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Le
théâtre à
Montbrison
Souvenirs
de vieux Montbrisonnais...
Théâtre
municipal
A l'emplacement de la salle des fêtes
actuelle se trouvait le théâtre municipal. C'était
un joli théâtre genre Italien avec balcons recouverts
de velours rouge. Pour les personnalités - sous-préfet,
maire, président du tribunal, etc. - il y avait trois
loges de chaque côté de la scène. Les becs
de gaz subsistaient mais quelques ampoules électriques
avaient fait leur apparition.
A ma connaissance, il n'y a jamais eu de photo de ce théâtre,
la réalisation aurait été certainement
difficile en raison de l'absence de lumière.
J'ai cependant une photo de la scène avec de très
jolis décors prévus, paraît-il à
l'origine, pour l'opéra d'Alger. Il s'agissait d'une
représentation Mademoiselle de la Seiglière, jouée
en 1941 au profit des prisonniers de guerre. C'était
peu avant la fermeture définitive du théâtre
pour raison de sécurité.
Les réputées Tournées Barret se produisaient
au théâtre municipal trois fois par an.
L'hiver 1934, une troupe professionnelle d'opérette s'était
installée à Montbrison pour l'hiver avec trois
représentations par semaine.
Il n'y avait que ça !
(Jean
Soleillant, "Montbrison autrefois, souvenirs",
Cahier de Village de Forez,
n° 2, 2004)
Au théâtre
Si les grandes personnes étaient
favorisées de nombreuses représentations au
théâtre municipal où les tournées
se succédaient (je me souviens, entre autres, des Tournées
Barret), nous, les enfants, n'y étions conduits qu'une
fois l'an pour le concert-spectacle offert par la Société
musicale à ses membres honoraires, généralement
en février. Je ne savais pas qui étaient ces
"membres z'honoraires" dont nous faisions partie,
mais ils évoquaient pour moi un événement
à la fois mondain et familial.
Au premier rang du balcon, dans nos plus beaux atours, nous
nous grisions de musique, de chants et de rires. Les morceaux
exécutés par l'Harmonie Montbrisonnaise sous
la direction de son chef M. Frot, alternaient avec des monologues
comiques, du genre troupier, très en vogue avant la
guerre de 14, des airs d'opéra chantés par des
dames en grand décolleté accompagnées
par des messieurs en queue-de-pie, un illet à
la boutonnière, des saynètes gaies où
tout le monde s'amusait de bon cur... Nous avions souvent,
ce jour-là, la primeur d'une pièce composée
tout exprès par un Montbrisonnais poète, Victor
Jacquet, simple employé des P.T.T. qui a laissé
des uvres de qualité, tant en vers qu'en prose,
et à qui l'on ferait bien de rendre hommage un jour.
Le théâtre, c'était
aussi pour moi un cadre féerique... Je revois les galeries
blanches et or décorées de motifs en stuc, le
plafond peint où les amours volaient dans les nuages
parmi des guirlandes de roses, autour des cartouches portant
en majuscules les noms de Molière et de Racine, l'éclairage
au gaz papillotant de la salle et de la scène... les
loges à rideaux cramoisis retenus par des cordelières
à glands dorés : celle de M. le maire à
droite, celle de M. le sous-préfet à gauche,
où venaient s'accouder les élégantes
du siècle... J'en ai gardé un souvenir émerveillé.
Lorsque
revenaient les beaux jours, il n'était pas rare de
voir un théâtre en plein air s'installer Place
Eugène-Baune. Nous avons beaucoup fréquenté
un de ceux-ci, le théâtre Tuyet où l'on
jouait des mélodrames : la Porteuse de pain, les deux
orphelines, A la grâce de Dieu, Geneviève de
Brabant, etc. Montbrison en était friand et, chaque
soir, les bancs étaient pleins. Les artistes passaient
dans les rangs à l'entracte pour vendre de petits bouquets,
ce qui donnait l'occasion de les voir de près. Ils
faisaient aussi la quête parmi le public, très
nombreux, qui se pressait à l'extérieur et s'appuyait
sur les barrières. Je n'appréciais pas particulièrement
ce spectacle que je trouvais vulgaire mais mes parents en
raffolaient.
Je préférais de beaucoup
Benoist-Mary, un comique lyonnais, du genre Mère Cotivet,
qui donnait régulièrement des représentations
salle Saint-Pierre. Avec sa troupe, composée uniquement
de messieurs (à cette époque on n'admettait
pas une troupe mixte sur une scène paroissiale !) il
interprétait des comédies de Labiche. Je me
souviens entre autres de la Poudre aux yeux où, déguisé
en femme, il était sensationnel !
