1874 : La chapelle des Pénitents
a failli devenir le marché aux poissons
La
chapelle des Pénitents de Montbrison, depuis quelques
décennies centre d'animation, a connu bien des avatars
depuis sa construction au 18e siècle. Sait-on qu'elle
a failli devenir un marché aux poissons ?
En 1874, les Pénitents sont à vendre. La chapelle
a déjà une longue histoire : siège de la
Confrérie des pénitents blancs jusqu'à
la Révolution, salle de réunions pour la préparation
des états généraux en 1789, vendue comme
bien national, rachetée en 1845 par les confrères
qui se reconstituent... Mais la confrérie s'est bientôt
dissoute.
"A vendre"
Le 2 novembre 1874, M. de Quirielle, maire de Montbrison, interroge
son conseil pour savoir s'il n'est pas opportun d'acheter la
chapelle qui, dit-il, "a un certain
prix par sa façade" et "un
intérêt historique et artistique",
en plus de l'honorable souvenir d'une vieille confrérie.
Quel est l'état de l'immeuble, il y a 125 ans ? "La
dimension du bâtiment est d'environ 380 m2 : 38 m de long
sur 10 de large... Il y a sous le chur une cave dont les
dimensions ne sont pas exactement connues, l'entrée en
étant bouchée ; il existe un escalier en pierre
jusqu'au premier étage ; la charpente riche en bois est
bonne... les murs du pourtour relativement modernes (400 ans
environ) paraissent assez bons quoique probablement construits
en pisé".
M. de Quirielle se trompe. Il prend la date inscrite sur la
façade (1591) pour l'année de construction de
la chapelle. C'est, en fait, celle de la fondation de la confrérie
à Montbrison. L'édifice n'a été
bâti qu'au 18e siècle, la façade datant
de 1762. Mais il est vrai que les murs sont solides. D'ailleurs,
ils tiennent encore !
Un marché couvert ?
Un marché couvert ?
M. le Maire pense que la vénérable chapelle pourrait
servir au "marché aux poissons et à la vente
à la criée de la viande et de la marée",
ce qui serait, dit-il, "une amélioration
au profit du consommateur local et des petits ménages".
Une commission présidée par le docteur Rey se
réunit d'urgence pour étudier la question.
Trop cher !
Elle rend son verdict le 13 novembre suivant : la création
d'un marché n'a rien d'urgent et on peut trouver "des
conditions d'emplacement et d'installation bien préférables".
Le budget de la ville étant
serré, les édiles abandonnent aussitôt le
projet. Deux affaires jugées plus importantes sont alors
à l'étude : agrandir la caserne pour loger plus
de soldats et, surtout, favoriser l'établissement
"d'une industrie considérable".
En effet, un certain M. Necker, fabricant de chapeaux, désire
s'installer à Montbrison et demande pour 30 ans la cession
du quai de la Porcherie depuis le pont St-Louis jusqu'au pont
d'Argent (dit d'Ecotay) afin d'y bâtir des ateliers.
Hélas ! - ou heureusement pour les eaux du Vizézy
- la chapellerie ne vint jamais et la caserne (aujourd'hui démolie)
resta en l'état. Quant à la pauvre chapelle, elle
fut, pour 90 ans encore, dans le domaine privé et subit
encore bien des outrages. Enfin, en 1965, elle fut acquise par
la Ville. Restaurée, elle servit un temps de local à
la M. J. C. avant de devenir le centre d'animation puis le théâtre
que nous connaissons...
Joseph Barou
(La Gazette du 20 juin 2002)
*
* *
Le
conseil municipal de Montbrison
et l'église des Pénitents
[séance du 2 novembre 1874, présidence de M.
de Quirielle, maire]
M.
le Maire donne lecture au Conseil de l'exposé suivant
sur l'état actuel de l'église des Pénitents,
son adjudication prochaine et sur les motifs qui pourraient
engager à acquérir cet immeuble au nom de la
ville pour l'affecter à un service public quelconque
et de préférence à l'établissement
d'un marché couvert. M. le Maire qui déclare
n'avoir aucun parti pris à cet égard dit :
Messieurs,
Vous savez tous l'adjudication prochaine de l'ancienne église
des Pénitents, je croirais manquer à mes devoirs
élémentaires si je ne vous saisissais pas en
temps opportun des questions municipales soulevées
par la vente de cet immeuble, questions qui doivent préoccuper
votre maire et qui méritent sans doute la sollicitude
des représentants de la cité, administrateurs
de ses deniers.
Dans
la conservation de ce petit monument qui a un certain prix
par sa façade, il y a d'abord un intérêt
historique et artistique, le souvenir d'une corporation qui
a eu à Montbrison, jusqu'à ces derniers temps,
de trop longues et trop vives sympathies pour être absolument
oubliée et indifférente aujourd'hui, mais je
n'ai point à vous entretenir sérieusement de
cet intérêt, que je ne fais qu'indiquer l'abandon
à votre appréciation.
Je
dois me renfermer dans la limite des intérêts
purement municipaux sans intervention des sentiments ou des
préoccupations d'un autre ordre. C'est sur ce terrain
qu'il est de mon devoir de vous poser une série de
questions pratiques en vous fournissant les données
qu'il m'est possible de recueillir pour éclairer vos
réponses. Je les provoque en me désintéressant
du parti que vous adopterez pour être l'instrument de
vos résolutions.
Ainsi donc ne considérant le monument dont il agit
que comme un local possible pour un service public je vous
demande; croyez-vous :
1° Qu'il y ait là un bâtiment ou un emplacement
utilisables ?
2° Qu'il y ait aujourd'hui une occasion de se procurer
ce local à des conditions avantageuses ;
3°
Que nous puissions courir les chances et accepter les charges
qui seraient les conséquences de cette opération.
