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Les frères
Baune
de Montbrison
Dossier
constitué
par Claude Latta
Eugène
Baune
(1799-1880)
(conférence
de Claude Latta)
En
mars 1880, lorsque Georges Levet, député-maire de
Montbrison apprend la mort d'Eugène Baune, Commissaire du
Gouvernement Provisoire dans la Loire en 1848 et Représentant
du Peuple sous la Seconde République, décédé
à Bâle (Suisse) à l'âge de 81 ans, il
réunit son conseil municipal en séance extraordinaire
: on décide de donner le nom d'Eugène Baune à
la place d'Armes (ou place de la Croix de Mission) et d'élever
un monument à sa mémoire au cimetière de Montbrison.
On décide aussi - chose tout à fait inhabituelle -
que le long article que Mme Edgar Quinet - Hermione Quinet - vient
de consacrer à Eugène Baune sera transcrit intégralement
sur le registre officiel des délibérations du conseil
municipal. Les conseillers municipaux montbrisonnais, au delà
du caractère rituel de l'hommage rendu au Républicain
de 1848, se rappelaient que, dans l'Histoire
d'un crime, Victor Hugo rapportait que, à l'annonce
de l'arrestation d'Eugène Baune dans la nuit du 1er au 2
décembre 1851, l'un des représentants du Peuple, Pierre
Lefranc, s'était écrié: " c'est la République
que l'on vient d'arrêter ! "...
Des origines vellaves et foréziennes
La famille Baune était originaire de Saint-Arcons-sur-Allier
(Haute Loire actuelle) un village de la Limagne de Brioude : à
la fin du XVIIe siècle, les ancêtres d'Eugène
Baune étaient paysans et habitaient , dans cette paroisse,
les villages de Baune et de Bavat ; le premier d'entre eux leur
a donné son nom. L'un de ces Baune, Antoine, se maria en
1725 avec Dauphine Bonnefoy, une jeune fille d'Allègre, la
petite cité voisine et devint colporteur dans cette ville.
Son fils, colporteur lui aussi, s'installa à Montbrison au
milieu du XVIIIe siècle. Les Baune firent alliance avec plusieurs
familles de cette ville : les Estornel, les Pelisson, les Rochat,
les Chazal, qui étaient respectivement vignerons, journaliers,
menuisiers et tanneurs. On est dans le " petit peuple "
urbain, dans le milieu des journaliers et des artisans de la paroisse
Saint-André de Montbrison.
Le père d'Eugène Baune
Grégoire, le père d'Eugène Baune, naquit à
Montbrison en 1768. Il était le fils naturel de Marianne
Baune, la fille du colporteur venu d'Allègre. Elevé
par ses grands parents, l'enfant ne grandit pas normalement et devint
bossu. Cela n'est pas indifférent dans une petite ville de
province et les enfants, souvent cruels avec ceux qui sont différents,
devaient se moquer de son infirmité, et répétant
les paroles des parents, lui rappelaient sa bâtardise. Il
y a là, probablement l'origine d'une volonté de braver
le destin. Grégoire Baune fit quelques études qui
lui permirent d'entrer comme employé dans les services de
l'administration départementale, installée à
Montbrison en 1795 et de devenir, sous le Premier Empire, chef de
service des Contributions Directes. En 1815, il fut révoqué
par la Restauration et ouvrit une école primaire dans une
maison du cloître Notre-Dame, celle-là même où
François Ier avait été reçu en 1536
par le chanoine Paparin. Ses anciens élèves - en particulier
le Docteur Rey - ont évoqué son dévouement,
ses qualités de pédagogue, sa sévérité
et l'austérité de sa vie et aussi sa culture encyclopédique
et sa réputation de lettré. Citons justement le Docteur
Rey, qui devint plus tard maire de Montbrison, et qui écrit
dans ses Historiettes foréziennes
:
" Son visage annonçait une intelligence que la pratique
des chefs-d'uvre littéraires avait remarquablement
développée une grande énergie morale et une
volonté de fer. "
C
'était un tempérament, fier parce qu'il avait peur
d'être humilié, pratiquant l'escrime, ce qui était
une façon d'annoncer qu'il se ferait éventuellement
respecter : il blessa grièvement en duel un demi-solde, ancien
officier de la Garde Impériale, qui s'était moqué
de sa petite taille (" mon petit bonhomme "). Le blessé
survécut ce qui évita à Grégoire Baune
d'être arrêté mais il dut alors quitter Montbrison
et devint secrétaire de mairie à Montaud.