(Marguerite
Fournier-Néel,
"Montbrison au début du siècle,
souvenirs d'enfance", Village
de Forez, 1984)
Joies du passé
Le
théâtre à Montbrison au XVIe siècle
Nos
pères ont toujours eu un goût très vif pour
le théâtre et il est certain qu'au Moyen Âge,
miracles, mystères, farces et sotties se sont joués
dans la bonne ville de Montbrison pour la plus grande joie de
ses habitants.Cependant,
c'est à l'orée des temps modernes, au XVIe siècle,
que ce goût paraît avoir été le plus
prononcé à en juger par les nombreux documents
concernant les représentations théâtrales
données à cette époque sur les sujets les
plus divers.
C'est ainsi qu'en janvier 1566 vinrent dans notre ville "les
Enfants Sans Soucy appelés la "Bande Grise"
qui faisoient merveille de bien chanter et jouer farce".
En quel lieu s'installèrent-ils ? On aimerait le savoir
car il semble peu probable qu'ils aient joué dehors en
plein hiver.
Le 13 juillet de la même année, "des gens
de petite estime et basse condition (?)"donnaient sur le
parvis de la Collégiale un grand drame religieux intitulé
"Mondanité et Conversion de la Magdeleine".
Le grand portail servait de toile de fond à ce spectacle
qui dut enchanter nos ancêtres.
Mais ce fut plus merveilleux encore l'année suivante
(1534) lorsque se déroulèrent en plein air de
grandioses représentations de la Passion. Elles durèrent
trois jours : es 20, 21 et 22 septembre et occupèrent
tout l'espace sis "entre la porte d'Ecotay (rue du Parc)
et la "porterie du cloistre" (rue Notre-Dame). Les
acteurs étaient gens du pays. Ils jouèrent avec
un tel cur, s'identifiant tellement avec leurs personnages
que certains incidents se produisirent, notamment la "pâmoison
en croix" du Père Bollignieu, qui jouait le rôle
du Christ !
Le dimanche 10 août 1539, les Montbrisonnais se pressent,
non plus devant la Collégiale ni à l'ombre des
remparts, mais au beau milieu du marché à une
représentation des plus comiques, groupant "sotties,
moralités et farce". Le dimanche 24, le genre change.
Ils assistent au "Mystère de l'Enfant Prodigue"
suivi de "La Folie de Noël Tournon, geôlier
de Montbrison". Ce titre fait penser à du Shakespeare
et la pièce dut certainement faire grosse impression
sur le public. Qui en retrouvera le texte probablement composé
par un auteur local ?Place à la musique avec "les
Enfants Sans Soucy Picards" qui, le 29 juin 1548, régalèrent
nos aïeux des plus beaux airs de leurs violons.
Le dimanche 3 août 1549 la scène est érigée
sur le marché. Les spectateurs s'amusent fort à
la représentation du "Monde malade". Ils retrouvent
leur sérieux le lundi de Pentecôte (26 mai 1550)
pour frémir à l'évocation du "Sacrifice
d'Abraham" donné sous le porche de Notre-Dame.
On
voit par ces renseignements précis combien le théâtre
était goûté par les Montbrisonnais au XVIe
siècle, qui en appréciaient les genres les plus
divers. Et encore y a-t-il tout lieu de penser que la liste
de ces réjouissances est bien incomplète et qu'il
ne s'est pas passé d'année sans que comédiens
ou amateurs soient venus distraire un public si compréhensif
et si sympathique
[article de Maguerite Fournier, presse locale]
[Marguerite
Fournier a complété ce texte dans Village
de Forez]
Le
27 février 1588 (date mémorable dans les annales
du théâtre) la "Pastorelle" de Loÿs
Papon était jouée dans la salle de la Diana. Cette
comédie-ballet serait, aux dires des spécialistes
en la matière, le point de départ de tous les
opéras et opérettes qui ont, depuis 400 ans, vu
le jour sur toutes les scènes du monde !...
C'était, en effet, la première fois que la musique,
la danse, le chant, la diction coopéraient pour produire
un genre jusqu'alors inconnu...
C'était aussi la première fois que la scène
était séparée de la salle par un rideau
manuvré par des machinistes spécialement
chargés de ce soin, et une rampe d'éclairage constituée
par des flambeaux de cire... Trois innovations en un seul lieu
et en un seul jour !...
