Patois vivant


Lou besson

Marie Coiffet

 

Lou bessou
Les jumeaux

par Marie Coiffet (née en 1919) et enregistrée en 1998
au cours d'une veillée du groupe Patois Vivant
au Centre social de Montbrison, rue de Clercs


(patois de Champdieu)

pour écouter cliquer ci-dessous

(2 min 46 s)

Il y a 75 ans à peu près. Bon, alors je vous explique. Chez la Benoîte et le Tonin, il y avait deux jumeaux. Il n'y avait pas besoin de les regarder deux fois pour voir que les deux faisaient la paire. Ils se ressemblaient comme deux gouttes d'eau. Ils étaient un peu chétifs, deux petits rejetons, maigrichons mais pour faire les polissons [charipe], ils ne donnaient pas leur part au chien. C'étaient des turbulents [tarabate] finis.

Leur mère s'en était vu pour les élever, cette pauvre mère Benoîte. Parce qu'ils arrivaient toujours tout déguenillés de l'école. C'étaient de vrais chercheurs de disputes [
garguillou], cherchant toujours la guerre. Et ils prenaient de bonnes [brave] volées. Ils arrivaient avec leurs blouses, leurs culottes toutes déchirées. Elle n'arrêtait pas de racommoder. Et le père Tonin, c'est souvent qu'il faisait le poing dans sa poche. Il avait tant envie d'en prendre un pour assommer l'autre parce que "le tissu vaut bien le sac"mais [..?].

Le père Mathieu, un voisin, leur faisait apporter son pain du bourg et leur demandait parfois de venir bricoler dans son jardin mais pas quand il y avait des fraises [migode] parce qu'ils les lui mangeaient toutes. Et ce pauvre père Mathieu, ils savaient que c'était un avare complet. Il en aurait écorché un pou pour avoir la peau. Et [ils savaient] qu'ils seraient payés à coups de fronde. Alors son travail était vite fait : "en cinq sept" mais c'était "fait à la six quatre deux". Ils n'attendaient pas midi à quatorze heures pour déguerpir. Ils n'avaient pas les pieds dans le même sabot. Ils prenaient les jambes à leur cou avant que le père Mathieu ne lève sa canne. Il ne risquait pas de des atteindre [appondre].

Ils n'avaient pas attendu trois fois sept ans pour courir les filles. Mais comme c'étaient des "couratiers" finis, ils faisaient japper les chiens de sept communes [
ah ! putain ! exclamation d'un auditeur]. Alors, à courir deux lièvres à la fois, ils ne trouvaient pas chaussure à leur pied. Donc, ils se sont mis "à la débine", à la chopine et à faire les quatre cents coups.

Mais un jour, ils ont eu une peur bleue. Les gendarmes les poursuivaient. Ils ont dit : un de ces quatre matins nous allons nous retrouver entre quatre murs. Alors ils ont remis les pendules à l'heure. Ils ont changé leur fusil d'épaule. Ils ont mis de l'eau dans leur vin. Ils ont acheté une conduite. Et du coup, ils sont devenus sages comme des images. Ma foi, il faut bien que jeunesse se passe...

Retour


Ecoutons
le patois du Forez




Patois du Forez