On comprend mieux pourquoi les discours officiels qui sont adressés
à Eugène Baune en 1848 rappellent fréquemment
qu'il est le fils du maître d'école, dont on avait
respecté le savoir, la culture et le courage...
Une enfance montbrisonnaise
Grégoire Baune avait épousé, en 1796, Marie
Rochat, une veuve qui avait une petite fille et qui était,
comme lui, âgée de vingt-huit ans. Ils eurent quatre
fils ; Eugène Baune - pré nommé, à l'état-civil,
Barthélémy Philibert - était le troisième
d'entre eux. Il naquit à Montbrison le 19 fructidor an VII
(5 septembre 1799). Avec l'un de ses frères, Aimé
Baune il fut l'élève du collège impérial
créé par Napoléon Ier en 1807 et installé
dans l'ancien couvent des Ursulines - l'actuel collège privé
Victor-de-Laprade. Bien que Montbrisonnais, Eugène Baune
passa donc plusieurs années comme interne - c'était
obligatoire - au collège impérial, dirigé par
un remarquable pédagogue, M. Jauffret, auteur de recueils
de Fables.
Les palmarès de distribution des prix du collège impérial
sont conservés dans les archives de la Diana et nous apprennent
que les deux frères Baune furent des élèves
brillants, collectionnant les prix à la fin de l'année
scolaire. Eugène se distingua particulièrement en
latin (version et thème) et en mémoire, alors que
son frère décrochait, dans une autre classe, le prix
d'excellence. On imagine la fierté de leur père :
chez lui il y avait certainement la volonté d'assurer par
l'instruction la promotion sociale de ses fils. Eugène Baune
côtoyait au collège les enfants des fonctionnaires
ou membres des professions libérales. Parmi eux, Pierre Lachèze,
dont le père était le maire de la ville, et Henry
Levet, fils d'un chirurgien, tous deux futurs députés
de la Loire, comme lui. On mesure, au passage, le rôle joué
par l'université impériale dans la formation des futures
élites politiques et sociales du pays.
1815, le temps des épreuves
En 1814, la France, épuisée par tant de guerres et
fatiguée du pouvoir autoritaire que l'empereur avait fait
peser sur elle, fut battue et rappela le roi : ce fut Louis XVIII,
frère du roi guillotiné. La première Restauration
succomba lorsque Napoléon Ier, chaussant les bottes du général
jacobin qu'il avait été autrefois, revint de l'île
d'Elbe. On imagine mal aujourd'hui les passions de cette année
1815. Face à l'Europe coalisée, l'empereur appela
à la défense de la "Patrie en danger". Le
pays était, en fait, divisé. A Montbrison, les anciens
Jacobins prenaient le parti de l'empereur et de la défense
du territoire menacé par l'invasion et l'ancien conventionnel
régicide qu'était Pierre Dubouchet redevint maire
de Montbrison. Le marquis de Rostaing, vétéran de
la guerre d'Amérique venait offrir son épée
pour la défense de la " Patrie en danger ". Les
jeunes gens s'enflammaient. Témoignage de Hermione Quinet
qui, lors de l'exil en Belgique des républicains victimes
du 2 décembre, reçut le témoignage d'Eugène
Baune, et qui écrit :
"Il
voulut absolument s'enrôler : " tu es bien jeune lui
dit son père, mais la patrie est en danger, je vais te faire
inscrire. " L'enfant fait la dernière campagne."
