buta tan pouo. Che le tin ocourdève prefitèvon
vitu è flurion bian. Y tutsèvan plu. Ma venè
in mouman que lé fougué treta po lo molodye
è po tyua lou dorifore.
O l'in doré kan lou trufié couminsèvon
de fona, fouye sondza o le z'orantsa. Y oye dji de mochene
o de kö mouman, oyan ma lo piötche o katre bè
po kö trové. Ere fran pegneblu, churetu ch'ère
dyu ou mouillo. Menèvan douë ri o lo vë,
overèvan lou trufié, lou secouyan, è
pé djetèvan d'un la lé trufe, è
de l'otru la lou trufié. Tsa kouo pikèvan
lo mouo dyin lo mère tuto purio. Ere pa bian ogreyable.
Ta zin tin se fouye reprindre, se redrissa o coso dô
crupignu que foje ma. Le devé së soye bou de
s'oréta.
Lé trufe no vë orantzè échugnèvon
chu lo ri. Che fouye sule le z'omossèvan in'uro ou
douë opré ovec in ponié.
Kan t'ère ple le versèvan dyin no bouodje.
Fojan de boudzè de chinkanto kilo guère mè.
Tsa mouman vorsèvan ma le ponié dyin le tomborè
qu'opétève. In le vouédan lo taro otsobève
de tomba. Omossa lé trufe ère be pegneblu
mè : lo sézu ère ovansa, lou dzour
cour, ô pluyunève suvin ou y'oye de brouillar.
Etye mè, nan demourève lé tsambe écortè,
le tyu in l'ér, nan z'oye l'étcheno koke pouo
dulinto.
Kan le tomborè ère ple ou k'oyan otsobo notron
moursé, olèvan ya po immena lo recôrdo.
Retyôlèvan le tomborè dovan le portyu
de lo cavo, sourtyan le doré dö tsar è
le botyolèvan po le portyu. Dô tin kokun ère
vé lo cavo po figourna lo dessinto è otéra
lé trufe ô boun'indrë.
Kan lo cova de trufe ère o l'obri èran bian
contin. Oyan dyu incruso lé trufe koké vë
: lé vorsèvan dyin in cré qu'ocossèvan
bian ô de taro è de fôdzëre. Ma
se consorvèvon plu z'ou moin bian.
Opré, y oye ma plu lou trufié o déborossa.
Lou lessèvan échugna ce que fouye. E in dzour
n'in fojan de pityi ta è lou foutyan le fuo. Ekin
fumève, pore mondu ! lou revouyon d'oro è
de fuma fojon plura le ju. Ekin fumève de tou lou
la dyin lé tare dö quortié. Le mondu
se dégonèvon ovan que l'uvar venëze è
qu'odyuzëze lo frë.
E coumo kle z'uvar èron lon è dyu, fouye se
méfia de pa léssa dzola lé trufe vé
lo cavo. Boutsèvan lou fenétrou ô de
foumouré è lé ficle su lé pôrte
ô de bouodze. No trufo dzola voye re plu è
gatève tute le z'otre. Ô prïntin fouye
lè churveya è le z'écréssuna,
tsa couo plujuré vë. ere pa tudzour éjo
de lé consorva.
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Les
pommes de terre
Chez
nous c'était le pays des pommes de terre, elles poussaient
bien. Tout le monde en récoltait. Mon père avait
l'habitude de planter ses premières pommes de terre
dans le jardin, le centième jour de l'année,
autour de la semaine sainte. C'étaient les précoces,
les rates qui étaient bien bonnes à la poêle.
Il fallait attendre plus tard pour en planter d'autres. Nous
plantions des bleues, bien bonnes aussi, des "fin de
siècle", des "fleurs de pêcher"
pour les cochons.
Donc, nous plantions quelques pommes de terre dans le jardin
pour les gens de la maison, mais nous les plantions surtout
dans les terres quelque temps après. Jadis ils avaient
l'habitude de les planter à l'araire, paraît-il,
en recouvrant la pomme de terre dans le sillon. Plus tard
elles se plantaient à la charrue. Quand un sillon était
fait, on arrêtait les bêtes, l'un faisait les
trous avec le pilon pointu, dans la terre renversée,
un autre jetait la pomme de terre dans le trou et le recouvrait
de terre avec le pied.
Quand les pommes de terre sortaient, que la tige était
un peu grosse, il fallait les piocher à la pioche plate
et les buter un peu. Si le temps était favorable elles
poussaient vite et fleurissaient bien. Nous n'y touchions
plus. Mais il est venu un moment où il a fallu les
traiter pour la maladie et pour tuer les doryphores.
En automne quand les tiges commençaient à flétrir,
il fallait penser à les arracher. Il n'y avait pas
de machine à ce moment, nous n'avions que la pioche
à quatre becs pour ce travail. C'était très
pénible, surtout si c'était sec ou mouillé.
Nous menions deux rangées à la fois, nous arrachions
les fanes, nous les secouions, et nous jetions d'un côté
les pommes de terre et de l'autre les fanes. Parfois nous
piquions la main dans la "mère" toute pourrie.
Ce n'était pas très agréable. De temps
en temps il fallait "se reprendre", se redresser
à cause du dos qui nous faisait mal. Le soir nous étions
contents de nous arrêter.
Les pommes de terre, une fois arrachées, séchaient
sur le sillon. S'il faisait soleil nous les ramassions une
heure ou deux après, avec un panier.
Quand
il était plein nous le versions dans un sac. Nous faisions
des sacs de 50 kilos, guère plus. Parfois nous ne versions
que le panier dans le tombereau qui attendait. En le vidant
la terre achevait de tomber. Ramasser les pommes de terre
était pénible aussi : la saison était
avancée, les jours courts, il "pleuvinait"
souvent ou il y avait du brouillard. Là aussi, nous
restions les jambes écartées, le derrière
en l'air, nous avions le dos quelque peu douloureux.
Quand le tombereau était plein ou que nous avions achevé
notre morceau, nous allions atteler pour emmener la récolte.
Nous reculions le tombereau devant le trou de la cave, nous
enlevions la porte arrière du char et nous le basculions
sur le trou. Pendant ce temps quelqu'un était à
la cave pour remuer la descente et ranger les pommes de terre
au bon endroit.
Quand la "cavée" des pommes de terre était
à l'abri, nous étions bien contents. Il nous
était arrivé parfois d'enterrer les pommes de
terre. Nous les versions dans un silo que nous recouvrions
bien de terre et de fougères. Mais elles se conservaient
plus ou moins bien.
Ensuite, il ne restait plus que les fanes à débarrasser.
Nous les laissions sécher le temps qu'il fallait. Et
un jour nous faisions des petits tas et nous leur mettions
le feu. Ca fumait, pauvres gens ! Les retours de vent et de
fumée nous faisaient pleurer les yeux. Ca fumait de
tous les côtés dans les terres du quartier. Les
gens se dépêchaient avant que l'hiver ne vienne
et qu'il n'amène le froid.
Et comme ces hivers étaient long et durs, il fallait
se méfier de ne pas laisser geler les pommes de terre
à la cave. Nous bouchions les vasistas avec du fumier
et les interstices sous les portes avec des sacs. Une pomme
de terre gelée ne valait plus rien et gâtait
les autres. Au printemps, il fallait les surveiller et les
dégermer, parfois à plusieurs reprises. Ce n'était
pas toujours facile de les conserver.
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