La pièce était l'uvre d'un chanoine de Notre-Dame,
Loÿs Papon, poète et calligraphe émérite,
un des membres les plus distingués du brillant groupe
littéraire qui s'était formé à Montbrison
pendant la Renaissance
Elle
portait un titre d'une longueur impressionnante : "Pastorelle
sur la Victoire obtenue contre les Allemands, Reytres, Lansquenets
Souysses et François, rebelles à Dieu et au Roy
très chrestien, l'an 1587". Elle avait donc pour
but de fêter un événement national : la
victoire d'Aunau remportée sur les protestants par Henri
de Guise en novembre 1587, victoire célébrée
dans toute la France avec le même élan.
La scène, dressée au fond de la salle, à
six pieds de hauteur, était magnifiquement ornée.
Sur des pièces de tapisseries descendant du haut de la
voûte, se trouvaient les portraits "grands selon
la nature", du roi, de la reine, des princes et des Guise...
D'autres portraits plus petits représentaient les personnages
illustres du temps
L'orchestre composé de hautbois et de violes était
placé à droite "sur un échafaud".
Aux sons de ces mélodieux instruments, les acteurs entraient
"marchaient à la grave, en cadence de cette harmonie"
Et qui étaient ces acteurs ? Nullement des professionnels
mais des jeunes gens, jeunes filles, enfants appartenant aux
plus hautes familles du Forez. Loÿs Papon donne dans son
manuscrit tous les détails de leur "ajustement"...
Ce sont d'abord les bergers, coiffés de chapeaux de paille
à la piémontaise, portant des houlettes dorées
et "tout équipage pastoral". Souvenons-nous
que l'on est au temps de l'Astrée et que bergers et bergères
étaient en grande vogue sur les bords du "doulx
coulant Lignon" ! Puis venaient les dieux et déesses
antiques : Mercure chaussé de "bottines aylées",
Cérès couronnée d'épis "faicts
au naturel". La Renommée sonnant dans ses trompettes
d'or "si proprement que l'on eût jugé que
le son emplissait la salle"...
Le
spectacle se termina en apothéose par l'embrasement
d'une pyramide de dix-huit pieds de hauteur "qui rendit
fort belle flamme, plaisante clarté et odeur agréable",
et autour de laquelle bergers et bergères dansèrent
pendant un quart d'heure "avec une telle dextérité
qu'il était impossible de faire mieux".
Tous
les détails de cette représentation mémorable
sont notés par l'auteur dans un manuscrit conservé
à Londres et dont la Diana possède seulement
une copie obtenue par le duc de Persigny en 1860. On apprend
que "toutes les fenêtres de la salle avaient été
bouchées afin qu'elle ne reçoive d'autre lumière
que celle de quatre-vingt-dix flambeaux de cire blanche élégamment
disposés ; que les sièges pour les assistants
avaient été placés de telle sorte que
"les plus éloignés reçoivent autant
de plaisir de la vue et de l'oreille que les plus avancés
du théâtre"... (autrement dit, en gradins).
La
gravure qui illustre le manuscrit (et sa copie) donne une
idée de la salle, avec sa voûte héraldique,
et de l'agencement de la scène avec son rideau et sa
rampe d'éclairage. On distingue aussi fort bien l'orchestre
sur son "échafaud"... Ce document ne cesse
d'étonner les chercheurs qui s'intéressent à
l'histoire du théâtre ; certains sont venus de
loin pour le consulter.
Quant
à la Pastorelle elle-même, disons que sa lecture
nous paraît aujourd'hui fastidieuse et bien démodée.
On ne la voit guère interprétée de nos
jours dans la salle de la Diana, mais il est parfois bon de
rêver à ses splendeurs d'autrefois.
Marguerite
Fournier,
Village de Forez, n° 11, juillet 1982
Le
théâtre à Montbrison au XVIe siècle
(texte ci-dessus en format pdf)
Le spectacle se termina
en apothéose par l'embrasement
d'une pyramide de
dix-huit pieds de hauteur "qui rendit fort belle flamme, plaisante
clarté et odeur agréable",
et autour de laquelle bergers et bergères dansèrent
pendant un quart d'heure
" avec une telle dextérité qu'il était
impossible de faire mieux".
Notre théâtre n'est plus qu'un souvenir
Cette
photo saisissante montre ce qu'il reste (encore pour quelques
jours) du coquet théâtre rouge et or et ce
qui fut pendant un siècle l'orgueil des Montbrisonnais.