Comme
document correspondant à la première question
je dois dire un mot sur l'importance et l'état de l'immeuble
: La dimension du bâtiment est
d'environ 380 mètres carrés composés
par 38 mètres de long sur 10 de large et la surface
totale est à peu près de 560 mètres.
Il y a sous le chur une cave dont les dimensions ne
sont pas exactement connues, l'entrée en étant
bouchée ; il existe un escalier en pierre jusqu'au
premier étage; la charpente riche en bois est bonne.
Je ne dis rien de l'état de la façade qui vous
est familière à tous, les murs du pourtour relativement
modernes (400 ans environ) paraissent assez bons quoique probablement
construits en pisé.
Dans ces conditions quel parti la ville pourrait-elle tirer
de cet ensemble ?
L'idée la plus naturelle est celle d'un marché
couvert destiné à abriter une partie de la vente
des denrées alimentaires qui encombrent quelques points
voisins et à permettre l'installation de certaines
branches du commerce de consommation incomplètes ou
inconnues à Montbrison comme le marché aux poissons
et à la vente à la criée de la viande
et de la marée, en un mot le but à réaliser
pourrait être une amélioration toute au profit
du consommateur local et des petits ménages qui dans
l'état actuel sont peut-être sacrifiés
par les habitudes d'un marché important bien alimenté
mais absorbé par son principal écoulement qui
est l'exportation.
Je n'ai nullement l'idée ni la possibilité de
traiter les détails d'une entreprise complexe et passablement
imprévue et ne prétend point pousser plus loin
ces indications sommaires, la solution de cette première
question étant indépendante des deux autres,
c'est-à-dire, de l'opportunité et de la possibilité,
mais pour celle-ci, le développement m'est encore plus
interdit, l'étude complète et raisonnée
étant prématurée aujourd'hui. Je veux
seulement vous dire un mot relativement aux voies et moyens
qui s'appliquera aussi aux autre dont je vais vous parler
tout à l'heure, je crois possible la création
de nouvelles ressources et par conséquent l'ouverture
faite à un nouvel emprunt an moyen d'une révision
du tarif de l'octroi, qui précisément doit être
renouvelée à la fin de cette année. Mais
aujourd'hui, et sans qu'il me fut possible de me préparer
à ces éventualités les décisions
s'imposent, à vous donc de voir s'il vous convient
de donner un mandat pour représenter la ville au mieux
de ses intérêts dans l'adjudication du 14 novembre
à la municipalité assistée d'une Commission,
et aussi je n'en doute pas du notaire de la ville, sans oublier
les précautions indispensables de prudence et de discrétion
ainsi que le danger d'ébruiter une discussion de chiffre.
Après
en avoir entendu lecture, le Conseil, délibère
sur la proposition contenue dans l'exposé et attendu
son importance décide qu'une commission composée
de MM. Chaize, Reymond, Levet, Bouvier et Rey, est chargée
de l'étude de cette question. La Commission devra se
réunir, vue l'urgence, le vendredi 6 novembre, à
une heure précise du soir.
A
propos de l'acquisition possible de l'église
des Pénitents
[séance
du 13 novembre 1874, présidence de M. de Quirielle,
maire]
RAPPORT DE LA COMMISSION
La
parole est donnée à M. Rey pour le rapport à
faire au nom de la Commission chargé de l'examen d'une
proposition ayant pour objet l'acquisition de l'ancienne église
des Pénitents à Montbrison.
M.
le rapporteur s'exprime ainsi :
Messieurs,
"
Dans la séance du 2 novembre courant, vous avez chargé
une Commission composée de MM. Chaize, Levet, Bouvier,
Reymond et Rey, de rechercher s'il y aurait avantage pour
la ville à acquérir l'ancienne église
des Pénitents, dont la vente est très prochaine,
pour l'approprier à un usage public et spécialement
à un marché couvert. Cette Commission s'est
rendue sur les lieux vendredi dernier, et elle a acquis la
conviction après avoir visité le bâtiment
dans toutes ses parties, que son état actuel ne permettait
pas de lui donner la destination d'un marché couvert
sans une dépense relativement considérable à
ajouter au prix d'acquisition. La création de ce marché
n'ayant pas un caractère d'urgence, et pouvant être
ajournée pour être exécutée ultérieurement
dans des conditions d'emplacement et d'installation bien préférables,
la Commission en présence de la situation financière
de la ville et des questions importantes qui sont en ce moment
à l'étude soit pour favoriser l'établissement
d'une industrie considérable, soit pour obtenir l'élévation
du chiffre de notre garnison, vous propose à l'unanimité
le rejet de ce projet d'acquisition.
Montbrison, 6 novembre 1874.
Le rapporteur,
Signé:
Dr Rey
Le
Conseil à l'unanimité adopte l'avis de sa mission
et dit qu'il n'y a pas lieu de donner suite au projet dont
il s'agit.
*
* *
La
construction de la façade
de la chapelle des Pénitents
de Montbrison
Communication
à la Diana de M. Joseph
Barou
Les pénitents du Confalon
Du Moyen Age à la fin
de l'Ancien Régime, et particulièrement après
le concile de Trente, les confréries de pénitents
se sont multipliées : Pénitents gris, Pénitents
blancs, Pénitents noirs, Pénitents rouges, Pénitents
violets, Pénitents bleus, Pénitents de la Miséricorde
(1)... Des chrétiens pieux cherchaient ensemble, avec
une certaine ostentation, par la prière et la pratique
de la charité, à assurer leur salut et à
sanctifier toute l'Eglise (2). Parmi ces multiples groupements,
les Pénitents du Confalon, à la robe blanche,
tiennent une place de choix à Lyon et en Forez.
La confrérie des Pénitents de Notre-Dame du Confalon
s'était constituée à Rome en 1264 avec,
comme premier directeur, un disciple de saint François,
saint Bonaventure (3). Le pape Clément IV approuva la
confrérie par sa bulle de 1265.
