La
fête du Chirat
racontée
par Anna Reboux et enregistrée
au cours d'une veillée du groupe
Patois Vivant
au Centre social de Montbrison
(patois de Saint-Laurent-Rochefort)
pour écouter cliquer ci-dessous
(3 min 50 s)
La
fête du Chirat. Vous n'en avez pas entendu parler
? - Un chirat ? C'est un rocher. -
Oui, un ancien volcan, il paraît. Je ne l'ai jamais
vu en éruption.
Il se trouve entre le Bruchet et Noirétable, pas
loin de vers le P... Alors tous les ans, à la Saint-Jean,
il y avait un voeu qui avait été fait pour
empêcher la grêle d'abîmer la récolte.
Ils [les
anciens] avaient
dit que pour la Saint-Jean ils feraient l'aumône pour
les pauvres du pays.
Alors l'hiver, ça commençait en janvier à
peu près, il y avait une dizaine de hameaux qui participaient.
Il y avait deux hommes qui passaient dans toutes les maisons
pour collecter du blé [seigle],
du grain. Et puis alors quand arrivait le printemps, ils
l'apportaient au Pra, chez Bernard pour le faire moudre.
Et puis ensuite il fallait l'apporter chez le boulanger
à l'Hôpital
[sous-Rochefort],
une année chez Vernet, une année chez S...
pour ne pas faire de jaloux. Et puis, pour le 24 juin, la
veille, les responsables allaient chercher toutes ces grosses
tourtes. Ils montaient avec le cheval au Chirat et le dimanche
le plus près de la Saint-Jean, [la
Saint-Jean ne tombait] pas
toujours un dimanche, tous les pauvres venaient les plus
nombreux possible, parce que c'était la distribution
du pain et il y en avait pour tant de personnes...
Et
puis il y en a un qui faisait la pière, un qui n'allait
jamais à l'église qui était le premier
à genoux et [à
dire]
: Allez, la prière ! Alors il y avait la distribution
et puis la messe le matin de la Saint-Jean et s'il y avait
de l'argent [des
sous] de
reste, c'était distribué aussi. Et puis après
tout le monde avait rendez-vous au Bruchet. Il y avait deux
cafés à l'époque avec deux accodéons
et les jeunes passaient la nuit à danser. Et il y
avait la mère J., de l'Hôpital, qui montait
avec son camion qui vendait un tas de babioles.
C'était la grande fête et c'était le
seul jour de l'année avec la Saint-Laurent [fête
patronale]
qu'on mangeait de la brioche
[...] et pour que ça fasse moins cher, on portait
le beurre et les oeufs chez le boulanger pour qu'il n'y
ait que la façon à payer. Et ce jour, nous
buvions de la limonade, nous mangions des cacahuètes.
C'était tout à fait la grand-fête.
Et
puis ça s'est arrêté au moment de la
guerre. On n'avait plus le droit de faire moudre du grain.
Tout a été fini et personne ne l'a repris
ensuite.
[discussion : qui étaient les pauvres ?]
...
de la commune, de Saint-Georges-en-Couzan, de Saint-Just,
de Say, de Boën, les plus nombreux possible, le plus
possible... Et des grosses tourtes de pain noir.
[discussion
en français à propos des autres distributions
aux pauvres dans la région]
Tous
les vieux disaient : si, à la Saint-Jean, on ne
le fait pas, notre blé sera tout grêlé.
C'était un voeu qui avait été fait
parce que les blés avaient été grêlés
et ils avaient dit : dorénavant on fera une fête,
on donnera du pain aux pauvres pour que saint Jean nous
garde de la grêle...
[fin
de la discussion en français].
Au
cours d'une autre veillée, la "donne de la Saint-Jean"
a été racontée plus longuement par
Anna Reboux et a été l'occasion d'échanges
où intervenait notamment Philippine Chambon...