D'innombrables souvenirs restent attachés à
ces ruines, témoins d'une splendeur passée.
Spectacles de tous genres : drames, tragédies, comédies,
opérettes, ont tour à tour charmé et
fait frémir le public. Concerts de sociétés
(notamment de la Lyre et de l'Harmonie Montbrisonnaise qui
fut sa devancière), fêtes de bienfaisance,
galas musicaux, manifestations patriotiques, bals de la
"Sainte-Cécile", conférences se
sont succédés dans ces lieux encore tout vibrants
des applaudissements et de l'enthousiasme des spectateurs.
De grandes comédiennes, telle que Blanche Dufrêne,
qui fut l'élève de Sarah Bernhardt et qui
lui succéda dans le rôle de l'Aiglon, se sont
maquillées dans les loges éclairées
par les rosaces de l'ancienne chapelle des Cordeliers !
Des tournées réputées y sont venues,
des noms célèbres y ont été
acclamés.
Un siècle de théâtre, un siècle
de vedettes de la scène, ne serait-ce pas là
une belle histoire à écrire, un dernier hommage
de reconnaissance à rendre à la salle où
Montbrison rit et pleura pendant cent ans !
Marguerite
Fournier
( Presse locale, 26 septembre 1956)
Notre
théâtre n'est plus qu'un souvenir
texte ci-dessus en format pdf
L'article
était illustré d'une photo de mauvaise qualité
montrant le théâtre en cours
de démolition. L'ancienne chapelle des Cordeliers
n'a plus de toit. On reconnaît
les rosaces qui dominent la scène en cours de démantèlement.
Henri
Néel
soixante
ans de théâtre
avec
le Groupe Artistique Montbrisonnais
Henri NEEL
qui nous a quittés le 28 juillet 1991 à l'âge
de 88 ans était le doyen des comédiens amateurs
de notre cité et sa vie se confond avec celle du
Groupe Artistique de Notre-Dame qui a enchanté des
générations de Montbrisonnais.
Il conservait dans de vieux cahiers et, plus encore, dans
une mémoire extraordinaire, les titres des multiples
pièces qu'il avait jouées au cours d'une carrière
s'étendant de 1919 à 1979... et plus.
Henri
Néel en 1984
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C'est,
en effet, en 1919 que fut inaugurée sur la
scène de la Maison des uvres Notre-Dame
(aujourd'hui le Rex) cette formation artistique fondée
par M. l'abbé Freyssinet à son retour
de la guerre de 14. Il entendait fêter ainsi
la remise en service d'une salle désaffectée
pendant la durée des hostilités, ayant
notamment abrité des prisonniers allemands.
La jeunesse tant éprouvée pendant ces
lugubres années allait enfin reprendre des
activités pacifiques dont le théâtre,
toujours cher à Montbrison, était, pour
ainsi dire, le symbole.
Après quelques comédies en un acte dont
la première s'intitulait Le sinistre Béguchet
et où Henri NEEL tenait le rôle d'un
chanteur de rue, on se lança dans le drame
avec Les piastres rouges qui attira un public enthousiaste
pendant plusieurs dimanches consécutifs.
|
La
pièce comportait quatre actes entrecoupés
d'intermèdes exécutés par la chorale
paroissiale et le ballet des petits pages, afin (précise
le programme) d'atténuer l'impression tragique laissée
par ce drame poignant. Ce fut le début d'une longue
carrière pour les pionniers du Groupe Artistique
tels que les frères DEVIN, Henri NEEL, Roger VIALLARD,
Antonin GRAND, Jean COIFFET, etc. Avec le recul du temps,
il est difficile de citer des noms sans se tromper... et
tant d'autres sont venus s'y ajouter au fil des ans !
Comment
ne pas évoquer le souvenir de Georges MASSACRIER,
irremplaçable dans le rôle du docteur Knock
et celui de Jeannette BAUDIER, la sémillante commère
des revues toujours bien en forme.
Le public fit toujours fête aux acteurs et ne bouda
aucune représentation. Il apprécia tout particulièrement
les comédies de Labiche La poudre aux yeux, la Grammaire,
la Cagnotte, Les deux timides, Le voyage de Monsieur Périchon
ainsi que le répertoire de Pierre l'Ermite très
à la mode à cette époque : Comment
j'ai tué mon enfant et La femme aux yeux fermés.