Le
fait m'avait d'abord paru invraisemblable : Eugène Baune
n'avait en effet que 16 ans. Des recherches au Service Historique
de l'Armée de Terre, à Vincennes, m'ont confirmé
le récit de Mme Edgar Quinet : Eugène Baune s'était
bien engagé dans le 64e Régiment de ligne et s'était
bravement battu à Ligny, une bataille victorieuse qui précède
de quelques jours le désastre de Waterloo. Le jeune soldat
de 16 ans reçoit le " baptême du feu " en
montant, à travers jardins et vergers, à l'assaut
du village de Saint-Amand où sont retranchés les Prussiens,
finalement vaincus. Après Waterloo, il avait fait ensuite
toute la retraite, de la Belgique jusqu'à Orléans
en passant par Reims : ce fut une véritable débâcle
au cours de laquelle le régiment perdit, par désertion,
70 % de ses effectifs. Eugène Baune, malgré son jeune
âge, fut fait sergent.
Lorsque
parvint aux soldats la nouvelle de l'abdication de Napoléon
et le retour de Louis XVI, " rentré dans les fourgons
de l'étranger ", Eugène Baune fut arrêté
pour avoir manifesté son hostilité au nouveau régime
mais fut finalement libéré au bout de quelques jours
et démobilisé ; il rentre alors à Montbrison
: il a 16 ans depuis quelques jours !
Eugène Baune partit alors pour l'Italie du sud : goût
de l'aventure ? opportunité de suivre l'un de ses compagnons
de la campagne de 1815 ? Volonté de ne pas rester dans la
France étriquée et vaincue des Bourbons ? Nous ne
le savons pas. En tout cas, il trouva d'abord un emploi dans l'administration
des Fermes générales
du royaume de Naples puis, pendant plusieurs années, parcourut
la Méditerranée, allant de l'Espagne au Liban pour
faire le commerce des soieries. Esprit curieux, il se passionna
pour les civilisations du Moyen Orient et apprit à parler
l'italien et l'espagnol : nous n'en savons pas bien plus. c'est
la période de sa vie sur laquelle nous sommes le plus mal
renseignés. En tout cas, le jeune homme y gagne une ouverture
sur le monde que peu de jeunes gens de son âge pouvaient alors
avoir
Eugène Baune, membre de la Charbonnerie
C'est en Italie du Sud qu'Eugène Baune devint membre de la
Charbonnerie (la Carboneria),
organisation secrète qui trouvait son origine en France :
les Bons Cousins du Jura groupèrent jusque dans les années
1850 les charbonniers puis les républicains. La Charbonnerie,
gagnée par les idées révolutionnaires devint,
en effet, une véritable organisation ouverte à ceux
qui étaient républicains : elle avait son organisation
(les ventes en étaient
les cellules de base), ses rituels d'initiation et l'obligation
du secret, ses symboles (le
ruban noir, rouge
et bleu : noir comme le charbon,
rouge comme la braise, bleu comme la fumée).
La Charbonnerie avait essaimé en Italie et rassemblait les
patriotes et les libéraux de la péninsule. Episode
capital : Eugène Baune fut toute sa vie sensible à
la cause de la liberté et de l'unité italienne ; il
a peut-être participé aux complots de 1820 contre le
roi de Naples, hypothèse que semble confirmer son retour
en France (pour échapper à la répression ?).
Eugène Baune fut plus tard l'ami de Giuseppe Mazzini - apôtre
de l'unité italienne - et adhéra dès 1831 à
la Jeune Italie. Il fut aussi
l'ami du philosophe Carlo Cattaneo - l'un des premiers partisans
d'une Europe fédéraliste -, qui dirigea en 1848 la
résistance des Milanais contre les Autrichiens ; Eugène
Baune traduisit en français L'Insurrection
de Milan en 1848, récit que Cattaneo publia des
cinq journées (les cinque gionarte) de combats pendant lesquels
les patriotes de Lombardie avaient mis en difficulté les
troupes de Radetzki.
