Un
grand vicaire de Lyon
originaire de Chalmazel
Jean-Joseph Barou
(1772-1855)
De
l'histoire d'un diocèse les annales ne retiennent souvent
que le nom des prélats titulaires du siège, négligeant
les grands commis de l'Eglise que sont les vicaires généraux.
Pourtant, ils assurent une bonne part, pour ne pas dire l'essentiel,
du travail administratif de l'évêché et
certains ont joué un rôle méconnu mais considérable
à l'ombre de leur évêque. Ce fut le cas,
dans l'Eglise de Lyon de Joseph Courbon (1),
premier vicaire général du Cardinal Fesch et de
Jean-Joseph Barou, grand vicaire pendant 32 ans auprès
de Mgr de Pins puis du cardinal de Bonald.
Jean-Joseph
Barou est né dans les monts du Forez, à Chalmazel,
hameau du Supt, le 25 octobre 1772. Il est l'aîné
d'une famille honorable où la foi et les vertus chrétiennes
sont héréditaires (2). Son acte de baptême,
daté du jour de sa naissance, nous indique q'il est le
fils d'Antoine Barou et de Marie Fenon, laboureurs. Son père
est surnommé Julien ; dans d'autres actes il est
appelé Barou Piron. Son parrain fut messire Jean-Joseph
Fenon, son oncle maternel, curé de Lérigneux et
sa marraine Janneton Barel, sa grand-mère maternelle
du hameau de Grossat, paroisse de Chalmazel. Les registres d'état
civil nous donnent les noms de huit de ses frères et
surs (3).
Très tôt il songe à devenir prêtre
et en effet le milieu familial convient bien à l'épanouissement
de sa vocation. Traditionnellement sa famille, tant du côté
paternel que du côté maternel, fournit nombreux
clercs. Citons, outre son oncle le curé de Lérigneux,
un autre oncle, l'abbé Joseph Barou, deux grands-oncles,
Joseph Fenon, aussi curé de Lérigneux et André
Barel, curé de Châtelneuf, un cousin, Jean-Marie
Joseph Fenon, curé d'Ailleux et un parent plus éloignée
l'abbé Piron (4) .
Son oncle, "le pieux abbé Barou", l'appelle
auprès de lui, dans le bourg voisin de Saint-Bonnet-le-Courreau
où il est vicaire (5) afin de lui enseigner un peu de
latin. Nul doute qu'il n'exerce sur lui une profonde influence
en devenant son maître et son modèle.
Le jeune Jean-Joseph est ensuite placé au collège
de Montbrison dirige par les Oratoriens. Il obtient là,
paraît-il, des succès remarquables, fruit de
son talent et de son application à l'étude (6)
. Dès cette époque se dessinent les grands traits
de sa personnalité ; c'est un garçon réfléchi
et intelligent mais réservé, presque timide, au
caractère tout à la fois doux et ferme.
Il suit le cours d'humanités quand la Révolution
entraîne la fermeture du collège de l'Oratoire
et interrompt du même coup ses études. Le collégien
rentre alors à Chalmazel. Les persécutions se
déchaînent contre la religion et le clergé
resté fidèle. Jean-Joseph voit s'éloigner
la perspective de devenir prêtre, cependant il ne renonce
pas tout à fait à sa vocation, voulant néanmoins
à tout prix travailler au salut des âmes, il promit
de consacrer sa vie à l'instruction religieuse des ignorants
(7) nous dit son biographe. Dans son village natal, il emploie
ses loisirs à enseigner le catéchisme aux enfants
en les réunissant sous un vieux chêne.
*
* *
En 1793, à 21 ans, Jean-Joseph est enrôlé
avec plusieurs jeunes gens de Chalmazel dans l'armée
républicaine. Il doit rejoindre l'armée de l'Ouest
qui combat l'insurrection vendéenne. Les sympathies du
conscrit vont naturellement aux vendéens :
Une
triste pensée, disait-il, me préoccupait,
celle de me trouver bientôt en ligne pour verser le sang
des Français, dont tout le crime était l'attachement
à la religion de leurs pères et à la monarchie
(8).
Il
déserte bientôt en compagnie de onze camarades.
Après de multiples incidents, se cachant pendant la journée
dans les bois ou les gerbiers et marchant la nuit, la troupe
réduite de moitié arrive sur les bords de la Vienne.
