|
|
textes
et documentation : Joseph Barou
questions,
remarques ou suggestions :
s'adresser :
|
|
|
|
Chapelle de Bonson
(dessin de Roger Faure)
Bonson
PÈLERINAGE
A LA VÉNÉRÉE MADONE DU FOREZ
par Marie Grange
Petite cité neuve au carrefour
des routes de Saint-Marcellin, Saint-Just-Saint-Rambert, Andrézieux,
Sury-le-Comtal, Bonson étale ses quartiers neufs, ses villas,
ses lotissements et le centre commercial autour de la gare de la ligne
Saint-Etienne-Clermont-Ferrand. La mairie toute neuve, les nombreuses
associations, tout rayonne la vie. L'église moderne dédiée
à Sainte-Thérèse-de-l'Enfant-Jésus dessert
cette agglomération aux visages multiples. Elle porte encore
les traces du bombardement du 18 juin 1940 où les avions de
chasse italiens semèrent la mort dans le village. Soixante-six
personnes furent tuées par les rafales de balles et les bombes.
Le Bonson est aussi le nom de la fraîche et capricieuse rivière
qui descend en cascades de Saint-Bonnet-le-Château. Vous pourrez
y pêcher la truite. Le Bonson porte ses eaux à la Loire,
sur la rive gauche, dans la commune de Saint-Cyprien.
Bonson, c'est Bonczons en 1224,
parrochia Bonczonis ou Bonisonis,
Ecclezia de Bonczo en 1225, Parrochia
Béate Marie de Bonczonis en 1261, Notre
Dame de Bonson en 1606 et en 1672 paroisse
de Notre-Dame de Bonson (registre de Saint-Cyprien). Voilà
donc le nom de l'église de la paroisse du village.
Autrefois la paroisse de Bonson - une quinzaine de maisons d'agriculteurs,
deux propriétés bourgeoises - avait son église
où se trouve la chapelle dédiée à Notre-Dame.
Si vous désirez connaître cet endroit, c'est tout près
des rives du Bonson, proche de Saint-Cyprien et du pont du diable
sur la rivière que vous la trouverez. Cachée dans les
arbres, entourée de grands bâtiments de ferme et proche
d'une propriété d'industriels... au bout d'un chemin
herbeux... tout d'un coup vous verrez surgir cette chapelle !
Rénovée depuis peu, surmontée d'un délicieux
campanile, elle offre aux visiteurs la pureté de son architecture
du Xle siècle. Ici tout est silence et paix. Seuls les oiseaux
et les abeilles se font entendre. Le doux vol d'un pigeon qui vient
se percher sur le clocheton anime cette oasis de verdure. Entrez.
La porte est toujours ouverte. Vous descendez deux degrés de
pierre et vous êtes dans la pénombre fraîche de
l'oratoire de la Bonne Mère des Foréziens.
Un jeune berger faisant
paître son troupeau sur les bords du Bonson s'amusait avec son
chien à l'ombre d'un gros arbre touffu dont le tronc avait été
meurtri profondément par la foudre. Le regard de l'enfant fut
attiré par un objet insolite gisant dans le creux de l'arbre,
derrière des ronces et des herbes. Il écarta les tiges
avec son bâton et vit une statuette en bois noir posée
là. Vite il courut au hameau et quelques personnes l'accompagnèrent
pour voir la trouvaille. Avec précaution ils saisirent l'objet
et reconnurent une vierge à l'enfant, sculptée dans un
bois dur. Dans le socle, une petite cavité fermée par
une vitre contenait un morceau de tissu. On emporta religieusement la
statue au hameau en récitant le chapelet.
Le lendemain, surprise ! plus de vierge. Fort décontenancés,
les gens du lieu retournèrent vers l'arbre creux. La statuette
était là ! Oh, bonne Mère ! Ils se mirent à
genoux, humblement, étonnés de ce prodige. Avec grande
dévotion, chants et prières, les habitants de Bonson emportèrent
ce mystérieux cadeau. Ils le déposèrent sur un
trône fleuri, dans une maisonnette, à la garde d'une vénérable
grand-mère et de sa petite-fille. Le lendemain matin, une délégation
de fidèles arriva pour prier la Sainte Mère de Dieu...
Plus de statue. Qui aperçurent-ils au bout du sentier arriver
en courant ? Le petit pâtre qui les appelait : 'Venez,
venez, la Sainte Vierge est dans l'arbre !"
Tous les habitants de Bonson comprirent vite que c'était là
le lieu choisi par leur madone pour y rester et y être vénérée.
Ils commencèrent tout de suite à édifier une demeure
digne de la Reine du Ciel. Des villages proches les gens accoururent
aux accents des cantiques. La nouvelle se propageant, toute une foule
vint vénérer la mère de Dieu sous un des ses vocables
les plus répandus : "Secours des Chrétiens, Consolatrice
des Affligés".
Et de jour en jour, de siècle en siècle, aujourd'hui comme
hier, la petite Vierge à l'Enfant attire des pèlerins.