Lorsqu'il siégea sur les bancs des assemblées de la
Seconde République, Eugène Baune, membre du comité
des affaires étrangères, fut le défenseur intransigeant
et passionné de la cause des peuples opprimés (Pologne,
Hongrie, Italie).
Professeur et militant républicain à Lyon
Eugène Baune rentra en France en 1822. Il reprit des études,
en particulier en mathématiques et devint à Lyon professeur
à l'Ecole de Commerce qui avait été fondée
dans le quartier des Brotteaux ; c'est à cette époque
qu'il commence à se passionner pour les questions d'économie
et à étudier les problèmes de la soierie lyonnaise.
Il applique d'ailleurs à l'Ecole de commerce une pédagogie
novatrice, multipliant les exercices pratiques et créant
un musée d'échantillons : nous le savons par un article
de l'Almanach de Lyon qui nous
donne même l'emploi du temps de ses cours
En 1827, Eugène Baune épouse, à la Guillotière,
Julie Vigneault, une jeune fille de vingt ans qui est la fille d'un
menuisier républicain et qui va lui donner trois enfants
(Françoise, Frédéric et un enfant mort à
quelques mois). Julie Vigneault est un personnage attachant, une
jeune femme passionnée et romantique, militante républicaine,
elle aussi, et qui, dans toutes les circonstances difficiles, saura
aider et soutenir son mari.
Lorsqu'éclate
la Révolution de 1830, Eugène Baune est, à
Lyon, professeur à l'Institution Saint-Clair. Il participe,
à l'annonce des nouvelles de Paris, à l'occupation
de l'Hôtel de ville et protège les officiers arrêtés
auxquels la foule veut faire un mauvais parti. Il devient l'un des
chefs de bataillon de la Garde Nationale lyonnaise. Eugène
Baune est alors l'un de ces républicains modérés
qui acceptent le régime de Louis-Philippe, d'autant que le
" parti du mouvement " est au pouvoir, avec Laffitte et
Dupont de l'Eure comme membres du gouvernement. Baune, poussé
par ses amis de la municipalité de Lyon, sollicite alors
auprès du maréchal Soult, ministre des Affaires étrangères,
un poste diplomatique de consul au Levant - il se passionne pour
les civilisations de cette région - ou en Italie. Mais le
parti de la " Résistance ", avec Casimir-Périer,
impose le retour à une politique plus conservatrice et Baune
n'obtient pas son poste. Cette demande sera utilisée contre
lui lors de son procès de 1835 et permettra alors au pouvoir
de le présenter comme un aigri passé à l'opposition
faute d'avoir obtenu la place demandée...
1831, une année décisive
1831 est pour Eugène Baune une année décisive.
Il est redevenu professeur à l'Ecole de Commerce et commence
à écrire une étude sur la soierie lyonnaise
lorsqu'éclate la première révolte des canuts,
celle de novembre 1831 : révolte ouvrière pour réclamer
l'institution d'un " tarif ", permettant aux ouvriers
lyonnais de " vivre en travaillant " : ou alors il leur
faudrait " mourir en combattant ". La révolte est
écrasée.
En
1832, Eugène Baune publie, coup sur coup, deux ouvrages qui
vont assurer sa réputation auprès des ouvriers et
des républicains lyonnais :
- L'Histoire de Lyon pendant les journées
des 21,22 et 23 novembre 1831 est le premier récit
que nous ayons des événements de novembre 1831, récit
certes lacunaire et imparfait, parce qu'écrit sous le choc
de l'événement ; mais il a l'avantage de publier un
grand nombre de documents, dont certains ne sont connus que grâce
à cette publication. Il se situe dans une perspective très
modérée et appelle à la réconciliation
et à la recherche des moyens propres à améliorer
la situation des canuts lyonnais.