Il
n'y a ni gué ni bac pour franchir la rivière et
aucun des déserteurs ne sait nager. La "légende
dorée" de M. Barou nous dit qu'alors les fugitifs
découvrent sur le rivage une chapelle ruinée dédiée
à la Vierge Marie et qu'aussitôt ils se jettent
à genoux pour implorer la protection de la mère
de Dieu. A leur sortie du sanctuaire une barque guidée
par un batelier muet attend près du rivage et permet
au groupe de traverser la rivière sans encombre.
Arrivé
à Chalmazel Jean-Joseph se cache quelques jours dans
les jasseries et les granges puis trouve plus prudent de se
rendre à Saint-Agnan, dans le Berry où habite
un de ses oncles. Il y passe successivement plusieurs hivers
revenant à la belle saison à la ferme familiale
pour aider aux travaux des champs.
Pour Jean-Joseph s'estompe alors complètement l'espoir
de devenir un jour prêtre et il consent même, sur
le désir de sa famille à préparer un mariage
que l'on a arrangé pour lui. Mais brusquement, à
huit jours de la cérémonie, il change d'avis et
le projet échoue :
Tout
était prêt pour les noces ; mais voici qu'un incident
fait ajourner cette union à huitaine. La nuit suivante,
l'esprit de M. Barou est travaillé par cet incident qu'il
prend pour un avertissement d'en haut ; il se proche sa démarche
comme une faiblesse, comme un manque de fidélité
à Dieu, auquel il avait voué son cur. Dès
le lendemain, il déclare à son père qu'il
ne peut plus consentir au mariage et qu'il le prie de reporter
sur son frère cadet la portion disponible dont il avait
voulu le gratifier en qualité d'aîné (9).
Peu de temps après il reçoit une lettre de son
oncle l'abbé Barou qui est alors missionnaire dans le
canton de Tarare et qui l'invite à venir faire sa philosophie
auprès de lui. Jean-Joseph reprend donc ses études
d'abord chez son oncle puis ensuite à Lyon où
l'abbé Linsolas (10) a organisé, en dépit
de la terreur, un "séminaire ambulant" dirigé
par M. Mermet, un ancien Sulpicien. Le système est le
suivant : tous les grands séminaristes logent séparément
chez des particuliers ; M. Mermet, qui est le directeur et l'unique
professeur de ce séminaire clandestin, donne à
la dérobée des cours à un élève
bien doué. Celui-ci est ensuite chargé de les
redire à ses condisciples. Jean-Joseph Barou, qui loge
alors chez la mère du docteur Rapou, est ainsi choisi
pour être le maître de conférence et agent
de liaison du curieux établissement.
Avec l'avènement du Consulat (1799) ce séminaire
en pointillés sort de l'ombre et s'établit à
la Providence sous la direction de M. Piquet. Grand séminariste,
Jean-Joseph Barou commence son travail pastoral en enseignant
le catéchisme dans l'église Saint-Louis qui vient
juste d'être rendu au culte.
En 1803, Jean-Joseph Barou est ordonné prêtre par
Mgr d'Aviau, archevêque de Vienne. Agé de plus
de trente ans, mûri par les épreuves, le jeune
prêtre est déjà un homme solide, instruit
et expérimenté, conciliant et ferme.
L'administration
diocésaine le place immédiatement après
son ordination à des postes difficiles. Il devient d'abord
vicaire à Saint-Galmier auprès du père
Piron son parent (11).
A cette époque la paroisse de Saint-Galmier est un foyer
de jansénisme. Les deux curés précédents,
Jean George dit Poissy (12) et Antoine Popin (13), sont parmi
les chefs de l'église janséniste du Forez. Les
fidèles sont divisés ; des pétitions, des
mémoires circulent, quelque temps auparavant un miracle
aurait eu lieu (14). Popin et Poissy sont arrêtés
en octobre 1803 et détenus durant neuf mois à
Montbrison. Ils laissent un climat peu favorable aux nouveaux
pasteurs de la paroisse.
En octobre 1803, quelques mois après son arrivée
à Saint-Galmier, l'abbé Barou, jeune prêtre
de talent et d'avenir, selon ses supérieurs, est
nommé curé de Saint-Médard en remplacement
de M. Jacquemont (15). Celui-ci est le principal leader janséniste
de la région. Il demeure à Saint-Médard
et s'efforce de conserver la direction spirituelle de la paroisse
qui est devenue, sous sa houlette, un bastion du jansénisme
en Forez.