Si vous allez à Bonson, vous verrez le défilé,
presque ininterrompu des familles, des jeunes, des couples, des anciens
au rendez-vous de la Madone du Forez. Les ex-voto naïfs qui recouvrent
les murs, témoignent de la confiante fidélité des
Foréziens. Tout le mois de mai et surtout le huit septembre,
l'affluence y est importante et continue.
Mais ne cherchez pas aux alentours une boutique de souvenirs, ou un
bar pour vous désaltérer. Mais à la ferme proche
on peut acheter des cierges. Pour vous rafraîchir, les eaux limpides
du Bonson feront bien l'affaire.
LA CHAPELLE DE NOTRE-DAME DE BONSON
L'édifice est
très simple. Il est composé d'une seule nef avec de part
et d'autre trois chapelles latérales et un chevet plus étroit
reconstruit en 1866. La chapelle date de la fin du Xle siècle.
Comme beaucoup d'édifices romans elle se présente sous
la forme la plus simple : un rectangle, une nef voûtée.
A travers les siècles, divers événements historiques
et l'affluence toujours croissante des pèlerins nécessitèrent
des transformations et des agrandissements.
Le mur de droite a été reconstruit aux XVe et XVIe siècles
(le dessin ci-dessous laisse bien apparaître l'agrandissement
du mur de façade). Le mur de gauche est d'origine. Crépis
à la chaux, les murs sont terminés par une simple corniche
de pierre. Le portail d'entrée en plein cintre est très
simple avec des piédroits sans décoration, en cubes de
granit, recouverts par crépissage.
La nef est longue de 12,15 m, large de 6,80 m. Le chur reconstruit
en 1516 formait une abside en cul-de-four ; en 1886 un glissement de
terrain y fit une crevasse jusque dans la voûte. La reconstruction
a été faite en style "renaissance". L'abside
est plus grande de 45 cm pris dans l'épaisseur du mur qui mesurait
presque 2 m.
Sur le sol, une croix tracée en creux sur une dalle de pierre
indique le lieu où reposent les restes de plusieurs anciens curés
de la paroisse.
A gauche, entre le chur et la chapelle de saint Joseph, contre
le pilier, se trouve la châsse où est placée l'antique
statuette dont nous avons évoqué la trouvaille.
La façade de la chapelle est surmontée d'un campanile.
Sa forme triangulaire à rampants est caractéristique de
l'art du roman forézien aux Xle et XIIIe siècles. Les
colonnettes accouplées avec leurs fûts droits à
astragale, leurs chapiteaux à tailloir double, ornés de
têtes de mascaron cornus et à physionomie barbare sont
l'uvre de cette époque.
L'ornementation des chapiteaux avec les aigles aux ailes déployées
montre dans les quatre volutes correspondant aux angles du tailloir
la disposition qui rappelle celle des feuilles d'acanthe des chapiteaux
antiques.
A l'intérieur de la chapelle Renaissance, le visiteur peut découvrir
sur un chapiteau daté de 1565 la présence d'un monstre.
Mi-dragon, mi-salamandre il est tenu par une laisse reliée à
un boulet.
La cloche vient des ateliers Burdin de Lyon. Lorsque les filles désirent
savoir combien de temps doit s'écouler jusqu'à leur mariage,
elles tirent la corde ; le nombre de coups qui va tinter donne le compte
des années qui les séparent de cet événement
!
L'autel qui a disparu pour faire place à un maître-autel
de bois surmonté d'anges adorateurs portait un christ en relief
au milieu d'arcatures gothiques. Un fragment de ce travail est encastré
dans le mur extérieur nord de l'église. Le christ est
appliqué contre le mur qui clôt le jardin de la propriété
voisine.
II est impossible
de dater l'origine du pèlerinage et de la Madone miraculeuse
de Bonson ; on peut penser qu'il est contemporain de l'édification
de la chapelle. Traditionnellement les jeunes épouses se rendaient
à Bonson pour consacrer à la mère de Jésus
l'enfant qu'elles allaient mettre au monde. On déposait aux pieds
de la Madone les petits enfants malades. Les adultes se hâtaient
aussi vers la chapelle pour demander leur guérison. Les cultivateurs
priaient pour obtenir la fertilité des champs et la cessation
des fléaux qui s'abattaient sur les récoltes. Pour la
guérison des malades les pèlerins recherchaient la robe
portée par la statuette. Précieuse et belle, cette robe
de soierie blanche brodée et parée de galons et de franges
dorées était portée au domicile des malades et
des infirmes. Elle leur était appliquée sur le corps.
Beaucoup avaient l'impression qu'une vie nouvelle coulait en eux.
