Lé
fenérozou
Kan lo Sin Dzouan orivève sondzèvan o fenéra.
Che le tin ocourdève n'oyan po quatre semane. Tsa
couo lé fouille léssa, che lé messou
pressèvon.
Olèvan kar lou ratio, lé fourtse, lé
daille, le dê , che vouyé ; se compose dô
fôché in boué ovec sé doué
monete, virè in arè de préferanche.
Le bou dô fôché è toillo po tegni
le tolu de la lamo, ovec no môrlo è in coin
de boué ! Ma ovan de fixa lo lamo, fo couminsa po
lo batre chu le pitye t'inclun, ovec le mortè, o
tyu pla chu no bouodge. Kö trovè è pa
bian éjo : fouille bian vëre clar è étre
odrë. Me, èro pa de lou mi odrë po ékin.
Ôro vetyo lou seyère portye, louro daille chu
l'épalo, avec lo pèraguje dyin le couve ô
no ficelo ô doré. Tsake seyère menève
se n'andïn. Tsa mouman s'arétève po ogusa
lo daille in l'opuran chu le dzognu. Ô dunève
de pityi couo de përo in remontan le lon de lo lame,
in se méfian de pa se coupa in de. Che l'arbo olève
bian, pa trouo échutye, pa trouo vorsa, che le torin
ère pa trouo tourminto ou o lo pindouole, lo veya
olève. Fouille faire otinchon o lou dorbougné,
o lé përe, o lou bia... Kö trovè
ère intyé pegnublu, foje transpira. De ta
z'intin olèvan biöre no goula ou douë de
vin d'ègo è de cafë qu'ékondyan
dö sule in bitan lo tchupino dyin in bia su no gropa
d'arbo. Kö mélandzu désiève bian.
No vë le prouo seyo, mankève ma de dézandogna
o lo fourtche. Lé fene è lou petyi zö
fojon. Kan le sule oye tsôfo olèvon vira le
fe, ô d'un ratè de boué.
Le devéssë olèvon cutsa. Le fe pôrie
mua de në, ékin l'ovansorie. Le lindemouo de
boun'uro olèvan décutsa, è ovan mëdye,
che tsôfève fôr tournèvan viro
notron fe.
O le vépru pouyan faire no pityeto prognëre.
Ma tsa kouo otindyan in couo de petar ! Tunève, fouille
vitu ola cutsa ou tsordza le fe. Che y'oye dji d'ôradzu
olèvan tsordza vè lé quatr'ure.
Fouye couminsa po raléra le fe, faire douë roule
in léssan ô métan le passadsu dö
tsar. Dôtin in'ouomou olève ya è odyuje
le tsar. sourtyan lo partche è lé bille et
couminsèvan lo tsora. Gn'oye vun que dunève
lé fourtzè, l'otru que foje lo tsora. Kan
le z'épolantse èran gornië, fouye bian
écovorta è tossa le fe, dupè lo roulo
de dovan vé l'étsoleto, djuko éklo
de doré vé lou po. Otromin lo tsora s'ébouyorie
in filan ô lou segrouo. Dö tin lé fene
è lou petyi fojon chör in ratelan.
Kan lo derëre fourtsa ère boya, fojon possa
lo partche o ékö qu'oye fai lo tsora, lo pikève
dyin l'étsoleto, lo robotye et djetève lo
côrdo doré lou po. In'otru l'oropève
lo foje prindre dyin le tour è billève lo
tsora tan fôr que pouye. Dô tin kokun rapignève
ô d'un ratè de lou dou la po dji padre de fe
in ruto.
Ekö qu'oye fai lo tsora devolève in s'écoulantsan
le lon dö tsar de fe, sin se détôrse in
piè in orivan o taro, che poucheblu.
Manquève ma d'immena le tsar vé lo grandje
ô lé vatse. Le z'oyan pa détyalo, n'oyon
l'obitudo. Boudzèvon pa malgrë lou tovan que
lou fojon lo garo. Le z'intrè de grandje éron
pa bian éjo. Yoye de virè courte, fouye pa
imponuya le z'intsan.
No vë le tsar chu le si de grandje demourève
le plu pegnuble : dètsorsa lo tsora. Ere pa éjo,
churetu vé le fye de lé fenérozou,
kan fouye poussa è tossa le fe djuk'ô puntye
sin se faire peta lo této chu lé pièce.
Etye mè oropèvan no bouno choua avec lé
grane de fe que nou forion démindza tuto lo në.
E pé devolèvan in nou fozan ékoulantsa
djuko chu le si de grandje.
Tsa couo fouye se dépotsa po la kar n'otro tsora
ou douë. Che le tin menocève oyan pa la tin
de goutoruna. Na z'ère tudzour in présso.
Ôche, nan z'otsobève le dzour fran recreyu.