L'abbé Barou se tire bien, semble-t-il, de cette situation
plutôt délicate :
François Jacquemont
|
Le
zèle éclairé du nouveau pasteur, en
rétablissant le bon ordre dans cette paroisse, put
ramener au bercail bien des brebis égarées.
Il fallait toute la prudence du nouveau curé pour
prêcher en face d'un chef de parti, qui prenait à
tâche tous les dimanches de se placer devant la chaire,
comme pour guetter et surprendre l'orateur dans ses paroles.
Jamais cependant le jeune curé ne donna prise au
contrôle ni à la critique du vieux janséniste
(16) .
Sans doute fut-il, dans ces circonstances, plus nuancé
et bienveillant que son successeur que divers écrits
venant des milieux jansénistes accusèrent
de persécuter l'abbé Jacquemont (17) . D'ailleurs
les deux prêtres, l'abbé Barou et l'abbé
Jacquemont conserveront toujours dans leurs relations, sinon
de l'estime, du moins un respect mutuel. |
En
1809, à la demande de l'abbé Recorbet, supérieur
du séminaire de l'Argentière, l'abbé Barou
devient professeur de philosophie dans cet établissement.
Son séjour à l'Argentière est bref bien
qu'il réussisse remarquablement dans sa nouvelle tâche
:
Ceux qui ont entendu les leçons si nettes, si lucides
du professeur de l'Argentière, conviennent qu'il était
impossible d'enseigner avec plus de succès (18) .
L'abbé Barou devient l'ami de M. Sommet, professeur de
physique et, à son contact, complète ses connaissances
en sciences naturelles, mathématiques et astronomie.
Ses qualités pédagogiques et son autorité
sont remarquées car, en septembre 1809, l'archevêque
de Lyon le nomme supérieur du séminaire de Verrières
en remplacement du père Périer (19) . En 1804,
ce dernier avait ouvert dans sa cure une école presbytérale,
qui avait connu un rapide développement. Les locaux étaient
exigus, en très mauvais état et le père
Périer paraissait débordé par le trop grand
nombre d'élèves (20).
L'abbé Barou devra donc faire refleurir la discipline
et les études à Verrières et, en effet,
sous sa direction la prospérité du séminaire
se confirme, sa réputation s'établit. Ce fut
le grand bâtisseur de l'ancien séminaire, faisant
du vieux presbytère de Verrières et de ses dépendances
un établissement capable d'accueillir plusieurs centaines
de pensionnaires. Pour cela il sacrifia une grande partie du
château du Soleillant et avec les matériaux récupérés
fit construire plusieurs bâtiments au bourg (21).
En 1811, les quatre classes supérieures du séminaire
de Roche sont réunies à Verrières. En novembre
1812, Verrières reçoit sous la direction de l'abbé
Barou tous les élèves de philosophie des séminaires
du diocèse ; parmi eux se trouvent Marcellin Champagnat
et Jean-Baptiste Marie Vianney qui seront plus tard portés
sur les autels. Le jeune supérieur, là encore,
se tire fort bien d'affaire :
C'était une rude tâche pour le supérieur
de maintenir la discipline parmi cette jeunesse : et pourtant
le digne supérieur, secondé par des auxiliaires
animés de son esprit, put réussir à faire
fleurir avec la piété l'amour de l'étude
(22).
Le Vieux collège
de Verrières
lithographie communiquée par M. Jean Bruel et provenant
des papiers
de l'abbé Louis Mavel (1821-1883) originaire d'Ambert
et curé d'Eglisolles
En 1819, M. Chevalard, curé de Saint-Pierre à
Montbrison, meurt. Cette paroisse est, selon un rapport préfectoral,
le point névralgique du département, centre des
notabilités religieuses et légitimistes (23).
Il convient donc d'être habile dans le choix de son curé.
Le Préfet, M. de Meaux et d'autres notables obtiennent
en 1919 la nomination du supérieur de Verrières,
homme de tradition mais modéré. La nouvelle
d'un pareil choix fut une fête pour Montbrison. M. Barou
gagna bientôt dans cette ville les sympathies non seulement
du simple peuple, mais des principaux personnages qui, admirateurs
des vertus, du beau caractère et de la modestie du nouveau
curé, lui vouèrent une confiance sans bornes et
un attachement inviolable...(24)
L'abbé Barou marque son passage dans la paroisse Saint-Pierre
en installant les frères de la Doctrine Chrétienne
et les surs de Saint-Charles qui ouvrent des écoles
pour les garçons et les filles de la ville (25) .
