Patois vivant





Noël Durand

 

Noël Durand

(patois de Marcoux)
Enregistrés
aux Trois-Noyers (Marcoux) le 8 avril 2011

Petites histoires au village

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(1 min 36 s)

 

Des petites histoires drôles qui se passaient dans le pays.

Le Campredon de Goutelas (1) qui était maire, il se mêlait un peu de tout. A la messe quand le curé prêchait trop longtemps, il toussait. Le curé savait ce que ça voulait dire. Il s'arrêtait tout de suite. A la mairie il recevait les plaintes des uns et des autres : à propos d'un charivari qui avait duré plusieurs jours [et] qui n'avait pas plu à la veuve qui s'était remariée, jusqu'au curé Magdinier qui, plusieurs fois, s'était adressé au maire pour tapage nocturne qui venait du cabaret qui était à côté de la cure.

Entre le curé Magdinier et Campredon ce n'était pas la bonne entente. C'était deux personnages assez bizarres, tous les deux, qui alimentaient un petit peu les racontars de ce qui se passait dans le bourg. Le curé avait une servante qu'il avait envie de renvoyer et elle ne voulait pas partir. Il dit : Bouge pas, je vais lui faire peur. Je vais me promener, la nuit, dans le couloir, en traînant des chaînes. La servante n'eut pas peur du tout. Elle dit : Monsieur le curé, je n'ai pas peur des vivants, pas plus des revenants

A côté de la cure il y avait un cordonnier qui tenait aussi cabaret. Il avait réparé les chaussures du curé et réclamait 6 francs. Le curé en donna 4. Six mois après le cordonnier se maria et il était en conflit au sujet du paiement de la cérémonie. Tout se termina assez mal avec des injures de la part des uns et des autres.

(1) Le commandant de Campredon, châtelain du lieu, habitant le château de Goutelas. 


Entre deux gendarmes

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(2 min 1 s)

Le témoin raconte avec beaucoup de bonhomie une petite anecdote qui le concerne. Son élocution parfois rapide rend - pour quelques mots - la compréhension difficile.

 

Avec mon ami Jean Pradel, on est allés une fois… On avait pris l'idée d'aller je ne sais pas où. Du côté de Chausseterre, dans la montagne… Il voulait acheter un tracteur. On est allé voir le tracteur…

Moi, j'avais une auto. On est allés voir ce tracteur, bon ! Et nous sommes revenus tranquillement. Nous descendions par la route, par la route qui descend vers les […?] Et tout d'un coup, je ne vis qu'une moto, un gendarme qui passe devant, qui fit signe de se garer.

- Bonjours Monsieur, vous avez vu que vous avez un phare qui ne marche pas.
Je ne l'avais pas vu.
- Ça se peut (aux gendarmes, je parlais français, bien sûr), ça se peut bien.
- On va regarder ça.

Et je suis parti à gratter [graboter] dans la boîte des fusibles et dérivation. Ce fut pire ! Tout éteint ! Tout éteint ! Plus de lumière.

- Eh ben, mon vieux, c'est […?]

 Y en a un qui dit :
- Ben ! Allez, ni une ni deux ! Y en a un qui va passer devant. Mon collègue va passer devant, moi je passerai derrière. On va rentrer comme ça.

Et nous voilà partis, en descendant par les […?] : un gendarme devant, un gendarme derrière. Pire que le président de la République !

Oui, mais le plus fort, c'est qu'en rentrant dans la ville de Boën toutes les lumières se mettent en route, se mettent à marcher. Eh bien, j'étais pas content ! Je me dis : eh bien mon vieux, qu'est-ce qu'ils vont dire ? Que tu t'es foutu d'eux. Non, ils furent bien braves, ces gendarmes. Ils me firent signe de tourner sur la place. Bien, ils dirent : maintenant il faut aller chez votre garagiste… Je ne demandais pas mon reste. J'allais chez le garagiste pour réparer mes feux et puis en [route…?] tranquillement […?]



Le bouc jaloux

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(3 min 7 s)

Alors la "Glaudine" [Claudine], elle était mariée avec Pierre Charron. Oh ! Tous les deux, c'était un couple qui était un peu rigolo. A la rigueur ils buvaient quelques canons [de vin] aussi bien l'un que l'autre. Quand ce n'était pas des canons, c'était la goutte. Alors ils vivaient bien un peu petitement. Ils avaient deux ou trois vaches. Ils avaient un âne, je crois. Et puis elle [la Glaudine] un bouc, un verrat aussi. 