Les Pénitents du Confalon de Lyon revendiquaient le même
fondateur et une ancienneté presque égale à
la confrérie romaine puisque l'on peut lire dans la notice
historique annexée à leurs statuts (4) que : "La
royale et dévote compagnie des pénitens blancs
de Notre-Dame du Confalon de la ville de Lyon" a été
aussi fondée par saint Bonaventure, religieux franciscain
venu assister au deuxième concile de Lyon, en 1274. Elle
avait été instituée, tout naturellement,
dans le couvent des Cordeliers de Lyon.
Cette première association disparut et ne se reconstitua
qu'en 1576, après le départ des Calvinistes de
Lyon. Elle fut alors agrégée, en 1578, à
l'archiconfrérie des Pénitents du Confalon de
Rome et approuvée par une bulle du pape Grégoire
XIII en 1583. Elle regroupait alors tous les personnages importants
de Lyon, dont M. de Neuville-Villeroi, gouverneur du Lyonnais,
Forez et Beaujolais.
Les Pénitents du Confalon furent institués en
1583, à Paris, dans le cloître des Grands-Augustins
à l'instigation du roi Henri III qui en devint le premier
recteur (5).
La chapelle des Pénitents
de Montbrison
A l'imitation de ce qui se passait à Lyon, la confrérie
fut établie à Montbrison le 16 juin 1591 par Anne
d'Urfé, lieutenant général du Forez, dans
la chapelle du couvent des Cordeliers de la ville. Après
1731, elle s'installa dans une chapelle indépendante,
probablement à la suite de l'incendie qui ravagea le
couvent cette année-là. L'édifice, à
l'origine assez modeste, fut ensuite agrandi. On reconnaît
que la façade, de style classique, a un certain mérite.
Parfois elle a été attribuée à Soufflot
(6), mais sans véritable preuve (7).
Les archives de la Diana possèdent un document intéressant
qui nous permet de préciser la date des travaux d'agrandissement
de la chapelle et donc de la construction de la façade.
Il s'agit d'un "Prix fait du devant de la chapelle de Messieurs
les Pénitens" daté du 20 août 1762
et rédigé par Barrieu et Bernard, notaires royaux
à Montbrison (8). Ce texte complète ce qui a déjà
été écrit au sujet du monument par Auguste
Broutin (9), Dom Renon (10), l'abbé Rochigneux (11),
Marguerite Fournier (12) et, plus récemment Francisque
Ferret (13).
Souhaitant agrandir leur chapelle, les officiers de la confrérie
(14) s'adressent au "sieur Joseph Linossier, architecte
et entrepreneur, demeurant en la ville de Lyon". Ce dernier
avait-il un lien quelconque avec Soufflot ? Cette question reste,
pour l'instant, sans réponse. Il est sûr, cependant,
que le grand architecte a influencé fortement toute une
génération d'architectes, particulièrement
à Lyon où il a beaucoup travaillé et formé
de nombreux élèves.
Il semble que les recteurs aient déjà ouvert le
chantier avant de faire appel à l'entrepreneur lyonnais
puisqu'il demande à celui-ci de reprendre à son
compte les "traittés et conventions" déjà
passés avec "les nommés Baret et Granger,
tailleurs de pierre à Moingt" et "les nommés
Laurent et Sol, marchands de bois demeurant en la parroisse
de Bard". De plus les recteurs abandonnent au sieur Linossier
des matériaux déjà entreposés devant
la chapelle et "consistant en chaux, sable, pierre brutte
et de taille" ainsi qu'une certaine quantité de
pierre taillée destinée au portail et se trouvant
"encore entre les mains de l'ouvrier à St-Etienne".
Une construction nouvelle d'une dizaine de mètres, "trente-quatre
pieds hors d'oeuvre", est prévue à l'avant
de la nef déjà construite. Dans cette partie se
trouvera la tribune et, derrière celle-ci, deux "habilloirs"
superposés. C'est dans ces salles, au premier et au second
étage, que les confrères revêtaient la cagoule
et la robe de laine blanche indispensables pour participer aux
cérémonies de la société. Pour accéder
aux habilloirs, à la tribune et au clocher, un escalier
sera bâti "du costé de midy de la façade
de l'église dans la maison acquise de la Maligot".
Ce "degré" devra être construit avec
deux rampes et deux paliers, en pierre jusqu'au premier habilloir,
en bois de chêne jusqu'au second. Pour cet aménagement,
une maison au moins a donc été achetée
puis modifiée ou démolie au sud de l'église.
Le plan de l'agrandissement
et le dessin de la façade sont fournis par le sieur Linossier
toutefois les recteurs demandent quelques modifications :
¨ "Au lieu d'une gloire qui est à l'attique
dudit plan au dessus il y sera placé les armoiries de
la confrérie en pierres blanches de Savoye". Ce
qui a été fait.
¨ Les deux colonnes de chaque côté de la porte
seront chacune d'une seule pièce jusqu'au chapiteau.
Après la restauration des années soixante, on
retrouve ces colonnes mais elles ne sont plus monolithiques.
¨ "Les deux niches ou enfoncements a costé de
laditte porte seront conformes au dessein et les deux statuës
seront en pierre blanche de Savoye (et) formeront la meme figure
du dessein et seront de la hauteur au moins de cinq pieds chacunes".
Rien ne permet de dire que ces statues aient été
effectivement réalisées et installées.
Plus curieusement le document précise que "les deux
clochers auront dix-huit pieds de hauteur hors de la corniche
et seront en pierre de taille" or un seul clocher a été
réalisé. Joseph Linossier devra monter la cloche
et se chargera aussi du pavage de la nouvelle partie de l'église.