Cardinal Fesch
|
Le
cardinal Fesch étant parti en exil après
la chute de l'Empire, le diocèse de Lyon connaît
une nouvelle période difficile. Mgr d'Amasie (26)
arrive à l'archevêché à la
fin de l'année 1823. Il aura pour tâche de
réunifier un clergé secoué par un
nouveau changement de régime.L
'abbé Barou qui venait de refuser le grand vicariat
de Châlons-sur-Marne est appelé au conseil
de l'archevêché en qualité de vicaire
général. Bientôt, à la mort
de M. Recorbet (27), il devient premier grand vicaire
aux applaudissements de tout le clergé (28)
.
Pendant
dix-sept ans l'abbé Jean-Joseph Barou sera le bras
droit de Mgr de Pins qui lui donne toute sa confiance.
Il montre de réelles qualités d'administrateur
: homme d'ordre, homme de travail, d'une exactitude
qui ne se démentit jamais, il possédait,
dit le chanoine Cattet, au plus haut degré
les principales qualités qui sont nécessaires
dans une charge d'une telle importance. Il assure
la plus grande partie de l'énorme correspondance
de l'archevêché, Mgr de Pins se chargeant
personnellement du courrier avec Rome, les ministères
et les préfectures du Rhône et de la Loire.
|
L'abbé
Barou, timide mais résolu, prudent mais néanmoins
efficace, d'un abord facile mais ayant une réelle autorité
personnelle, prend alors une place essentielle dans l'administration
du diocèse, notamment à cause de sa connaissance
du personnel ecclésiastique. Il visite inlassablement
les séminaires et les paroisses, répond à
une multitude de lettres et de mémoires, consacrant toute
son énergie à sa tâche.
Dans les négociations avec les autorités civiles
il fait preuve d'habileté, en particulier en 1834 où
il réussit à sauver la maison des Chartreux que
convoitait le gouvernement pour en faire un fort afin de contenir
le petit peuple de Lyon.
Pourtant l'abbé Barou n'est pas favorable aux idées
progressistes ; le paysan de Chalmazel, que la Révolution
avait surpris au collège, restera toujours un homme de
tradition, politiquement conservateur et très attaché
aux vieux usages, spécialement à la liturgie propre
au diocèse de Lyon.
On a comparé Joseph Courbon, grand vicaire du cardinal
Fesch, à Jean-Joseph Barou et il est vrai que tous deux
ont occupé une place essentielle dans l'administration
du diocèse mais avec un style et dans des circonstances
bien différentes. Joseph Courbon a de l'expérience
et une autorité morale considérable, c'est un
tempérament autoritaire jusqu'à la dureté
(29) . Le cardinal Fesch, haut dignitaire de l'Empire, se trouve
très souvent hors de son diocèse. Il laisse une
grande liberté d'action à M. Courbon et parle
ainsi de son vicaire général : collaborateur
selon son coeur, le fidèle, utile et très cher
M. Courbon (30) . Jean-Joseph Barou obtiendra la même
confiance de la part de Mgr de Pins. Homme d'ancien régime,
issu de la campagne, sans ambition personnelle, M. Barou convient
parfaitement pour administrer le diocèse pendant l'exil
du cardinal Fesch. L'administrateur apostolique a besoin d'un
grand vicaire solide mais suffisamment réservé
et prudent afin de ne pas susciter d'oppositions trop vives.
L'abbé Barou fut toute sa vie un homme modeste et désintéressé.
Il refusa un évêché et son rêve eut
été de devenir curé de campagne. Peut-être
songeait-il alors à la cure de Verrières ou à
celle de son village natal de Chalmazel. A sa mort il laisse
à peine de quoi payer les frais de sa sépulture
alors qu'il vivait à la table et l'archevêque et
logeait au palais archiépiscopal.
