Patois vivant




Marthe Défrade (de Châtelneuf)
au cours d'une veillée Patois Vivant
au Centre social de Montbrison
en avril 2004

 

Semaine sainte

Marthe Défrade

(patois de Châtelneuf)

enregistrée au cours d'une veillée du groupe Patois Vivant dans les années 2000
au Centre social de Montbrison
, 13, place Pasteur


pour écouter cliquer ci-dessous

(3 min 40 s)

La Semaine sainte, dans le temps, il ne fallait pas laver, il ne fallait pas faire la lessive [lo buyè]. Alors il ne fallait pas laver les "linceuls (1)" comme on disait, les draps, les linceuls.
- Pourquoi ? [
interpellation]

Eh ben, il ne fallait pas laver les draps, la Semaine sainte. Et aussi le Jeudi saint, on ne liait pas… Le Jeudi saint on ne liait pas les vaches, on ne liait pas les bœufs. Le Jeudi saint l'après-midi et le Vendredi saint le matin, on ne liait pas… on ne liait pas les bœufs ici. Maintenant, après, il y a les tracteurs, après… On n'a pas regardé…
- Eh ! qu'est-ce vous mangiez, le Vendredi saint ? [
interpellation d'André Guillot]

Ah, bon ! Le Vendredi saint, on mangeait des harengs. Mais on faisait entièrement carême : le Mercredi et le Vendredi saint. Tous les mercredis de carême et tous les vendredis, on faisait carême. Mais le Vendredi saint, on jeûnait. Ah si ! on ne mangeait guère le matin.
- Et pas de vin, pour les hommes ? [
interpellation d'André Guillot]

Ah non ! Ils ne buvaient que de l'eau. Et les femmes ne buvaient pas de café.
- Oh ? [
interpellation d'André Guillot]

Oui. Elles faisaient pénitence.
-
Et la lessive ? pas de lessive ? [interpellation de J. B.]

Ah ben, la Semaine sainte, pas de draps. On lavait mais il ne fallait pas laver les draps parce que si tu lavais les draps tu lavais ton… ton linceul, oui. Pour la Toussaint c'était pareil.
- Pour la Toussaint c'était pareil ? [
interpellation de J. B.]

Oui, le jour des morts, il ne faut pas laver… Enfin le jour des morts, le deux, le deux novembre.
- Et qu'est-ce qui se mangeait à Pâques ? [
interpellation d'André Guillot]

Ah ben, pour Pâques on achetait un "cul de veau", comme on disait, ceux qui avaient les moyens… Et aussi le premier qui mangeait de la viande, le jour de Pâques, on disait qu'il serait piqué par les mouches [au sens de tous les insectes]. Il ne fallait pas manger… le premier qui attaquait la viande le jour de Pâques les mouches le piquaient. Alors personne ne voulait attaquer le premier. Je ne l'ai pas vu mais je l'ai entendu dire, je l'ai pas vu.

Il y avait deux messes : la messe à huit heures, la messe à dix heures, et les vêpres.
- Oui, mais vous n'alliez pas aux deux messes, quand même ? [
interpellation de J. B., en français]

Ah ben, non, seulement à une. Il fallait lâcher les vaches pour aller "en champ".
- Et les vêpres ? [
interpellation de J. B., en français]

Eh ben, des vêpres, il y en avait le jour de Pâques, le jour de l'Ascension… A Saint-Bonnet il y en avait presque toute l'année. Ah ben, c'était notre sortie. C'était comme d'aller à la messe… C'était notre sortie. Les rendez-vous se donnaient… C'était la sortie qu'on avait, à la messe…
- Et vous aviez le droit ? [
interpellation d'André Guillot]

Eh bien, on avait bien le droit d'aller à la messe ! Il fallait bien aller à la messe.
- Oui, mais pour aller fréquenter ? [
interpellation d'André Guillot]

Ah bon, mais, pas le jour de Pâques, c'était défendu. Le dimanche des Rameaux et le jour de Pâques, tu ne fréquentais pas, alors… Il ne fallait pas se faire voir.
- Tout le temps de carême, c'était défendu ! [
interpellation d'une dame]

Il ne fallait pas se faire voir.
- Le dimanche de Quasimodo
(2) ? [interpellation d'un homme]

Eh bien, oui : "Le dimanche de Quasimodo, on gardait les agneaux !" Alors le dimanche de Quasimodo, tu gardais les agneaux et tu embauchais le premier nigaud [yaro] que tu trouvais. Pourvu qu'on en embauche un ! Pourvu qu'il ait un chapeau sur la tête. Dans le temps ils disaient : "Pourvu qu'il ait un chapeau sur la tête", c'était bon !
- Il fallait bien qu'il ait des culottes ! [interpellation d'un homme]

 

 

(1) Lenci, lencio : drap de lit, d'où linceul, cf. Louis-Pierre Gras, Dictionnaire du patois forézien, 1863
(2) Dimanche qui suit la fête de Pâques.

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mise à jour le 3 mai 2013