Louis
Lépine
en
gouverneur général de l'Algérie
(supplément du Petit Journal du 17 octobre 1897)
1913 : le préfet Lépine
en
campagne
à
Montbrison
Printemps 1913, le petit monde politique
de Montbrison s'agite. Le décès du député-maire
Claude Chialvo entraîne une élection législative.
Les radicaux-socialistes ont le vent en poupe. Le pays montbrisonnais
peut basculer à gauche.
La retraite de
l'infatigable M. Lépine
Et voilà qu'entre en scène un candidat inattendu.
Ce n'est pas n'importe qui ! Louis Lépine
: "l'ami des rois, des princes et
des ministres" disent ses amis. Né le 6 août
1846 à Lyon, il fait son droit puis la guerre de 1870. Devenu
avocat, il quitte vite le barreau pour une brillante carrière
dans l'administration : sous-préfet de Lapalisse,
de Montbrison, de Langres,
de Fontainebleau, préfet de
l'Indre puis secrétaire général
de la préfecture de police de Paris.
En 1891, il est préfet de la Loire
puis le 12 juillet 1893, préfet de
police de Paris jusqu'en 1913 avec une brève interruption,
de 1897 à 1899, où il est gouverneur
général de l'Algérie.
Il donne toute sa mesure comme préfet. Ferme, actif, il paie
de sa personne et acquiert une grande notoriété. Présent
partout, il réglemente la circulation, invente le bâton
blanc, arme les agents de ville du revolver, crée brigades
cyclistes et brigades fluviales... Les groupes anarchistes sont
infiltrés par ses hommes, les manifestations réprimées,
la grève des postiers de 1908 cassée, la "bande
à Bonnot" neutralisée... De plus, il organise
le célèbre "concours"
(1902) destiné à récompenser inventeurs et
artisans.
En 1913, à 67 ans, Lépine prend sa retraite. Une retraite
active. Et Montbrison lui permet d'entrer
en politique. Car il a des attaches foréziennes. Il a épousé
Marie Dulac, une Montbrisonnaise. De
temps à autre il habite son château de Sauvain.
Son principal adversaire est le radical Pierre Robert,
38 ans, avocat et gérant du journal le
Montbrisonnais. La campagne est passionnée. Elle
peut se résumer en deux slogans :
A Lépine, l'Union républicaine. A Robert, la République
sociale.
Une campagne électorale
sans merci
Les radicaux se plaignent de ce que leur candidat est "abreuvé
de calomnies". Les détracteurs de Robert
insinuent en effet qu'il a partie liée avec les révolutionnaires,
suprême accusation dans une région modérée
telle le Forez !
Quant au Montbrisonnais, le
journal de Pierre Robert, il tape
à bras
raccourcis sur Lépine. L'article du 21 juin est un chef-d'uvre
du genre : "Le candidat
Lépine : un programme inexistant, une profession de foi nulle,
un homme ridicule et ignorant... Vraiment les électeurs,
au lieu d'envoyer ce vieil incapable à la Chambre feraient
mieux de l'expédier, avec un carton d'écolier sous
le bras, aux cours du soir d'éducation civique ... et morale
!" Pourtant Lépine est couvert de titres
et de diplômes et membre de l'Institut ! Mais qu'importe.
C'est une campagne électorale.
Le dimanche 29 juin, les citoyens font leur choix. Lépine
obtient 8 136 voix (49,3 %) et Robert
7 935 voix (48,1 %). Lépine,
malgré sa notoriété, n'est pas élu au
premier tour. Ce ballottage est perçu comme un échec.
La lutte sera chaude. Au deuxième tour le 13 juillet 1913,
Lépine est élu de justesse avec 9
118 voix (50,55 %) contre 8 917 voix
(49,45 %) à Robert.
Epilogue
Louis Lépine quitte
bien vite l'appartement qu'il a loué quai
des Eaux-minérales, pour Paris. L'élection
de Montbrison n'a été pour ce grand commis de l'Etat
qu'une brève parenthèse. En 1914 il se présente
dans la Seine, à Sceaux,
où il est battu par une coalition socialiste. La politique
ne lui a pas réussi. Il se tourne vers d'autres activités.
Arrive la Grande Guerre. Lépine est au Comité de Secours
national, devient inspecteur général des prisonniers
de guerre, commissaire aux effectifs.
Il est aussi administrateur de la Compagnie
du canal de Suez, membre de l'Académie
des sciences morales et politiques, du Conseil
supérieur de l'Assistance publique, de la protection
de l'enfance, des Pupilles de la Nation,
du Conseil de l'Ordre de la Légion
d'honneur... L'inlassable M. Lépine meurt, le 9 novembre
1933, à Paris, à 87 ans, sans avoir vraiment pris
de retraite.