C'était aussi le temps des pièces patriotiques
et colonialistes telles que L'ami Fritz, Les Jacobins, Mirage
d'Afrique qui faisaient toujours passer le frisson dans
la salle. En revanche, on se détendait franchement
avec les comiques troupiers, John KARLEN (alias Joannès
ROMAGNY) en tête.
Certains de nos compatriotes avaient de véritables
talents de comiques, d'autres étaient plutôt
du genre pince-sans-rire ; leur entrée accueillie
dans un silence presque religieux déclenchait le
rire à retardement, mais quel rire !... La salle
en était toute secouée ! Je me souviens entre
autres d'un jeune nommé BURDIN qui n'avait pas son
pareil pour faire régner ce rire communicatif dans
des pièces telles que Les crampons de sauvetage,
un chef-d'uvre du genre.
Il y eut aussi les représentations à grand
spectacle : Jeanne d'Arc qui fut jouée sept fois
de suite dans une salle pleine, mais dont l'héroïne
(Mlle Serre) faillit périr sur le bûcher !
Les Mystères de Noël, reprise de ceux joués
en 1911 salle Saint-Pierre avec des tableaux en plus, Le
miracle de Lourdes, Les Martyrs de Lyon avec un saint Pothin
à la barbe hirsute, Pontius Pilatus, épisode
imaginaire de la vie de Ponce Pilate résidant à
Vienne dans les Gaules.
Plus de cent exécutants : acteurs, danseurs, musiciens,
choristes se produisaient sur le plateau, ce qui exigeait
une étroite collaboration entre les membres du Groupe
Artistique, ceux des chorales et des uvres paroissiales
sous la direction d'un clergé jeune et dynamique.
Personne ne plaignait ni son temps ni sa peine et le succès
était toujours au rendez-vous.
L'opérette eut son heure avec Quand on conspire,
Sérapion délégué, Télémaque
et, en 1935, Chercheurs d'étoiles,
composition du Père COIZET, professeur à
l'Institution Victor-de-Laprade dont nous avons rappelé
le succès éclatant.
Plus près de nous, les revues montbrisonnaises de
Téga-Lou (pseudonyme de M. GUIRAUDOU entreposeur
des tabacs dans notre ville, attirèrent un public
record : Pouf dans le Vizézy, et Montbrison Quat'z
aerq groupèrent sur la scène du Rex des gens
de tous les milieux et de toutes conditions sociales unis
dans une même passion du théâtre. Bien
sûr, Henri NEEL y tenait une place de choix et on
le reverra longtemps armé du trident de Neptune personnifiant
ce cher Vizézy.
Ce fut, je crois, sa dernière apparition sur la scène
où il avait fait ses débuts, mais non le point
final d'une carrière artistique qui durait depuis
plus d'un demi-siècle et se termina au centre des
Pénitents en 1982 avec Le bourgeois gentilhomme et
l'année suivante, avec Monsieur de Pourceaugnac.
Il s'agissait de prendre place dans ce Nouveau Théâtre
de Montbrison créé, en 1981, par de jeunes
comédiens amateurs auxquels il apporta son expérience,
son talent et sa joie de vivre.
La
liste des représentations données par le Groupe
Artistique de Montbrison telle que nous l'avons retrouvée
comporte plus de 200 titres et si l'on pense que la plupart
d'entre elles ont été jouées plusieurs
fois, on se fait une idée de sa popularité
et de son rayonnement dans la région. En effet, cette
troupe très généreuse n'hésitait
pas à se déplacer lorsqu'on faisait appel
à elle pour une bonne cause. On trouve trace de son
passage à Sury-le-Comtal, Bellegarde, Prétieux,
Savigneux, Nervieux, l'Aubépin, Chazelles, Sail-sous-Couzan,
Veauche, etc. Même le froid rigoureux des hivers de
guerre n'arrêtait pas son élan tant était
grande cette passion du théâtre qu'elle désirait
faire partager.
Henri NEEL, mon frère, lui a consacré toute
sa vie.
Marguerite-Victor FOURNlER-NEEL
Village de Forez, n° 54, avril 1993
Henri
Néel, soixante ans de théâtre avec le
Groupe Artistique Montbrisonnais
texte ci-dessus en format pdf
(4 pages)
Acteurs montbrisonnais
en 1933
(Les vivacités du capitaine Tic, comédie en trois actes, d'Eugène Labiche,
"Artistic group" de la Maison des oeuvres de Notre-Dame)
*
* *
Acteurs montbrisonnais
vers 1940
Maison des oeuvres de Notre-Dame
Impressions
montbrisonnaises
sur la Comédie de Saint-Etienne
Avec
le recul du temps, nous nous rendons mieux compte de tout
ce que la Comédie de Saint-Etienne nous a apporté.