Alors les gens venaient bien chez elle parce que, elle, elle était toujours bien avenante. Quand on y allait, on buvait le café, on allait boire un canon… Toujours bien reçu. Les gens aimaient bien y aller. Et puis, de l'autre côté, de l'autre côté d'en bas de la route, là-bas, il y avait la Gavotte – comme on l'appelait –, elle sortait d'en haut. Elle était mariée avec un P. . Elle avait pris l'idée, elle, de tenir un bouc. Elle dit : Oh ! Je peux bien tenir un bouc. Elle avait quelques chèvres. Presque tous les gens avaient des chèvres à l'époque. Alors voilà qu'elle a un bouc. Et ce bouc était vaillant mais les gens aimaient mieux aller chez la Glaudine. C'était plus sympathique. Ce n'était pas que tu étais bien [mal] reçu, mais enfin ce n'était pas le même genre. Ils aimaient moins y aller. Et ce bouc qui regardait ["aviser"], qui regardait toutes ces chèvres qui allaient chez la Glaudine. Et ce bouc, ça l'embêtait ça. Il disait : Elles vont toutes… Toutes les chèvres vont là-haut et puis, moi, je n'en ai que quelques-unes, de temps en temps. Parce qu'il y en a qui en amenaient quand même parce qu'ils ne pouvaient pas faire autrement. Ils en amenaient chez la Glaudine et en amenaient chez la Gavotte – comme on disait.

Et un jour, mon bouc, il ne fit ni une, ni deux, le voilà parti. Il monte - ce n'est pas loin mais il y a la grand-route à traverser. Il traverse la route, il n'y avait pas d'autos comme aujourd'hui, alors. Il arrive là-haut tranquillement. Alors ici, ce fut joli ! Vous n'avez jamais vu deux boucs qui se battent ? C'est comme deux béliers [aré : béliers], le mâle des brebis. Ils se regardent droit dans les yeux et puis "pan". Alors une bagarre qui ne s'était jamais vue ! La Glaudine qui sort, qui voit ça : Ah ! Bon Dia ! Venez chercher votre bouc, il veut tuer le mien. Et la voilà qui attrape une trique et tape sur le bouc de la P. . Enfin, dès qu'elle l'a vu la Gavotte, elle, la voilà en route avec un bâton pour y aller. Et que je te tape ! Et que je te tape sur le bouc ! Enfin, à la fin, elles réussirent à attraper chacune leur bête. Mais dans la… bagarre, il y en avait une qui avait reçu un coup… par les jambes. La Gavotte, elle avait… Et puis après elle disait : […?] le bouc de la Glaudine, il m'a foutu un coup dans les parties !

Les ânes

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(1 min 10 s)

Il y avait beaucoup d'ânes dans la commune. Il y en a qui étaient plus têtus, plus têtus les uns que les autres. Il y en a de la Bruyère qui était parti au bourg avec un sac de blé sur son âne. En revenant, quand il fut au milieu du trajet, l'âne refusa d'avancer. Et ce qui se passa, c'est que le brave paysan, il rentra chez lui avec son sac de farine sur l'épaule et l'âne suivait derrière. Authentique, aussi.

Et puis l'autre…

Eh ben ! Il y en a bien une autre, une histoire d'âne. Tu sais, le Père Dupuy, là-haut ?… [intervention de Jeanne Durand-Duclos, en français].  

Un âne refusait d'avancer. C'est vite comme ça les ânes ! Quand ils prennent à s'entêter tu peux toujours faire ce que tu veux, tu n'as pas… Rien à faire. Son propriétaire se mit en colère. Il dit : Ah ! Il dit, mon salaud, je t'aurai bien ! Il prend une poignée [una brande] de paille. Il y met le feu et il la lui met sous la queue. L'âne partit, bien sûr, à fond de train. Oui, mais l'âne rentre à l'écurie [et] il mit le feu sur son passage. Heureusement, il n'y eut pas trop de mal. Authentique, aussi.


La mode

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(50 s)

A l'église, les femmes, les filles quand arrivait Pâques, souvent elles avaient des tailleurs neufs ou des robes [neuves]. Elles étaient bien contentes de les faire voir. Alors elles s'amenaient en se dandinant dans l'église, toutes contentes de se faire remarquer. Autour de 1900, la mode des femmes c'était de porter un grand chapeau. Le dimanche, il y a une fille, une jeune fille, elle ne pouvait pas rentrer par la porte de l'église tellement son chapeau était large. Mais ses jupes étaient un peu raccourcies. Et le curé, le dimanche après, fit son sermon et il dit comme ça que c'était inadmissible d'avoir une mode comme ça, que c'était une mode "à la baise-moi vite !"

Authentique, celle-là.

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