Ke vouyé ti ? Ere coum'ékin... Yoye pa otro
veya o faire.
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Les
fenaisons
Quand la Saint-Jean arrivait, nous pensions à faner.
Si le temps accordait nous en avions pour quatre semaines.
Parfois il fallait les laisser, si les moissons pressaient.
Nous allions chercher les râteaux, les fourches, les
faux. La faux se compose d'un manche en bois avec deux manettes,
tournées en arrière de préférence.
Le bout de cette pièce est taillé pour tenir
le talon de la lame, avec un anneau et un coin en bois. Mais
avant de fixer la lame, il faut commencer par la battre sur
la petite enclume avec le marteau, assis par terre sur un
sac. Ce travail n'est pas bien facile. Il fallait bien voir
clair et être adroit. Moi, je n'étais pas des
plus adroits pour ça.
Maintenant voilà les faucheurs partis, leur faux sur
l'épaule, avec la pierre à aiguiser dans le
coffin avec une ficelle dans le dos. Chaque faucheur mène
son andain. Certains moments il s'arrêtait pour aiguiser
sa faux en l'appuyant sur les genoux. Il donnait de petits
coups de pierre en remontant le long de la lame, en se méfiant
de ne pas se couper un doigt. Si l'herbe allait bien, pas
trop sèche, pas trop couchée, si le terrain
n'était pas trop tourmenté ni en pente raide,
ça allait. Il fallait faire attention aux taupinières,
aux pierres et aux biefs. Ce travail était encore pénible,
il faisait transpirer. De temps en temps nous allions boire
une gorgée ou deux de vin, d'eau et de café
qu'on protégeait du soleil en cachant la chopine dans
un bief sous une poignée d'herbe. Ce mélange
désaltérait bien.
Une fois le pré fauché, il ne restait plus qu'à
défaire les andains à la fourche. Les femmes
et les enfants le faisaient. Quand le soleil avait chauffé,
ils allaient tourner le foin avec un râteau en bois.
Le soir ils allaient "cucher" (mettre en tas). Le
foin pourrait "muer" pendant la nuit, ça
l'avancerait. Le lendemain de bonne heure nous allions "décucher",
et, avant midi, si ça chauffait fort, nous tournions
notre foin une nouvelle fois.
Après midi nous pouvions faire une petite sieste. Mais
parfois nous entendions un coup de pétard. Il tonnait,
il fallait vite aller "cucher" ou charger le foin.
S'il n'y avait pas d'orage, nous allions charger vers les
quatre heures.
Il fallait commencer par rouler le foin, faire deux "roules"
en laissant au milieu le passage du char. Pendant ce temps
un homme allait lier (les vaches) et amenait le char. Nous
sortions la "perche" et les "billes" et
commencions le chargement. Il y en avait un qui donnait les
fourchées, l'autre qui faisait le chargement. Quand
les grandes ridelles étaient garnies, il fallait bien
écarter et tasser le foin depuis la brassée
roulée devant près de l'échelette jusqu'à
celle de derrière vers l'autre échelle. Sinon
le chargement s'effondrerait en partant avec les cahots. Pendant
ce temps les femmes et les enfants faisaient suivre avec le
râteau.
Quand la dernière fourchée était donnée,
on faisait passer la perche à celui qui avait fait
le chargement. Il la piquait dans l'échelle de devant,
la rabattait et jetait la corde derrière le char. Un
autre la saisissait, la faisait prendre dans le tour et billait
le chargement aussi fort qu'il le pouvait. Pendant ce temps
quelqu'un "peignait" avec un râteau, des deux
côtés pour ne pas perdre de foin en route.
Celui qui avait fait la "charrée" descendait
en se laissant glisser le long du char de foin, sans se tordre
un pied en arrivant à terre, si possible.
Il ne restait plus qu'à conduire le char à la
grange avec les vaches. On ne les avait pas dételées,
elles en avaient l'habitude. Elles ne bougeaient pas malgré
les taons qui leur faisaient la guerre. Les entrées
de grange n'étaient pas très faciles. Il y avait
des virages courts, il ne fallait pas accrocher les angles.
Une fois le char sur l'aire de la grange, restait le plus
dur : décharger la charrée. Ce n'était
pas facile surtout vers la fin des fenaisons, quand il fallait
pousser et tasser le foin jusqu'au faîtage sans se cogner
la tête aux poutres. Là aussi nous prenions une
bonne suée, avec les graines de foin qui nous démangeraient
toute la nuit. Et puis nous descendions en nous faisant glisser
jusqu'à l'aire de la grange.
Parfois il fallait se dépêcher pour aller chercher
une autre charrée ou deux. Si le temps menaçait
nous n'avions pas le temps de goûter. On était
toujours pressé. Aussi nous achevions la journée
bien fatigués. Que voulez-vous ? C'était comme
ça... Il n'y avait pas autre chose à faire.
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