- L'Essai sur les moyens de faire cesser
la détresse de la Fabrique, publié quelques
mois plus tard, proposait des solutions concrètes, à
la fois économiques et sociales, aux problèmes de
la soierie et cet essai - dont un exemplaire est dans les archives
de la Diana - eut un grand retentissement à Lyon auprès
des ouvriers lyonnais.
L'insurrection et la prison
En 1833, Eugène Baune, dont les positions politiques se sont
radicalisées, devint président de la section lyonnaise
de la Société des Droits de l'Homme et du Citoyen
qui regroupait les républicains et menait une action "
pédagogique " en diffusant ses idées et ses propositions
dans de nombreuses brochures. Eugène Baune se dépensa
sans compter, portant la bonne parole dans toute la région
: les rapports de police le signalent à Saint-Etienne, à
Valence et à Romans, villes dans lesquelles il prend la parole.
Il reçoit à Lyon les chefs du parti républicain,
Godefroy Cavaignac et Marrast. Les idées républicaines
pénètrent les milieux ouvriers et l'insurrection de
1834 est à la fois républicaine et ouvrière
: elle embrase Lyon et a aussi son écho à Paris et
dans d'autres villes de province. Mais Eugène Baune, avant
même le déclenchement de la lutte, est arrêté
sur l'ordre du préfet Gasparin, emprisonné dans les
caves de l'hôtel de ville pendant que la ville retentit du
fracas des combats, transféré à la prison de
Perrache puis à Paris.
Eugène Baune fut traduit, en 1835, devant la Cour des pairs,
lors du " procès monstre " qui rassemblait plusieurs
dizaines d'accusés. Les accusés de Lyon choisirent
Baune comme leur porte-parole. Il s'acquitta de ce rôle difficile
avec intransigeance et courage, au milieu d'incidents de séance
très violents, face à une accusation qui n'était
pas décidée à laisser la parole aux accusés.
Julie Baune avait gagné Paris et réussit, déguisée
en homme - les femmes n'étaient pas admises à la Cour
des Pairs - à suivre le procès dans les tribunes où
elle fit la connaissance de George Sand qui devint son amie et celle
d'Eugène Baune ; les deux femmes allèrent le visiter
dans sa prison de la Conciergerie.
Hermione Quinet (Mme Edgar Quinet) raconte comment Julie Baune faisait
figure d'héroïne républicaine. Elle arrive chez
son amie George Sand :
" [Julie Baune], toute timide malgré son cur de
héros, arrive chez George Sand et, au lieu du tête-à-tête
espéré, se trouve dans un salon éblouissant
qui réunissait le Tout-Paris des Lettres et de la démocratie.
Elle s'arrête interdite sur le seuil ; George Sand va à
sa rencontre, la conduit au milieu du salon, et, se tournant vers
son cercle d'admirateurs, elle leur dit : vous me prodiguez un encens
que je suis bien loin de mériter ; si vous voulez réellement
admirer le génie, le voilà, c'est le génie
du dévouement et de la tendresse. Et, en disant ces mots,
elle s'incline et baise pieusement la main de Julie Baune
"
Eugène
Baune fut condamné à la déportation, nouvelle
qu'il accueillit crânement par le chant de la Marseillaise
; comme il n'y avait pas de lieu de déportation organisé,
il effectua sa peine d'abord à la prison de Clairvaux -
où son avocat Jules Favre alla lui rendre visite et ne
le reconnut d'abord pas tant il avait changé - puis à
Doullens en Picardie dans une ancienne forteresse transformée
en prison d'état pour les républicains condamnés.
Julie
Baune, toujours indomptable, s'était installée à
Doullens avec ses enfants et rendait souvent visite aux condamnés.