Formé chez les Oratoriens qui pourtant comptèrent
parmi eux des jansénistes notables, Jean-Joseph Barou
fut un adversaire constant et, semble-t-il, efficace de l'hérésie
dans la province. Il accomplit ses premières tâches
pastorales comme prêtre à Saint-Galmier puis à
Saint-Médard, deux foyers de jansénisme. Plus
tard, il essaiera de ramener dans la communion de son archevêque
l'abbé Jacquemont. Les lettres qu'échangent les
deux hommes sont significatives. L'abbé Barou est sûr
de lui, étranger au doute. Il témoigne autant
de fermeté que de respect envers l'ancien curé
de Saint-Médard :
Tout le diocèse, Monsieur, attend de vous cet heureux
retour à la vérité. Vos plus chers intérêts,
autant que l'édification publique demandent, que par
votre exemple et par vos paroles, vous rameniez au bercail des
brebis égarées, afin qu'il n'y ait plus qu'un
seul troupeau sous la houlette du premier pasteur de ce diocèse
(31).
Pour lui l'obéissance va de soi :
Rome a parlé, la cause est finie... Il me semble que
j'ai l'évidence en ma faveur, et je m'étonne de
vous voir penser différemment. J'ai de la peine à
supposer que vous puissiez agir de bonne foi dans une affaire
qui n'offre pas la moindre difficulté pour un catholique
(32).
En 1840, Mgr de Bonald vient prendre possession de l'archevêché
de Lyon et conserve comme grand vicaire Jean-Joseph Barou mais
ce dernier, qui a alors 68 ans, n'a plus la première
place dans le conseil. Pour lui commence une retraite active
; il conservera toutefois jusqu'à sa mort les fonctions
de vicaire général chargé du personnel
ecclésiastique.
Evidemment Jean-Joseph fait la fierté de sa famille.
Il s'est vraisemblablement servi de ses pouvoirs pour placer
les divers membres de sa famille, qui, à son exemple,
étaient entrés dans les ordres. En 1820, son jeune
frère et filleul, Jean-Joseph Barou (33) devient curé
de Saint-Pierre à Montbrison, poste qu'il occupera jusqu'à
sa mort en 1862. Justin Barou (34), leur neveu, né en
1815 à Chalmazel, va aussi à Saint-Pierre comme
vicaire. La famille du père Barou compte encore l'abbé
Verdier, curé de Sorbiers, et l'abbé Poyet, aumônier
de l'hôtel-Dieu de Saint-Etienne.
Jean-Joseph Barou resta valide et actif jusqu'à sa mort
qui survint le jeudi saint, 5 avril 1855 après une très
courte maladie. Il avait 83 ans. Deux jours plus tôt,
le 3 avril, il avait reçu l'extrême-onction en
présence de Son Eminence le cardinal.
Le jour même de sa mort le cardinal de Bonald adresse
au clergé du diocèse de Lyon une lettre circulaire
témoignant de l'affection et de l'admiration pour le
vicaire général :
M. l'abbé Barou, notre vicaire général,
nous a été enlevé aujourd'hui après
une courte maladie ; ce vénérable prêtre
a été dans ses derniers moments, ce qu'il a toujours
été, calme, patient, résigné à
la volonté de Dieu.
Nous n'avons pas besoin de vous dire, nos chers coopérateurs,
combien est grande l'épreuve que la Providence nous envoie
; combien est terrible le coup...
M. Barou était notre conseil, notre ami, notre modèle.
Sa science ecclésiastique, la rectitude de son jugement,
la pureté de ses intentions, sa connaissance profonde
du personnel de son clergé, nous rendaient ses avis infiniment
précieux et nous allégeaient le poids de la charge
pastorale.
Dieu aura reçu dans sa miséricorde un prêtre
qui ne vivait que pour Lui. La reconnaissance doit nous engager
à prier pour le repos de son âme... (35)
Ses funérailles eurent lieu avec solennité à
la primatiale Saint-Jean, sous la présidence du cardinal
de Bonald et de l'archevêque de Turin. Voici le compte
rendu qu'en fit la Gazette de Lyon du 11 avril 1855 :
Hier matin ont eu lieu, à la primatiale, les funérailles
de M. Barou, premier vicaire général du diocèse.
Le cortège se composait du petit séminaire
de Saint-Jean, d'une députation du grand séminaire,
MM. les curés des diverses paroisses de Lyon, du chapitre
et d'un grand nombre de prêtres de la ville et du diocèse.