Il "parbattra et blanchira au pinceau tous les murs de
la nouvelle construction et raccomodera et bouchera plusieurs
trous qui sont aux murs de ladite église tant en dedans
qu'en dehors ainsi que les escailleures de la voute de laditte
ancienne église". Cette dernière précision
semble bien indiquer que l'état de la chapelle déjà
existante est assez médiocre ce qui pose la question
de sa date de construction : après ou avant 1731. Après
leur départ du couvent des Cordeliers les confrères
n'ont-ils pas utilisé un bâtiment déjà
ancien qui avait précédemment une autre affectation
?
L'ensemble de ces travaux coûtera la coquette somme de
2 400 livres, payable en trois fois, au début, à
la moitié et à la fin des travaux prévu
pour les fêtes de Noël 1762. C'est incontestablement
une période de prospérité que connaît
alors la confrérie puisque dans le même temps elle
fait réaliser les toiles peintes décorant entièrement
sa chapelle (15), un ensemble qui, malheureusement, n'est plus
en place.
*
* *
Les recteurs eurent sans doute quelque peine à mener
à bien leur entreprise et durent faire des modifications
au projet initial. Le résultat fut l'élégante
façade qui nous reste et que nous pouvons désormais
dater avec précision. C'est d'ailleurs là le principal
intérêt du "Prix fait du devant de la chapelle
de Messieurs les Pénitents" que possèdent
les archives de la Diana.
Annexe
Prix
fait du devant de la chapelle
de Mrs les Pénitens
du 20 aoust 1762
Devis estimatif ou prix fait pour la façade de la
chapelle de la societté de Messieurs les Confalons de
Montbrison augmentation et autres constructions a faire dans
laditte chapelle ainsy qu'elles sont cy après expliquées.
Premierement le plan remis par sieur Joseph Linossier maitre
entrepreneur de la ville de Lyon serat parraphé tant
par les sieurs officiers de lad. societté que par ledit
sieur Linossier et ycelluy restera au pouvoir desd. sieurs officiers
pour etre executé suivant sa forme et tenneur et a la
forme du present devis.
Au lieu d'une gloire (16) qui est a l'attique (17)
dudit plan au dessus il y sera placé les armoiries de
la confrerie en pierres blanches de Savoye.
Les fondations seront creusées jusques au ferme et auront
cinq pieds sept pouces de largeur dans l'endroit des pilliers
de la porte et trois pieds huit pouces dans le courant du mur
jusques aux enchants (19), et la sortie des enchants
(18) deux pieds et six pouces.
A l'égard des fondations des murs des costés de
bise et midy, elles seront faittes de la meme proffondeur et
espaisseur que celles qui sont desjea commencées.
Seront lesdits murs et fondations poussées en avant de
la chapelle actuelle de trente quatre pieds hors d'oeuvre quoique
le dessein n'en donne que dix neuf.
Le sol aura deux pieds et demy d'hauteur hors terre et un pouce
et demy de salie (20) à la forme du plan ou dessein.
La porte sera en bois chesne doublée meme bois, les panneaux
conformes aux desseins et en menuiserie, l'imposte (21)
audessus de laditte porte en sculpture meme bois et ferré
sur piveau.
Les deux colonnes de chaque costé de lad. porte seront
chacunes d'une seule piece jusques au chapitau de la grosseur
et longueur proportionnées au dessein.
Les deux niches ou enfoncements a costé de laditte
porte seront conformes au dessein et les deux statües seront
en pierre blanche de Savoye, formeront la meme figure du dessein
et seront de la hauteur au moins de cinq pieds chacunes.
Il y aura audessus desdittes niches une claire vüe de chaque
costé vitrées et barrées.
Les guirlandes autour de la porte seront aussy en pierre blanche
de Savoye.
Les rustiques seront en pierre de taille d'un pied et demy au
moins d'épaisseur entrelassées de quelques unes
d'un pied sans pouvoir en placer en gros de mur de moindre épaisseur
que de neuf pouces.
La corniche ainsy que toutte la façadde sera en pierre
de taille sans aucune batisse et conforme au dessein.
Le plancher audessus sera en bois pin bien et duement carrellé
ainsy que la tribune et habilloir de façon que le tout
soit solidde et bien garny en pieces et en chevrons.
Les enchants des portes tant pour aller a la tribune qu'aux
habilloirs (22) seront en pierre de taille et les portes
en bois pin menuiserie et doublées avec leurs ferrures
et serrures sortables ainsy que la porte cy-dessus.
Les deux habilloirs seront proportionnés a la hauteur
du plaffon ou voute de l'église et auront au moins neuf
pieds de haut sur le carrelage.
Le degré (23) pour aller tant a la tribune qu'aux
habilloirs et de la au clocher serat pris a l'enchant du costé
de midy de la façade de l'église dans la maison
acquise de la Maligot serat fait a deux rampes et deux palliers
celluy pour aller a la tribune et au premier habilloir serat
en pierre de taille les marches d'une seule pièce de
quatre pieds et demy de longueur, de six pouces d'hauteur sur
quatorze pouces de foulure et les rampes extremement douces,
le surplus dudict degré serat continué en bois
chesne aussy a deux rampes jusques au second habilloir et de
la meme grandeur et longueur carrellé en dedans et du
second habilloir jusques au closcher par une seule rampe et
fait un mur a pierre et a chaux pour supporter lesdits degrés.
Les portes qui communiquent des habilloirs et de la tribune
dans l'église seront bouchées a gros de mur et
il en serat pratiqué dans l'endroit qui serat indiqué
a l'entrepreneur en pierre de taille bois pin doublées
en menuiserie avec ferrures et serrures necessaires et de la
hauteur et largeur qui sera indiquée.