Une évasion fut organisée grâce à du
matériel que Julie Baune avait dissimulée sous ses
vêtements. Eugène Baune et Jean Caussidière
se barricadèrent dans leurs cellules - pour détourner
l'attention de leurs gardiens pendant que d'autres détenus
tentaient la " belle " et soutinrent un véritable
siège contre leurs gardiens avant que ceux-ci ne s'aperçoivent
qu'il s'agissait d'une opération de diversion qui avait permis
l'évasion de .. détenus républicains... Julie
Baune fut arrêtée, puis relâchée faute
de preuve ; les journaux républicains s'étaient déchaînés
contre un régime qui mettait les femmes en prison ; Julie
faisait décidément figure d'héroïne républicaine
et romantique !
Finalement,
l'amnistie de 1837, décrétée par le roi Louis-Philippe
à l'occasion du mariage du ducd'Orléans et de la princesse
Hélène de Mecklembourg, libéra Eugène
Baune et ses amis.
Portait
d'Eugène Baune.
Document exceptionnel : il s'agit d'un portrait
tissé en soie réalisé
par les canuts lyonnais en 1834 (Musée Gadagne, Lyon)
Rédacteur en chef de La Réforme
Après sa libération, Eugène Baune s'installa
à Paris où il devint journaliste au National,
le grand journal des républicains. Il menait une vie modeste,
ne recevant chez lui que quelques amis, Lamennais, Louis Blanc,
Armand Barbès. En 1843, un groupe de républicains
qui trouvait trop modérées les positions du National,
décida de fonder un nouveau journal : ce fut La
Réforme dont les deux inspirateurs furent Ledru-Rollin
et Louis Blanc.
La Réforme tirait à 1500
exemplaires, ce qui nous paraît aujourd'hui très faible
mais le tirage des journaux n'était pas le même et
chaque numéro était lu par plusieurs personnes, en
particulier dans les cabinets de lecture - sortes de clubs où
on s'abonnait à la lecture des journaux qu'on venait lire
sur place - et dans les cafés ; le rayonnement du nouveau
journal fut très grand et son prestige était assuré
par des collaborations prestigieuses, des feuilletons signées
de grands écrivains - George Sand, par exemple -, une rubrique
importante de politique étrangère, des chroniques
littéraires et musicales et le compte rendu des séances
des Académies.
Eugène Baune devint le co-rédacteur en chef de la
Réforme, travaillant en collaboration étroite
avec Ferdinand Flocon, qui partageait avec lui la fonction de rédacteur
en chef du journal. La Réforme
- étudiée par Peter Mc-Phee - a joué un grand
rôle à la fois politique et culturel. Des dossiers
très complets de politique intérieure étaient
préparés par les deux hommes : éducation, armée,
organisation du travail. Les débats étaient souvent
vifs à l'intérieur de la rédaction et dans
le cas où une position commune ne pouvait se dégager,
des tribunes libres présentaient des avis divergents : pour
ou contre la liberté de l'enseignement ? Pour ou contre l'alliance
avec les légitimistes pour abattre la monarchie de Juillet
? Le journal mena campagne contre la construction des fortifications
autour de Paris - elles leur semblaient dirigées contre les
ouvriers parisiens bien plus que contre un envahisseur éventuel
- et surtout pour la réforme électorale, c'est à
dire pour l'élargissement du suffrage censitaire et, à
terme, pour le suffrage universel.
Eugène Baune participa fort activement, en 1847-1848, à
la campagne des banquets, qui est le prélude de la Révolution
de 1848. Il s'agit d'obtenir du gouvernement Guizot une
réforme électorale : les revendications
se radicalisent progressivement. On revendique d'abord un élargissement
du système censitaire, puis le suffrage universel. Eugène
Baune prend la parole au banquet de Chalon-sur-Saône
Il
retrouva au cours de cette campagne son frère Aimé
Baune, socialiste fouriériste, qui avait été
bibliothécaire à Mâcon et qui était,
lui aussi engagé dans le mouvement républicain.