Les coins du poêle étaient tenus par MM. les chanoines
Coignet et des Garets, M. le curé de Saint-Martin-d'Ainay
et M. le supérieur du grand séminaire. Le deuil
était conduit par la famille du vénérable
défunt dans les rangs de laquelle on compte quatre prêtres
: M. Barou, chanoine honoraire, curé de Saint-Pierre
de Montbrison, son frère ; M. Verdier, curé de
Sorbiers, M. Poyet, aumônier de l'Hôtel-Dieu de
Saint-Etienne, et M. Barou, vicaire de Saint-Pierre de Montbrison,
ses neveux. Suivait une nombreuse assistance composée
d'ecclésiastiques et de laïques.
Au milieu du chur entièrement tendu de noir, s'élevait
un catafalque couvert de cierges allumés. Le corps y
a été déposé, la grand-messe a été
célébrée par M. Beaujolin, vicaire général,
et l'absoute a été donnée par Son Eminence
le cardinal-archevêque (36).
En mai 1855 l'abbé Plantier est installé vicaire
général en remplacement de l'abbé Barou
(37).
*
* *
Fils
de paysan, simple et affable, homme droit et ferme, on peut
dire que Jean-Joseph Barou fut un grand serviteur de l'Eglise
de Lyon, toujours destiné aux seconds rôles mais
auxiliaire sûr et précieux des archevêques
de Lyon pendant plus de trente ans.
Joseph
Barou
Notes
(1) Joseph Courbon, né
à Saint-Genest-Malifaux, au lieu-dit du Seuve, le 13
avril 1748. Elève de Saint-Irénée, prêtre
le 4 avril 1772, chargé de cours à Saint-Irénée,
chanoine comte de Lyon en 1779, custode de Sainte-Croix, vicaire
général de Mgr de Marbeuf puis du cardinal Fesch,
mort le 7 février 1824.
(2) L'abbé Vannel dit de lui : Il fut le véritable
restaurateur du diocèse après le Concordat. Il
l'a organisé, pacifié, uni.
Chanoine Cattet, Nécrologie de M. l'abbé Barou,
n° 1536 et 1537 du Journal de Montbrison du 29 avril et
du 3 mai 1855.
(3) Marie, André (né le 23-03-1775), Pierrette
(née le 3-03-1,776), Jean-Marie (né le 9-09-1778),
Jeanne (née le 8-03-1780), Joseph (né le 19-05-1782),
Antoine (né le 2-01-1785), Jean-Joseph (né le
23-03-1789).
(4) Prêtres de la famille de Jean-Joseph Barou : Joseph
Barou, Joseph Fenon, curé de Lérigneux, mort le
2 août 1769 et Jean-Joseph Fenon, aussi curé de
Lérigneux en 1772 et en 1782. Jean-Marie Joseph Fenon,
vicaire a Villechève en 1772, puis curé d'Ailleux.
Barel, curé de Châtelneuf, vraisemblablement frère
de Janneton Barel, et enfin l'abbé Piron, curé
de Saint-Galmier en 1803 (selon le chanoine Cattet).
(5) Joseph Barou, né vers 1753, vicaire
à Saint-Bonnet-le-Courreau vers 1782-1785, vicaire à
Saint-Jean-Soleymieux, en 1802 missionnaire dans le canton de
Tarare et desservant de Saint-Romain-de-Popey, talents, zèle,
piété, a fait beaucoup de bien selon les appréciations
du tableau Courbon (archives de l'archevêché de
Lyon). Mort le 15 mai 1812 alors qu'il est curé de Saint-Jean-Soleymieux.
Sa pierre tombale dans la chapelle gauche de l'église
de Soleymieux porte l'inscription suivante :
CI-GIT M. JOSEPH BAROU CURE DE ST-JEAN- SOLEYMIEUX, CONFESSEUR
DE LA FOI, LE PERE DES PAUVRES, MORT EN ODEUR DE SAINTETE LE
15 MAI 18I2, AGE DE 59 ANS, MODELE DU CLERGE ET DU PEUPLE, CE
PRETRE VENERABLE A ETE L'UN DE CES HOMMES QUI ONT FAIT LE PLUS
DE BIEN SUR LEUR PASSAGE SUR LA TERRE. DEFUNCTUS ADHUC LOQUITUR.
(Chanoine
Cattet)
(6) Chanoine Cattet.
(7) Chanoine Cattet.
(8) Chanoine Cattet.
(9)Chanoine Cattet.