Pendant quatorze ans (de 1949 à 1963) Jean Dasté
et ses comédiens ont enthousiasmé le public
montbrisonnais et on en a pour preuve les comptes rendus parus
dans la presse locale de cette époque.
Le premier, daté de 24 novembre 1949, concerne La
Cagnotte de Labiche, "une
cagnotte rajeunie et trépidante, une cagnotte qui était
presque une opérette grâce aux délicieux
intermèdes musicaux introduits par des artistes aussi
bons chanteurs qu'excellents comédiens".
1950 fut une année faste avec des auteurs aussi différents
que Marivaux (Le Jeu de l'Amour et du
Hasard), Jean Lescure (La Nuit),
Shakespeare (Mesure pour mesure),
Molière (Tartuffe). Jacques
Copeau (L'illusion), Corneille
(Polyeucte)
De spectacle en spectacle, le public conquis se pressait de
plus en plus nombreux salle du Rex, à tel point que
plusieurs représentations eurent lieu à guichet
fermé, au désespoir des retardataires !
Le visage des comédiens devenait familier. Parmi ceux-ci,
René Lafforgue, à la fois acteur et compositeur,
René Lesage, le bien nommé, Gaston Joly, le
valet idéal, Françoise Berlin dont le frais
minois et les grands yeux ingénus devaient nous enchanter
pendant plusieurs années, sans parler, bien sûr,
de leur maître à tous, l'incomparable Jean Dasté.
1951 nous révéla un Federico Garcia Lorca inconnu
dans la farce de la Savetière
prodigieuse alors que nous ne considérions en
lui que le dramaturge. Ce fut une bien agréable surprise.
Le même jour (1er mars) était représenté
un nô japonais Kage kiyo
genre tout à fait ignoré chez nous, dont la
découverte nous a enthousiasmés.
Et puis ce fut Le Bourgeois gentilhomme
de Molière avec un Jean Dasté rubicond,
flamboyant et chamarré à souhait !...
La saison finit en beauté avec Noé
d'André Obey. Cette pièce avait déjà
été donnée à Montbrison il y a
quelques années par la Comédie de Grenoble créée
avant celle de Saint-Etienne. Pour la 2e fois nous avons admiré
Jean Dasté dans le rôle du patriarche émouvant
de simplicité, d'obéissance et de foi.
1952. Suivant un procédé qui lui est cher, Jean
Dasté a juxtaposé deux uvres bien différentes
: d'une part, la comédie-farce de Molière, Les
Précieuses ridicules, de l'autre, deux actes
de Tagore, le philosophe hindou : Amal
et la Lettre du roi.
Ce fut cette dernière qui toucha le plus les spectateurs
avec, comme principale interprète, Catherine Dasté,
la jeune et charmante fille de Jean.
Puis retour à Shakespeare avec Macbeth,
un Macbeth incarné par René Lesage tandis que
sa cruelle compagne, Lady Macbeth, l'était par Marie-Hélène
Dasté... Cette représentation, donnée
le 1er mai, fut un triomphe pour la Comédie de Saint-Etienne
et pour Shakespeare !
Le 12 décembre, on est encore en plein contraste
entre Les Fausses Confidences
de Marivaux et A cheval vers la mer
d'un auteur contemporain Synge... Contraste dans les décors,
dans les costumes, dans le langage, dans les sentiments...
Que préférer ?... A la sortie, les avis sont
partagés mais l'opinion reste unanime lorsqu'il s'agit
de l'interprétation et l'adjectif "excellente"
revient toujours.
1953. Le mariage de Figaro de
Beaumarchais fait un triomphe. 200 spectateurs doivent s'en
retourner faute de place.
Avec Montserrat d'Emmanuel Roblès,
nous avons vécu des heures d'angoisse... Pas une détente,
pas un sourire, pas un bon mot... Une lumière crue
sur les murs blancs d'une prison... Une sévérité
solennelle et des visages torturés... Voilà
ce que fut ce drame de la guerre d'Espagne magistralement
interprété par les comédiens stéphanois,
mais tellement bouleversant !...
Il fallut attendre quatre mois pour accueillir un spectacle
plus souriant, placé sous le signe du mariage avec
deux comédies : Le Mariage forcé
de Molière et Hyménée
de Gogol, toutes deux excellentes.
