Quand
nous étions jeunes, bien sûr, à la campagne,
nous avions des brebis. L'autre jour je voyais "sur"
la télé, sur la Sept, ils expliquaient
comment il fallait écharper la laine. Maintenant
ils le font avec des machines, bien sûr. Et puis nous
il fallait tout faire à la main. Il y en a sûrement
d'autres qui l'ont fait dans la salle, ici.
Alors
il fallait d'abord tondre les brebis au printemps et puis
laver la laine en passant l'été. Et pour la
faire sécher c'était pas toujours bien commode.
Nous la mettions sur des buissons qui étaient un
petit peu plats ; ça séchait mieux que tout
à fait
[franc]
par terre.
Et
puis l'hiver venu, on la mettait dans de grands sacs
[les boges]
bien sûr, pour la carder.
Et puis l'hiver quand on n'avait pas bien du travail, ça
faisait l'occasion de faire des veillées le soir.
Tout le village venait pour écharper la laine. Les
hommes venaient mais ils n'y touchaient pas, eux. C'était
[seulement]
pour
discuter entre eux. Il n'y avait que les femmes pour écharper
la laine. Ce n'était pas bien marrant - il faut vous
rappeler vous aussi. On n'aimait pas, bien sûr.
Et
puis après il fallait la porter à Say
[un hameau de Marcilly-le-Châtel],
chez Bérard pour la faire carder. Et puis il fallait
retourner la chercher, bien sûr, avec la voiture et
le cheval comme toujours.
Et
puis les vieilles savaient encore filer avec une quenouille.
Mais je n'en ai pas vu beaucoup, ça ne se faisait
pas bien. Ma grand-mère un peu et une femme de [...]
la grand-mère
de ma nièce qui avait le rouet et la quenouille.
Elle a filé longtemps, longtemps, celle-là.
Et puis elle la repassait au rouet pour bien la tordre.
Et puis il fallait l'assembler par deux, trois brins suivant
ce qu'on voulait en faire, pour la tricoter
[brocher].
Et puis ça nous occupait tout l'hiver comme ça.
L'autre jour, j'y ai repensé. Je l'avais complètement
oublié. C'était des corvées pas bien
marrantes. Voilà ; ça me rappelait tout ce
qu'on avions fait étant jeunes. Et il y en a sûrement
d'autres qui l'ont fait comme moi.
Et puis tondre les moutons c'était pas commode. On
n'avait pas de tondeuse à l'époque. il fallait
prendre des ciseaux. Alors il fallait coucher la brebis
par terre les quatre pattes attachées ensemble et
pas trop lui faire mal, bien sûr. Il fallait faire
attention, et puis il fallait mettre les deux genoux par
terre pour le faire. C'était une vraie corvée,
pas marrante à faire du tout, ça.
Pour
la laver aussi, il fallait beaucoup d'eau, puis pas commode
à laver, puis il fallait la rincer à la rivière,
il n'y avait pas assez d'eau à la maison... [c'était]
tout
à fait gras et souvent un peu crotté, un petit
peu... Ben oui ! [avec]
des
"barbillats"
[poux de la laine]
dedans... Et voilà.
[merci,
merci, Anna]

Fileuse auvergnate
(eau-forte de Jean-François
Millet)