Célestin
Masson, de Roche, et une autre personne, de Champdieu, racontent
les feux de joie qui étaient organisés dans les
villages des monts du Forez au moment de Mardi gras avant 1939.
Et alors, nous aussi, c'était les jeunes mariés
qui étaient du hameau, quoi, [qui
avaient les honneurs du feu de joie]. Alors c'était
eux, quoi, qui sautaient. Ils faisaient sauter la mariée.
C'est elle qui allumait le feu, la plus jolie... Alors, comme
vient de dire la camarade, s'il y avait [eu] un décès
dans le hameau, alors, là, le feu de joie n'avait pas
lieu.
Alors
nous, nous étions de Montvadan, mon hameau à moi,
nous allions le faire à la Griotte. On changeait de ferme,
tu laissais... Il y avait quand même un petit feu de joie.
Après le feu de joie, nous, on avait bal ; ça
se terminait tout le temps comme ça, chez nous. Alors,
naturellement, il ne fallait pas partir, comme je viens encore
de dire...
On tournait. Nous, on faisait des "brandes", des brandes
de paille
[des flambeaux],
comme ça, qu'ils faisaient tourner, qui faisaient des
feux d'artifice tout autour du machin
[ le feu de joie]. En principe, s'il y en avait d'autres,
des étrangers au hameau, ils venaient masqués,
déguisés en toutes sortes..., une peau de lapin,
s'il n'avaient pas autre chose sur la figure.
Alors
pour lui faire "choser" [pour
le démasquer],
ils lui faisaient filer la brande de paille sous le nez, pour
lui raser la barbe. Ce n'était jamais trop dangereux
comme ça, mais enfin...
Quand le feu était éteint, ça se passait
dans la première petite salle ; on faisait un petit bal
quoi... pour la jeunesse... même les vieux qui venaient
boire un petit canon...
[la
dame de Champdieu]
Les
jeunes ramassaient des [tiges
de]
topinambours, des brindilles, des fagots, tout ce qu'ils trouvaient.
Quand ils trouvaient un paysan qui voulait donner quelques fagots
de genêts, ils étaient bien contents. Mais c'est
que les paysans, ils les brûlaient, les fagots, ils ne
voulaient pas toujours les donner.
-
Ils ne pouvaient pas les faire
[les fagots],
les jeunes ?
-
Mais les jeunes, ils travaillaient bien un peu mais ils n'avaient
pas bien le temps, vous comprenez ?
Alors
ils faisaient quand même un bon tas. Et alors, le jour
du Mardi gras, ils y mettaient le feu. Et puis alors ils avaient
des pétards, il y en avait... Je me rappelle, une fois,
il y avait un boulanger, de chez moi, à Champdieu, un
boulanger qui aimait bien s'amuser. Alors un jour il dit :
-
Oh ! là, là, attendez, je fais bien en faire
péter.
Vous
savez les pétards, ça se vend par paquet, des
paquets de - je ne sais pas - de dix vingt... Il allume un pétard
en croyant de le détacher. Mais le pétard ne se
détacha pas, il resta dans le paquet. Le paquet péta
tout à la fois ; ça lui arracha tout l'intérieur
de la main. Il y en a un qui dit : Eh oui ! ça a bien
pété !
Eh
oui ! ça a bien pété et lui se dépêcha
de courir sous le robinet pour y mettre la main...