Ce fut ensuite Chacun sa vérité de Pirandello,
pièce étrange qui fait rester les curieux sur
leur faim... Image de la vie où la vérité
pour les uns est le mensonge pour les autres... Jean Dasté,
René Lesage, Gaston Joly, Gérard Lorin ont,
par leur jeu, emballé le public du Rex qui n'a pas
recherché d'autre vérité que celle de
leur art.
1954. Retour au Grand Siècle avec Les
Femmes savantes de Molière, dans une riche mise
en scène. Sous leurs perruques et leurs pourpoints,
certains personnages avaient une majesté digne du Roi
Soleil : le décor en tapisserie d'Aubusson en était
digne aussi... Tous furent à la hauteur de leur rôle
même si Jean Dasté, atteint ce jour-là
d'une malencontreuse laryngite, nous donna un bonhomme Chrysale
bien enroué !
Le spectacle suivant : Irène
innocente d'Ugo Betti fut, pour les spectateurs, l'occasion
de découvrir un talent et un chef-d'uvre. La
bouleversante histoire d'Irène, cette jeune infirme
livrée au mal par des parents criminels et réhabilitée
sur son lit de mort par l'homme qui l'aime, tint les Montbrisonnais
en haleine d'un bout à l'autre de la soirée.
Elle fut écoutée dans un silence religieux par
un public en communion profonde avec les acteurs.
Mais le grand événement théâtral
de cette année 1954 fut sans conteste la première
d'Antigone de Sophocle. Monter
une tragédie grecque ! Depuis longtemps Jean Dasté
caressait ce rêve mais s'il a attendu si longtemps pour
le réaliser, c'est qu'il voulait avoir la maîtrise
absolue de son art. Il en a réservé la primeur
à Montbrison, ce qui est à la fois un honneur
et une marque d'amitié.
L'année 1954 marque aussi la rénovation de la
salle du Rex. La Comédie de Saint-Etienne en a inauguré
le plateau rajeuni avec l'Ours de
Tchékhov et la délicieuse comédie d'Alfred
de Musset : On ne badine pas avec l'amour.
Deux succès de plus à son actif.
1955. Enfin du Claudel, et non le moindre ! L'annonce
faite à Marie fut accueillie avec joie car elle
répondait à l'attente du public qui avait un
besoin instinctif de spiritualité... D'emblée
il entra dans le jeu et prit sa place dans les événements
tragiques qui le conduisirent "de la joie d'un matin
de mai à la douleur d'une nuit de Noël".
Pour la troisième fois, Jean Dasté va s'attaquer
au monument shakespearien en donnant La
Tempête. L'uvre est moins connue que les
précédentes et l'on note une baisse d'intérêt
dans le public. Pourtant l'interprétation est, comme
toujours, excellente et l'on voit pour la première
fois une jeune comédienne, Delphine Seyrig, appelée
à une brillante carrière.
1956. C'est ensuite le théâtre russe avec Les
Frères Karamazov pièce tirée par
Jacques Copeau du célèbre roman de Dostoïevski.
Les personnages sont saisissants de vérité.
Le 1er juillet, le spectacle a lieu en plein air. Les Montbrisonnais
vont vivre une nuit inoubliable avec Un miracle de Notre-Dame
d'un auteur inconnu du XIIe siècle joué devant
leur collégiale éclairée par de puissants
projecteurs.
Jean Dasté a scrupuleusement réglé la
mise en scène suivant l'ordonnance traditionnelle du
décor ; tout en haut, le ciel et ses élus, tout
en bas l'enfer et ses damnés ; au milieu, entre ces
deux "au-delà", une humanité agitée
de passions... Toute l'âme du Moyen Age, toute sa foi,
toute sa candeur revivent en ce beau soir d'été...
Retour sur terre avec Le Cercle de craie
caucasien de Bertolt Brecht, pièce compliquée
par la mise en scène et la multiplicité des
personnages et des lieux, à la fois satire du pouvoir
et des puissances d'argent, et manifestation d'un des sentiments
les plus forts au cur de la femme : l'amour maternel...
Françoise Bertin en est l'héroïne pathétique
De même que "la terre" est à celui
qui la cultive avec amour, "l'enfant" est à
celui qui l'aime...
1957. Parmi les auteurs contemporains Bernard Shaw tient une
grande place et il aurait été dommage que Jean
Dasté ne l'invitât pas un jour. Ce fut chose
faite le 27 février. Le Héros
et le Soldat fit passer au public des heures de détente
bien agréables.