Les vitraux des habilloirs auront huit pieds de haut dans oeuvre,
seront en pierre de taille a gros de mur et de quatre pieds
de large, les dormants le chassis en bois de chesne de deux
pouces d'épaisseur, les espagnolettes en fer et les vitres
de neuf a dix pouces en quarré.
Le sol pour élever lesdits vitreaux serat de deux pieds
en pierre de taille a la forme du dessein avec l'architecture
qui y est expliquée et la sculpture serat en pierre blanche
de Savoye ainsy que les figures et urnes qui seront de la grosseur
et hauteur proportionnées aud. dessein.
Les deux clochers (24) auront dix huit pieds d'hauteur
hors de la corniche, seront en pierre de taille ainsy que les
fenestres a huit pans, la charpente audessus du cordon serat
faitte en bois sapin couverte a thuile a crochet et le pied
d'estal serat couvert en fer blanc peint a l'huile et a la seruse
ainsy que tout le reste de la sculpture.
La tribune serat supportée par quatre colonnes en pierre
de taille chacune d'une seule piece lesquelles seront posées
sur une hauteur d'appuy de deux pieds et huit pouces de haut
sur un pied et demy de large qui sera pratiqué tout en
pierre de taille audessous de laditte tribune conforme au dessein
et au contour de la tribune au millieu duquel hauteur d'appuy
il serat laissé un vuide et hauteur de huit pieds de
large. La couverture dudit hauteur d'appuy serat en pierre de
taille et ledessous de laditte tribune serat en voute casse
ainsy que le dessus de laditte tribune.
Le couvert (25) de la nouvelle construction serat a deux
égouts des costés de bise et midy et a la genoise
ou en cordon de pierre, et serat posé un chaneau en fer
blanc au couvert du costé de midy.
Il serat fait a chaque habilloir du costé de midy seulement
une fenestre en pierre de taille de huit pieds de haut sur quatre
de large dans oeuvre le cadre et chassis en bois chesne vitrée.
Les galandages pour separer la tribune et les habilloirs auront
demy pied d'épaisseur au moins seront garnis parbattus
et continués jusques au couvert.
Serat tennu l'entrepreneur de monter la cloche dans le clocher
et faire en bois chesne la charpante necessaire pour le support
de la cloche.
Serat tennu aussy de carreller et cadetter (26) le
bas de l'église dans tout l'avancement qui doit être
fait et le rendre conforme et uniforme a celluy de l'ancienne
église.
Parbattra et blanchira au pinceau tous les murs de la nouvelle
construction et raccomodera et bouchera plusieurs trous qui
sont aux murs de lad. église tant en dedans qu'en dehors
ainsi que les escailleures de la voute de laditte ancienne église.
Fera enlever tous les decombres et materiaux qu'il pourrat y
avoir après la perfection de son ouvrage.
Et comme il doit mettre a bas le mur de face de l'église
actuelle, il aura soin de le faire sans endommager les autres
murs de costé ainsy que la voute et le plancher et ou
par quelques accidents ou par sa faute la voute ou les murs
seroient endommagés il sera tennu de le reparer a ses
fraix et de le mettre en bon etat.
Fournira l'entreprenneur tous les materiaux necessaires pour
laditte construction tant en bois, pierre, ferrures, ferts,
serrures, cloux, thuiles, carreaux, chaux, sable, verre, fert
blanc et generallement tout ce qui sera necessaire pour rendre
l'ouvrage fait et parfait.
Donnera aussi l'entrepreneur aux degrés toutte la clarté
et le jour necessaire et qu'il pourra procurer.
Pardevant les notaires royaux a Montbrison soussignés
et en présence des temoins après nommés
sont comparus Me Jacques François Ardaillon, procureur
es cours de Forest recteur de la societté de Messieurs
les Pénitents du Confalon de cette ville, Me Barthelemy
Morel notaire royal, vice recteur (27), noble Guillaume
Gayot avocat en parlement, premier maître de ceremonie,
sieur Jacques Bourgeade, marchand, second maître de ceremonie
(28), Me Paul Fayol de la Bruyère procureur es
cours de forest et Geoffroy Gras tous deux sacristains (29),
sieurs Denys Goutallier et Claude Tissier tresoriers et receveurs
(30) tous deux demeurants en cette ville de Montbrison.
Lesquels de leurs grés auxdittes qualités en exécution
de la deliberation de Messieurs les confrères pénitents
du Confalon de cette ville en datte de cejourd'huy couchée
sur le registre des délibérations de laditte confrerie
folio vingt quatre verso ont donnés a prix fait a sieur
Joseph Linossier architecte et entrepreneur demeurant en la
ville de Lyon de present en cette ville present et acceptant
la reconstruction du devant ou façade de la chapelle
du Confalon a la forme des plans terrestres et d'élevation
par luy donnés et parraphés par les partyes fait
double entre elles et ce conformement tant auxdits plans qu'aux
devis des dittes reparations et constructions cy dessus écrits
et aux restrictions et augmentations y contennües.
Lequel dit sieur Linossier promet et s'oblige de faire tous
lesdits ouvrages ainsy qu'ils sont demontrés et expliqués
dans les susdits plans et devis et de rendre le tout fait et
parfait suivant l'art aux festes de noel prochaines et de fournir
a cet effet tous les materiaux necessaires pour laditte construction
de quelques natures et especes qu'ils soient.
Le present prix fait fait et donné moyennant le prix
et somme de deux milles quatre cent livres et empardessus le
susdit prix lesdits sieurs comparants ont des a present abbandonnés
audit sieur Linossier tous les materiaux etant actuellement
audevant de laditte chapelle et qui devoient servir aux reparations
et constructions cydevant énoncées consistant
en chaux, sable, pierre brutte et de taille, et au surplus de
la pierre de taille qui devoit former le portail d'entrée
de laditte chapelle qui est encore entre les mains de l'ouvrier
a St-Etienne de tous lesquels materieux que les partyes ont
amiablement reglées et evaluées a la somme de
sept cent livres.