(10) Jacques Linsolas, vicaire général de Mgr
de Marbeuf, né en 1754, prêtre en 1779, prêtre
austère, pieux et fervent, d'une intrépidité
à toute épreuve, intransigeant et dur (Benoît
Laurent, L'Eglise janséniste du Forez), mort le I3 octobre
1828 alors qu'il était chanoine de la primatiale.
(11) Selon Benoît Laurent, il y aurait eu deux abbés
Piron ; celui de Saint-Galmier était apparenté
à Jean-Joseph Barou ; les Barou du Supt de Chalmazel
étaient surnommés Piron.
(12) Jean George dit Poissy, né à Veauche le 12
mars 1751, Oratorien.
(13) Antoine Popin, né à Boën le 11 avril
1738, 0ratorien.
(14) Guérison d'une fille hydropique en 1802 (B. Laurent,
op. cit.)
(15) B. Laurent, L'Eglise janséniste de Forez.
(16) Chanoine Cattet.
(17) En 1818, les jansénistes se plaignent
du successeur du curé Barou à Saint-Médard
: M. Jacquemont y demeure dans une petite maison dont il est
propriétaire... Le desservant ne cesse de l'invectiver
quoiqu'il se conduise d'une manière très pacifique...
Depuis plusieurs mois ce bon pasteur, persécuté,
semble avoir pris pour son partage, de prier, se taire et souffrir
(Benoît Laurent, L'église janséniste...,
op. cit.)
(18) Chanoine Cattet.
(19) Pierre Périer, né à Saint-Marcellin
en 1765 ; vicaire à Firminy puis curé de Verrières
de 1803 à 1809, curé de Millery de 1809 à
1815, curé de Haute-Rivoire de 1815 à 1817, il
séjourne ensuite dans le diocèse de Grenoble puis,
en 1820, se retire à Firminy où il meurt le 13
janvier 1827.
(20) J. L. Duplay raconte qu'en 1806 il y en avait près
de 400, logeant partout, dans toutes les maisons du bourg.
(21) J. Barou, "Le séminaire
de Verrières (1804-1906)", Bulletin de la Diana,
t. 46 et 47, 1980.
Chanoine Cattet.
(22) Chanoine Cattet. (23) Rapport du 20-11-1836 cité par
B. Laurent, L'église janséniste..., op. cit.
(24) Chanoine Cattet.
(25) Ces écoles existent encore aujourd'hui : école
Notre-Dame La Madeleine et école Saint-Aubrin.
(26) Mgr de PINS, archevêque d'Amasie, administrateur
apostolique du diocèse de Lyon le 22 décembre
1823.
(27) Antoine Recorbert, né le 22 janvier 1770 à
Neulise, supérieur de Roche puis de Saint-Galmier, vicaire
général.
Chanoine Cattet.
(28) Chanoine Cattet.
(29) Benoît Laurent, l'Eglise janséniste
du Forez, 1942.
(30) Ibid.
(31) Lettre de J.-J. Barou à M. Jacquemont
(Benoît Laurent, op. cit.).
(32) Lettre de J.-J. Barou à M. Jacquemont du 25 juin
1835, trois semaines avant la mort de ce dernier (Benoît
Laurent, op. cit.).
(33) Jean-Joseph Barou, né le 23 mars 1789 à Chalmazel,
a comme parrain son frère Jean-Joseph né en 1772.
Il devient curé de Saint-Pierre à Montbrison,
chanoine honoraire et meurt à Montbrison le 24 août
1862.
(34) Justin Barou, né à Chalmazel
le 3 octobre 1815, fils de Jean-Marie Barou et de Madeleine
Roux, neveu des deux abbés Jean-Joseph Barou, vicaire
à Saint-Pierre de Montbrison, curé de Neulise
en 1673, chanoine honoraire en 1886, mort le 13 février
1892.
(35) Cité par le Journal de Montbrison
et du département de la Loire du 12 avril 1855.
(36) Citée par le Journal de Montbrison du 12 avril 1855.
(37) Claude-Henri Plantier, né à Ceyrézieu
(Ain) le 2 mars 1813, professeur d'hébreu et d'Ecriture
sainte à la faculté de théologie de Lyon
(à 25 ans), vicaire général du cardinal
de Bonald puis évêque de Nîmes.
Autres sources : archives
de l'archevêché de Lyon, archives départementales
de la Loire (3 E 39 1, 2, 3,).
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