Trois mois plus tard, le Miracle de
Notre-Dame sur le plateau du Rex n'obtint pas le même
succès qu'en plein air. Un mystère du Moyen
Age demande un cadre grandiose... Dans la même séance
fut donne Le Médecin malgré
lui de Molière où Jean Dasté fut
un truculent Sganarelle.
Molière revint en novembre avec Amphitryon
dont la vedette fut le jeune Stéphanois Marc Payolle
étourdissant de verve dans le personnage de Sosie.
Décembre vit la création du Maquignon
de Brandebourg, vieille légende germanique portée
à la scène par Herbert Le Perrier. La triste
histoire de cet honnête marchand de chevaux devenu bandit
par amour de la justice souleva bien des problèmes...
Ne s'était-il pas montré trop exigeant ?...
Quoi qu'il en soit tout le monde a applaudi Gabriel Monnet
dans ce rôle difficile et Françoise Berlin sa
partenaire. Tous deux ont fait courir des frissons dans la
salle jusqu'à la réplique finale sous la hache
du bourreau
Jean
Dasté au théâtre de Montbrison le 11 décembre
1957
1958.
Ce fut pour Jean Dasté le temps du chapiteau. Il raconte
dans ses souvenirs comment il se lia avec une merveilleuse
famille de cirque, les Farina Rossi, qui mit son chapiteau
à la disposition de la Comédie de Saint-Etienne.
II monta Le Songe d'une nuit d'été
de Shakespeare qui fit dans tout le département
une tournée triomphale. Montbrison eut cette faveur
le 6 juin, sur la place Bouvier. Ce fut magnifique... On s'en
souvient encore.
1959. L'année suivante, ce fut un autre chapiteau (plus
vaste que celui des Farina Rossi) qui s'installa au même
emplacement, presque jour pour jour, le 8 juin. Cette fois
c'était le retour de Molière et celui de M.
Jourdain, personnage pour qui Jean Dasté semble avoir
une prédilection et qu'il incarne à merveille.
Le public qui s'entassait sous le chapiteau, manifesta son
enthousiasme par des applaudissements délirants. Comédiens,
comédiennes, musiciens, danseurs le charmèrent
par leur talent. Une fois de plus la formule "cirque"
avait triomphé à Montbrison
Jean Dasté va aussi monter la jeune équipe des
Tréteaux qui a sa vie propre. Venue à Montbrison
cette petite troupe très dynamique remporte un grand
succès dans L'Exception et la
Règle de Bertolt Brecht. Elle interprète
aussi avec beaucoup de talent un programme musical : Chansons
d'hier et d'aujourd'hui.
Les années soixante nous offrent des spectacles
aussi divers que Le Malade imaginaire,
Les Coréens de Michel
Vinaver, M. Bonhomme et les Incendiaires,
Homme pour homme de Bertolt Brecht
(joué sous chapiteau place Bouvier), Oncle
Vania, l'exquise comédie de Tchékhov
dans laquelle nous avons eu le plaisir de voir Hélène
Vallier, sur de Marina Vlady. Nous devions la retrouver
dans Don Juan de Molière,
une des dernières pièces jouées à
Montbrison par la Comédie de Saint-Etienne.
Don Juan de Molière (31 décembre 1962)
II y eut aussi La Queue du diable
de Yves Jamiaque, La vie est un songe
de Calderon, sans oublier le dernier Labiche Un
Chapeau en paille d'Italie dans lequel les comédiens
firent preuve d'une vitalité débordante
Lorsque l'on songe à tout cela, on ne peut s'empêcher
de penser que Montbrison a eu beaucoup de chance d'être
choisi par Jean Dasté comme l'un des hauts lieux du
spectacle contemporain. Grâce à lui nous avons
connu une période d'enrichissement culturel et nous
lui en sommes reconnaissants.
Marguerite-V.
Fournier
(Village
de Forez, n° 36, octobre 1988)
Voir
aussi en ligne :
Dossier
: Hommage à Jean Dasté
par Claude Latta, Thérèse
Mascle, Marguerite Fournier, Jean
Dasté
(Village
de Forez, n° 36, octobre 1988)
Le théâtre municipal quand
il était dans l'aile gauche de la mairie
Album
Avant 1914
Carte postale de l'Avenir
Montbrisonnais :
le Théâtre populaire
Marzoa
(troupe itinérante ?)
1919
1922
1928
1930
1932-1939
1932
1933
1933
1936
1938
1962
questions,
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Mis
à jour le 4 octobre 2018
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