Ledit sieur Linossier pourrat se servir et employer ainsy qu'il
verra bon estre en tennant des a present quitte lesdits sieurs
officiers a la charge par luy d'entretenir les traittés
et conventions faittes par les receveurs et trésoriers
de laditte confrerie avec les marchands de bois et tailleurs
de pierre desquels on luy a donné une parfaitte connoissance
et remis les doubles faits entre lesdits sieurs tresoriers et
les nommés Baret (et) Granger tailleurs de pierre a Moingt
et Laurent et Sol marchands de bois demeurant en la parroisse
de Bard promettant ledit sieur Linossier de garentir lesdits
sieurs officiers de touttes recherches de la part desdits tailleurs
de pierre et marchands de bois a raison desdits marchés
et conventions et de les en garentir et indemniser et de leur
tenir compte des sommes par eux payées auxdits tailleurs
de pierre et marchands de bois a compte des marchés entre
eux faits montant ensemble la somme de soixante-dix neuf livres
quatre sols.
De laquelle somme de deux milles quatre cent livres prix du
present prix fait lesdits officiers promettent en payer scavoir
la somme de huit cent livres a la premiere volonté et
requette dudit sieur Linossier a la charge par luy de donner
prealablement bonne et suffisante caution pour l'execution du
present prix fait, la somme de huit cent livres lorsqu'il aurat
fait la moityé de l'ouvrage porté par ledit devis
et present prix fait et pareille somme de huit cent livres a
la fin perfection et reception de tous lesdits ouvrages, et
après que visite en aurat été faitte par
experts choisis a l'amiable entre les partyes et ou ledit sieur
Linossier seroit en demeure de donner laditte caution convennu
entre les partyes et par clause expresse que laditte somme de
deux milles quatre cent livres ne luy sera payée scavoir
que six cent livres lorsqu'il aura fait la moityé de
l'ouvrage, celle de huit cent livres aux trois quarts desdits
ouvrages et la somme de mille livres lors de la perfection d'iceux
et après comme sus escrit que visite et reception en
aura eté faitte.
Sur laquelle somme lesdits sieurs officiers se retiendront neantmoins
la susditte somme de soixante dix neuf livres quatre sols pour
avances faittes comme sus escrit.
Convennu aussy entre les partyes et par clauses expresses
que ou ledit sieur Linossier après avoir commencé
ledit ouvrage l'abbandonneroit et ne le conduiroit pas a sa
perfection il ne pourra rien exiger de tout ce qui se trouvera
avoir été fait non plus que des materiaux qu'il
auroit pu fournir, consentant que le tout demeure et appartienne
a laditte confrerie pour leur tenir lieu de dommages et interests
qu'ils seroient en droit de luy demander.
Tous les vieux materiaux qui proviendront de la demolition du
mur de face de laditte chapelle, de la tribune et du mur du
coté de midi dont ledit sieur Linossier est tennu appartiendront
a ce dernier, qui pourrat encore se servir de tous les vieux
materiaux en bois qui sont au devant de laditte chapelle soit
pour etayer ou chafauder (31) lesquels il sera tennu
de laisser a fin d'ouvrage.
Ainsy convennu accepté et promis executer entre lesdittes
partyes a peine de tous depends dommages et interests, promettant
obligeant soumettant renonceant.
Fait et passé a Montbrison etudes le vingt aoust mil
sept cent soixante deux en presence de sr Jean Vidal maître
tailleur d'habits et de sieur Martin Girinat maître cellier
(32) temoins demeurant audit Montbrison qui ont signés
avec les partyes.
Linocier
Ardaillon Morel Gayot
recteur
Gras Bourgeade Goutalier Tissier Curtil
Barrieu Bernard
Controllé a montbrison le 2e 7e 1762
reçu vingt livres
(signature illisible) grace faite de vingt sols pour ma remise
(signature illisible)
(1) C'étaient les sept
confréries de pénitents établies dans la
ville d'Avignon.
(2) Cf. à ce sujet l'ouvrage d'Anne-Marie Gutton, Confréries
et dévotion sous l'Ancien Régime : Lyonnais, Forez,
Beaujolais.
(3) Bonaventure (1221-1274, le "docteur séraphique",
né à Bagnoregio, en Toscane, fut supérieur
général des Franciscains, auteur d'ouvrages de
théologie, cardinal et légat du papa au concile
de Lyon.
(4) Cf. la notice insérée dans l'ouvrage intitulé
: Statuts et Reglemens des Pénitens Blancs de Notre Dame
du Confalon de Lyon, Lyon 1730, bibl. de la Diana.
(5) Ibid.
(6) Jacques-Germain Soufflot, né en 1713 à Trancy
5yonne), mort en 1780 à Paris, travailla de nombreuses
années à Lyon entre 1738 et 1755.
(7) Selon René Jullian, professeur à la Sorbonne,
"l'église des Pénitents, édifiée
après le milieu du siècle, montre une façade
dans le goût de Soufflot" (Visage du Lyonnais, Horizon
de France, 1967, p. 135). Gabriel Brassart pensait, lui aussi,
qu'elle était digne du grand architecte et faisait remarquer
qu'elle a été bâtie sur le terrain d'un
sieur Rater qui, vers 1750, aurait été associé
à Soufflot pour des opérations immobilières
dans le quartier Saint-Clair à Lyon (Montbrison, aperçu
historique). C'est précisément dans ce quartier
que Loyer, Munet et Morand, tous trois élèves
de Soufflot, exercèrent leurs talents.
(8) Cet acte nous a été signalé par M.
Jean Guillot qu'il nous est agréable de remercier.
(9) Auguste Broutin, Les Couvents de Montbrison, Saint-Etienne,
1876.
