Patois vivant

Hommage à l'abbé Batet

Marie Coiffet

 

Hommage à l'abbé Batet

une histoire de Marie Coiffet (née en 1919) enregistrée au début des années 2000
au cours d'une veillée du groupe Patois Vivant
au Centre social de Montbrison


(patois de Champdieu)

pour écouter cliquer ci-dessous

(4 min 16 s)

(traduction : Joseph Barou)

L'abbé Batet (1), j'en ai un bon souvenir… [En français pendant 20 s]

[en patois]
Il était dans votre… établissement, au séminaire comme prof  de … et puis après il a fini [couvent des sœurs] Sainte-Claire, cet abbé Batet. Vous n'en avez jamais entendu parler ?  C'était un homme, c'était un prêtre, mais il était près des autres. Tout le monde l'aimait bien.

[intervention en français de Marthe Défrade].
- [il y en avait qui ?] pour le samedi de Pâques, ils allaient bien se confesser aux Saine-Claire parce que l'abbé Batet ne demandait pas des explications.

[Marie Coiffet, en français]
- Oh ! Bien sûr. Lui, il était mieux vigneron qu'autre chose, hein ! Je vous assure, dans ses vignes, il fallait le voir. Il y était tout le temps fourré, dans ses vignes.

[intervention de Paul Robert, en français]
- Quand…, quand il est mort, enfin avant de mourir il avait dit à Pierre Suchet :
Pierre, le jour de mon enterrement, vous mettrez une petite… une "cempote (2)", je crois qu'il avait dit, sur le rebord de la fenêtre.

[Paul Robert, en patois]
Parce qu'il habitait…

[Marie Coiffet, en patois]
Il habitait vers la forge des Robert, pas loin…, en face du travail [lou z'étrio : les "étriers" pour ferrer les bovins] et ça faisait le tour, et dans cette maison on a fait trois ou quatre appartements, je ne sais pas combien.

[Paul Robert, en patois]
Et ils n'ont pas mis le tonneau !

[Marie Coiffet, en patois]
Eh non ! Il y avait le pressoir, il y avait le cuvage, il y avait la cave, une très grande cave. Et il faisait énormément de vin qu'il vendait bien à Chalmazel, justement. Parce qu'à cette époque  on le vendait en "cempote" [par tonneau de 100 l] le vin. Et c'était du bon vin, parce que c'était tout du gamay, ses vignes. Il avait bien en plus, quelques bacau et autres mais c'était surtout du gamay. Et tout, tout… - si vous connaissez un peu Champdieu - tout ce qui regarde la Corée, là, en bas de la Madone, là, c'était tout des vignes, des vignes de l'abbé. Et il y avait seulement un bout de vigne de mon père, là, qui a été arraché cette année. Ce n'est pas vieux, pas arraché depuis longtemps, hein !

Et quand mon père travaillait les vignes, lui, il allait voir travailler son vigneron et il allait toujours lui parler et tout. C'était des copains, pourtant il était très instruit et tout, et mon père était un simple petit paysan, quoi. Mais il était "chouette" cet abbé Batet. Et puis non seulement ça, mais il avait énormément des vignes partout d'ailleurs. Il en avait sur le village, ici. C'est tout construit. D'ailleurs ça s'est tout construit, à part le […?] c'est quand même un peu loin. Il y avait le pigeonnier, il avait une bonne propriété qu'il avait reçue d'un oncle qui n'avait pas d'enfant. enfin…

[Question de Marthe Défrade]
- Il y est bien toujours le pigeonnier ?

- Ah  ben ! Il y est toujours le pigeonnier, oui, oui, oui ! Mais il n'y a pas de pigeons, je ne crois pas [qu'il y en ait]. Et  voilà.

Et ben, maintenant, il y a le Gilles Bonnefoy qui a repris un peu de vignoble mais pas tellement de l'abbé. Les vignes de Jacques, de …, le pigeonnier, mais alors le pigeonnier qui est vers chez moi, près du cimetière, là. Ce pigeonnier, moi, j'y avais…, enfin, vendangé [quand] j'avais peut-être douze, quatorze ans. Et puis après, ça a été un pré, ça été tout un tas de choses, surtout un pré. Et maintenant, le Gilles Bonnefoy l'a tout miné et c'est tout en vigne à nouveau.

- Et il a laissé le pigeonnier ? [Question de Marthe Défrade]

- Ah ben ! oui. Il a laissé le pigeonnier, non seulement le pigeonnier, mais ils l'ont un peu rénové. Il est "patrimoine" maintenant.

- La commune l'a acheté. [intervention de Paul Robert]

- Et voilà. Que voulez-vous que je vous raconte !

 

(1) Henri Batet, né vers 1882, élève du petit séminaire de Montbrison (en classe de rhétorique en 1899) ; ancien combattant la Grande Guerre, professeur de philosophie, aumônier au petit séminaire de Montbrison, aumônier des sœurs clarisses en 1956 ; décédé en 1966 et inhumé à Champdieu (renseignements fournis par Pierre Drevet).

(2) Tonneau contenant environ 100 litres.


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