Les ex-voto couvrirent les murs de la petite église. Jusqu'en
1793, tout Forézien, quelle que soit sa condition, venait faire
un pèlerinage à Notre-Dame de Bonson. Des legs pieux vinrent
alimenter les fonds nécessaires à son entretien. Lors
de la Terreur, les Bonsonnais confièrent leur trésor à
Jean Chavagneux qui enferma la précieuse statue dans un coffre
de bois qu'il enfouit au pied d'un arbre dans son champ. La tourmente
passée, la Madone fut retirée de sa cachette et replacée
à l'endroit où on la voit encore aujourd'hui.
LA STATUE DE NOTRE-DAME DE BONSON
C'est dans un morceau
de bois dur et noir, poirier ou tilleul, qu'est sculptée cette
vierge à l'enfant qui mesure 0,29 m de hauteur. Elle est réhaussée
par un socle de bois. La couronne simplement dentelée avec un
bandeau en relief est sculptée, faisant corps avec la statue.
Cette vierge est debout, vêtue d'une robe à encolure carrée
très ajustée au corsage ; elle tombe ensuite en plis pressés
recouvrant complètement les pieds. Elle ne porte pas de voile.
Le manteau retombant un peu sur les épaules la revêt de
ses larges plis ; il enveloppe le bas du corps de l'Enfant Jésus
assis dans la main gauche de sa mère. Les cheveux coiffés
en petites tresses nombreuses tombent sur les épaules en encadrant
le visage de leurs gracieuses ondulations.
La Madone tient dans sa main droite les deux pans relevés de
son manteau pour bien laisser voir le petit reliquaire vitré
où, sur un mince tissu fin et blanc, on peut lire, écrit
à l'encre noire : "du suairt de Nostre-Dame". L'Enfant
Jésus pose, d'un geste affectueux, sa main sur l'épaule
de sa mère, dans sa main gauche il tient un fruit. La tête
de l'enfant - qui a été remplacée - tient sur le
cou par un simple pivot de bois. Le sculpteur bien intentionné
qui a procédé à cette réparation n'était
pas habile. Son ciseau a esquissé à peine des traits frustes
qui donne à l'enfant l'air vieillot.
Le visage de la vierge est assez terne. Les paupières à
demi-baissées donnent une certaine noblesse alliée de
bonté, à l'expression banale de l'uvre ici présente.
A l'origine, la statue devait être peinte. Des fragments de vernis
rosé vif apparaissent sur les joues et du noir dans la chevelure.
Elle est revêtue, dans la châsse, de la précieuse
robe de soierie brodée d'or et de passementerie. Couronnée
de pierreries ainsi que l'Enfant Jésus, Notre-Dame de Bonson
resplendit. Le manteau plus court sur le devant laisse voir le reliquaire.
Ainsi, parée de lumière, elle est présentée
à la dévotion des fidèles. Seule l'éternité
dira le secret de cette petite mystérieuse Vierge à l'Enfant
(1).
(1) Malheureusement cette statuette
a été volée dans la nuit du dimanche au lundi
27 mai 2002.
Nous joignons à cette petite étude sur la chapelle de
Bonson le texte de la prière qui était traditionnellement
récitée à l'occasion du pèlerinage.
PRIERE
à Notre-Dame de Bonson
(XVIe siècle)
L'Etoile du ciel,
qui a nourri de son lait le Christ Nôtre-Seigneur, a détruit
la mort contagieuse implantée par le premier père des
hommes.
Que cette même Etoile daigne donc comprimer ces astres dont l'influence
néfaste allume les guerres si meurtrières pour le peuple.
0 très salutaire Etoile des mers, délivrez-nous de tout
fléau, écoutez-nous, ô notre Souveraine.
Car votre Fils ne vous refuse rien. Il vous honore ; sauvez-nous, ô
Jésus, nous pour qui votre Mère ne cesse de prier.
Priez pour nous Sainte Mère de Dieu. Afin que nous soyons dignes
des promesses de Jésus-Christ.
Oraison
Dieu de miséricorde, Dieu de piété, Dieu d'indulgence,
qui avez toujours compassion de votre peuple affligé, et qui
avez dit à l'ange qui le frappait
de ne plus appesantir sa main sur lui, accordez-nous le secours de votre
grâce, afin que nous soyons délivrés sûrement
et miséricordieusement
de toute épidémie, de la mort subite et de l'invasion
de toute calamité publique, par vous, Seigneur Jésus,
Roi de gloire,
qui vivez et régnez dans tous les siècles.
Ainsi soit-il.
Abbé Charles Signerin. "Notre-Dame
de Bonson et son pèle(rinage", imp. Théolier, Saint-Etienne,
1903.
[Village de Forez, n° 66, avril
1996
]Illustrations
tirées de l'ouvrage de l'abbé Charles Signerin
*
* *
Dessin tiré
de Félix Thiollier, Le Forez pittoresque et monumental
*
* *
Carte postale ancienne
*
* *
(cliché Joseph Barou)
Façade (15 août 2017)
(cliché Joseph Barou)
Intérieur (15 août 2017)
(cliché Joseph Barou)
Notre-Dame de Bonson (15 août 2017)
(cliché Joseph Barou)
Vitrine (15 août 2017)
Retour page
accueil
|
|