(10) F. Renon, Chronique de Notre-Dame d'Espérance de
Montbrison, Roanne, 1847, p. 219.
(11) Claudius Rochigneux, Le Forez de nos ancêtres, Montbrison,
1984, p. 53-54.
(12) Marguerite Fournier-Néel, Montbrison, coeur du Forez,
p. 83-84.
(13) Francisque Ferret : A propos de la chapelle des Pénitents
de Montbrison, Bulletin Diana, année 1968, tome XL, n°
5, p. 199-215.
(14) Me Jacques François Ardaillon, procureur es cours
de Forez, recteur, Barthélémy Morel, notaire royal,
vice-recteur, noble Guillaume Gayot, avocat en Parlement, premier
maître de cérémonie, sieur Jacques Bourgeade,
marchand, second maître de cérémonie, Me
Paul Fayol de la Bruyère, procureur es cours de Forez
et Geoffroy Gras, tous deux sacristains, sieur Denys Goutallier
et Claude Tissier, trésoriers et receveurs.
(15) Cf. la communication de Claude Latta, Les toiles peintes
provenant de la chapelle des Pénitents de Montbrison,
et conservées à Fribourg et à Bulle (Suisse),
communication du 26 mars 1994.
(16) Représentation du ciel ouvert avec Dieu et les anges.
(17) En architecture, il s'agit d'un petit étage supérieur
pour orner ou dissimuler le toit.
(18) Montants de la porte.
(19) L'allongement de la nef est donc d'environ 10 m.
(20) De saillie
(21) Partie de la porte qui se situe au-dessus des deux battants.
(22) Lieu où les pénitents enfilaient leur robe
blanche ou "sac" portant sur l'épaule droite
l'écusson de la compagnie. Les confrères de Lyon
s'habillaient dans le cloître voisin de leur chapelle
et chacun disposait d'une garde-robe.
(23) Escalier.
(24) Un seul clocher a finalement été réalisé.
(25) Le toit.
(26) Les cadettes sont de petites dalles de pierre.
(27) Le recteur et le vice-recteur de la confrérie étaient
élus pour un an ; les recteurs et vice-recteurs "anciens"
formaient avec des confrères élus le conseil de
la confrérie.
(28) La confrérie de Lyon, plus importante, a un "grand
custode ou maître de choeur" qui a comme adjoints
les maîtres des cérémonies qui ont comme
charge de régler l'office avec "vigilance, modestie
et application", leur attribut est une canne.
(29) Les sacristains ont soin de tout ce qui appartient à
la chapelle : meubles, argenterie, linge et ornements ; ils
font les quêtes et distribuent les aumônes. A Lyon,
il y a 6 sacristains.
(30) La confrérie du Confalon de Lyon distingue quatre
officiers ayant ce titre : le trésorier général,
le trésorier général adjoint, le trésorier
particulier et le trésorier particulier adjoint. D'autres
charges ne sont pas représentées à Montbrison
: Procureur, Secrétaire, Concierge, Portier...
(31) Echafauder.
(32) Maître sellier.
Communication
de M. Joseph Barou
Bulletin
de la Diana, tome LIV,1994,
pages 101-113
Sceau
des Pénitents
du Confalon
*
* *
La
chapelle des Pénitents
de Montbrison pendant la Révolution
Commentaire
de Claude Latta
pour écouter cliquer ci-dessous
(7 min 34 s)
*
* *
Les
peintures de la chapelle des Pénitents
retrouvées en Suisse
La Tribune-Le
Progrès du 23 mai 1994 [p. 8]
(article
non signé)
L'ancienne
chapelle des Pénitents de Montbrison, dont la façade,
magnifiquement restaurée, représente un sujet
de fierté pour la ville, est généralement
attribuée au célèbre architecte Soufflot.
Cette confrérie, instituée en 1591 dans la ville,
était composée de laïcs pieux qui s'astreignaient
à des exercices de pénitence, participaient aux
cérémonies et processions, procédaient
à l'ensevelissement des morts. Les Pénitents du
Confalon s'adonnaient au culte marial, et la chapelle possédait
treize toiles de grand format représentant des scènes
de la vie de la Vierge Marie. Ces uvres d'art ont été
mentionnées pour la dernière fois le 2 mars 1803,
dans l'inventaire de la sacristie de Notre-Dame d'Espérance,
suite au Concordat. Et, depuis cette date, aucune trace de ces
éléments de notre patrimoine n'avait été
mentionnée.
Fin août 1993, la visite d'un historien suisse, M. Ivan
Andrey, rédacteur du recensement du patrimoine religieux
du canton de Fribourg, apprenait aux chercheurs de la Diana
que sept de ces toiles se trouvaient à Fribourg : quatre
au collège Saint-Michel et trois dans l'église
du Christ-Roi. M. Andrey a remis à la bibliothèque
de la Diana le mémoire de fin d'études (en allemand)
de Mme Monika Danneger sur ces toiles.
M. Claude Latta, historien montbrisonnais, s'est passionné
pour cette importante découverte ; il a traduit l'ouvrage
puis est allé à Fribourg, début mars 1994,
avec son épouse, pour voir les uvres d'art. Ces
recherches et déplacement ont permis à M. Latta
de rédiger un texte de communication qui a été
présenté aux membres de la Diana lors de l'assemblée
générale de printemps.
Une date : 1760
En arrivant à Fribourg, M. et Mme Latta apprenaient que
deux nouvelles toiles avaient été découvertes
: elles se trouvent dans les réserves du musée
gruérien de Bulle. Quatre toiles étaient en cours
de restauration, dans l'école des Arts appliqués
de Berne. M. Latta confie l'émotion qu'il a ressentie
en les découvrant : Nous étions les premiers
Montbrisonnais à voir ces toiles disparues de la chapelle
des Pénitents depuis deux siècles.
