(dessin du docteur Noëlas, archives Diana)

Les déclarations de grossesse en Forez
sous l'Ancien Régime

 

 

 

 

Antoinette Roze

Acte du 19 août 1753

Notaire : Morel

Archives de la Diana

(Antenne des archives départementales)

 

 

Antoinette Roze, servante d'auberge à Montbrison

Document




Résumé

                    

ANTOINETTE ROZE, SERVANTE D'AUBERGE A MONTBRISON

 

       Antoinette Roze présente sa déclaration le 19 août 1753 (1) en présence de noble Claude Caze, conseiller du roi, un des recteurs de Sainte‑Anne. Elle est âgée de 27 ans et native de Saint‑Martin‑la‑Sauveté. Depuis Pâques 1752, elle est domestique chez Simon Compaignon, "traitteur et aubergiste" à Montbrison.

       Là, elle "s'y seroit acquittée de son devoir du mieux qu'elle auroit pû" jusqu'à ce que "dans le courant du mois d'aoust de la même année ledit Compaignon n'ayant point de valet luy auroit commandé d'aller donner du foin aux chevaux qui étoient dans son écurie, ce qu'elle auroit executé". "A cet effet étant montée à la fenière ledit Sieur Compaignon la suivit et la jetta sur le foin et la connut charnellement".

       L'aubergiste récidive un peu plus tard : "en ayant fait autant quelques jours après dans le temps de la levée des foings, un soir que la femme dud. Compaignon (2) s'étoit aller promener et étant tous deux seuls ledit Compaignon jetta ladite Roze sur son lit dans la cuisine et la connut, l'ayant ensuite poursuivie pour en faire de même l'occasion ne se seroit pas rencontrée..."

       "De ce commerce ladite Roze seroit devenüe enceinte, étant très avancée dans sa grossesse, c'est‑à‑dire environ de cinq mois, elle auroit annoncé son commerce à la femme dudit Compaignon qui auroit obligé ladite Roze de se retirer dans le domaine dudit Compaignon appelé le Palais, paroisse de Bard, où elle au­roit demeuré quatre mois jusques aux dix(ièm)e du présent pendant lequel elle est accouchée d'un garçon le vingt six juillet dernier..."

       L'enfant, qu'on lui retire aussitôt, est baptisé à Bard "la nuit suivante". Elle indique que "maintenant, elle est sollicitée de toutes parts à exposer sondit enfant ou en cette ville ou à St Entème, ce qu'elle ne scauroit faire ce meme enfant n'étant point entre ses mains..." En effet,  Compaignon l'a fait mettre en nourrice "chez une pauvre au lieu de la Rochette parroisse de Lérignieu où il est extrêmement mal nourry et entretenu dans l'espérance ou de le faire mourir ou de trouver occasion à pouvoir l'exposer..."

       C'est pourquoi Antoinette Roze est obligée "d'avoir recours auxdits sieurs Recteurs et les suplie de vouloir bien pourvoir à ces inconvéniens étant menacée d'être tuée de même que son enfant ; à cet effet elle a volontairement affirmé la main levée à Dieu n'avoir point eu commerce charnel qu'avec ledit Compaignon et que c'est de ses seuls faits qu'elle est accouchée dudit garçon dont elle ne scait point le nom..." Antoinette ne sait pas signer.

       Le fils d'Antoinette Roze, Pierre, était né et avait été baptisé à Bard le 26 juin 1753 et non le 26 juillet comme l'indique la déclaration de grossesse. Il est déclaré de père inconnu ; son parrain est Pierre Jay, du village du Cro­zet et sa marraine Claudine Crozet du village du Pallay (3). Il est mis en nourrice au hameau de la Rochette, très probablement chez Mathieu Jay et Marie Faure qui hébergent habituellement des nourrissons (4) et qui paraissent apparentés à Pierre Jay, parrain de l'enfant.

(1) Archives Diana, fonds des notaires, Morel, 1753.

(2) Symon Compaignon était marié depuis 1736 avec Anne Ladret, contrat du 14 août 1736, reçu Morel, notaire à Montbrison.

(3) Etat civil de Bard, renseignements communiqués par M. Emile Meunier, maire de Bard.

(4) Chez eux meurt, le 16 juillet 1762, Marie Christine Beaune, âgée de deux mois, fille de Grégoire Beaune, marchand de la paroisse Saint‑André de Montbrison, et de Marie Estornelle (Jean‑Paul Soleillant, "Etat civil de Lérigneux 1696‑1800").