Les neufs toiles sont en lin, formées de trois lés
cousus ; chacune d'elle mesure 2,50 m x 3,80 m. Dans la chapelle,
elles étaient placées entre les vitraux. Elles
étaient peintes à la détrempe et étaient
bordées par une peinture en trompe-l'oeil imitant un
cadre.
Ces toiles ont été identifiées facilement
comme venant de la chapelle des Pénitents de Montbrison
puisque, dans leur partie inférieure, elles portent un
cartouche : au centre se trouve une croix avec un montant vertical
rouge et un montant horizontal blanc, tous deux terminés
en forme de tulipe. Sur le cercle blanc, qui entoure la croix,
se trouve l'inscription "Societas Confalonis Montbrisonis".
En dessous du cartouche se trouve la date 1760.
Des Foréziens réfugiés
à Fribourg
Les neuf toiles retrouvées dans la région de Fribourg
représentent successivement : "La naissance de Marie",
"La Visitation", "L'Assomption", "Les
Pénitents et la Trinité" (toutes quatre au
collège Saint-Michel) ; "Le mariage de Marie et
Joseph", "L'adoration des Mages", "La fuite
en Egypte" (toutes trois dans l'église du Christ-Roi)
; "L'Annonciation", "La présentation de
la Vierge au Temple" (toutes deux dans les réserves
du musée gruérien).
En historien, M. Latta a cherché à savoir comment
des uvres d'art sont parvenues à Fribourg. Il suppose
que c'est l'abbé Populus, curé de Notre Dame à
partir de 1803, qui aurait pu les vendre pour financer les nombreux
travaux de restauration de la collégiale.
Il explique la destination de Fribourg par le fait que cette
ville était un fief catholique, "le centre de ralliement
des réfugiés français en Suisse" pendant
la Révolution. Des Foréziens y ont vécu
; M. Latta énumère, d'après une liste établie
en 1884 par un membre de la Diana : le comte d'Apchon, M. de
Champagny, le comte Pierre de Morges et son fils Charles ; la
comtesse de Rostaing, le chevalier de Tardy et M. de Tardy,
le comte et la comtesse du Lieu de Chenevoux.
Certains Foréziens y ont même fait souche : il
y avait à Fribourg, entre 1789 et 1800, un milieu social
qui mêlait nobles et notables suisses et français
dans la petite ville patricienne et catholique. On se recevait
sans doute dans les mêmes salons, on allait à ta
messe à la cathédrale Saint-Nicolas et des mariages
franco-suisses établis eurent lieu.
Projet d'exposition
M. Latta espère bien que de nouvelles informations seront
accessibles, permettant de connaître plus précisément
l'histoire de ces toiles. Il parle même, comme cela a
été évoqué lors de l'entrevue entre
M. Etienne Desfonds, adjoint au maire, et M. Andrey, de l'éventualité
d'une exposition de ces toiles, après restauration, dans
la chapelle même des Pénitents. Il entreprend d'autres
recherches pour retrouver la trace des quatre toiles manquantes.
Les neuf toiles retrouvées représentent à
elles seules un trésor d'informations. L'une est très
intéressante pour les Montbrisonnais : celle qui montre
les Pénitents en adoration devant la Trinité ;
ils sont représentés dans leur costume : vêtements
blancs et cagoules avec des fentes pour les yeux.
Ces pénitents étaient comme disparus de notre
histoire, conclut M. Latta, parce que si nous connaissions celle
de leur chapelle, nous ne savions même pas exactement
comment ils étaient vêtus lors des processions
et cérémonies. Les voici, si j'ose dire, désormais
parmi nous.
L'architecte Linossier
Jusqu'à présent, l'on situait la date de construction
de la chapelle des Pénitents aux environs de 1731. Or,
un document retrouvé dans les archives de la société
historique de la Diana par M. Joseph Barou, permet une datation
précise de la façade de l'édifice. Il s'agit
d'un prix-fait, un devis établi en 20 août 1762,
pour des travaux qui devaient être terminés pour
Noël de la même année. Le document fait mention
du recteur et du vice-recteur de la confrérie, des deux
maîtres de cérémonie, de l'architecte et
entrepreneur lyonnais Joseph Linossier. Il y est question de
deux tailleurs de pierre de Moingt, de deux marchands de bois
de Boën.
Le chantier consistait en une avancée de la nef de la
chapelle qui existait déjà (10 m de plus), et
travaux de façade, avec deux clochers (il n'y en a eu
qu'un). La commande concernait aussi la réalisation des
armoiries de la confrérie, visibles aujourd'hui encore,
en pierre de Savoie, et la mise en place de deux statues dans
les niches situées de part et d'autre de la porte. L'on
ignore si ces statues, qui devaient mesurer au moins cinq pieds
chacune, ont été effectivement installées.
La communication de M. Barou en complément de celle de
M. Latta, permet de supposer que les toiles peintes étaient
destinées à être installées dans
la chapelle agrandie pour la fête de Noël 1762.
Album
Une
ruelle de Montbrison avec, en arrière-plan, le campanile
de la chapelle des Pénitents
(gravure du XIXe siècle)
(extrait
de F. Thiollier, Le Forez pittoresque
et monumental, 1886
1901,
quand la chapelle des Pénitents était une carrosserie...
Place
et rue des Pénitents, un quartier animé
(archives de la
Diana)
1946
(archives de la
Diana)
*
* * Les habitants du quartier des Pénitents avant 1910
extrait de la
brochure LISTE DES HABITANTS DE MONTBRISON CLASSES PAR RUE,
s. d. (vers1910), bibliothèque de la Diana)
2015
Théâtre des Pénitents
(clichés J. Barou)
Mis
à jour le 16 février 2015
*
* *
Conception
: David Barou
gestion
du site : Joseph Barou questions,
remarques
ou suggestions
s'adresser :