Eugène
Baune en 1835
La Seconde République
En février 1848, Eugène Baune est de toutes les réunions
qui, dans les bureaux de la Réforme,
ont à décider de la poursuite de l'action et du passage
à l'insurrection armée en faveur de laquelle il se
prononce. Il se bat sur les barricades de février dans le
quartier du Palais-Royal, aux côtés de son ami Etienne
Arago. Il participe à la réunion au cours de laquelle
sont désignés les membres de la
Réforme qui feront partie du gouvernement provisoire
: il refuse le poste de préfet de police qui lui est proposé
pour continuer à s'occuper de son journal.
La République est proclamée et le gouvernement provisoire
établit le suffrage universel, abolit l'esclavage dans les
colonies et la peine de mort en matière politique ; il proclame
aussi le droit au travail.
La
confiance et l'amitié de Ledru-Rollin, ministre de l'Intérieur,
font d'Eugène Baune un commissaire du gouvernement provisoire
dans le département de la Loire. Il revient donc à
Montbrison - alors chef-lieu - et où il établit la
République et prépare les élections. Les acclamations
de ses compatriotes qui lui offrent un banquet auxquels assistent
285 personnes et qui, le soir de son arrivée, illuminent,
montrent que l'esprit de 1848 a gagné la province mais cachent
aussi des divisions de l'opinion qui apparaîtront rapidement.
Eugène Baune parcourt aussi le département, se rendant
plusieurs fois à Roanne et à Saint-Etienne pour calmer
l'agitation sociale et installer de nouvelles municipalités
républicaines. En compagnie de son ami Tristan Duché,
Eugène Baune doit faire face, en particulier, aux troubles
de Saint-Etienne lorsque l'assaut est donné par les ouvriers
aux couvents accusés de faire travailler à bas prix
les orphelines qui étaient leurs pensionnaires - ce qui permettait
au patronat stéphanois de " tenir les salaires "
En avril 1848, Eugène Baune est élu Représentant
du Peuple sur la même liste que ses amis Laurent
Chavassieu, nouveau maire de Montbrison, Martin Bernard et Tristan
Duché. Il est réélu en 1849 sur la liste présentée
par les " démocrates socialistes " (les démocs-socs).
A l'assemblée, Eugène Baune siège sur les rangs
de la " Montagne " : en juin 1848, il est l'un des rares
députés à refuser de voter les pleins pouvoirs
au général Cavaignac chargé de réprimer
l'insurrection qui éclate après la suppression des
ateliers nationaux (les " Journées de Juin ") et
à proposer - en vain - une mission de médiation qui
serait envoyée auprès des insurgés et pour
laquelle il se porte volontaire. Il défend vigoureusement
à la tribune Louis Blanc et Marc Caussidière qui sont
accusés d'avoir pactisé avec l'insurrection.
En 1849, Eugène Baune est devenu à l'Assemblée
Législative le président de la
Nouvelle Montagne qui rassemble les députés
les plus "avancés" du parti républicain.
C'est ce qui lui vaut d'être arrêté par les
hommes de Louis-Napoléon Bonaparte lors du coup d'état
du 2 décembre 1851. Son frère Aimé Baune,
qui anime les clubs révolutionnaires, est lui aussi arrêté.
Eugène Baune est emprisonné à Mazas, puis,
comme 65 de ses collègues, frappé arbitrairement,
par simple décret, d'une mesure d'exil.
Eugène Baune en 1848
Eugène
Baune choisit la Belgique comme lieu d'exil. Cette longue période
(1852-1870) de l'exil belge nous est connu par les lettres d'Eugène
et surtout de Julie Baune qui sont conservées à la
B.N. dans le fonds Edgar Quinet.
Eugène
Baune retrouve de nombreux autres républicains exilés
: ses amis l'historien Edgar Quinet - mais il va ensuite aller s'installer
en Suisse -, Etienne Arago, Pierre Bourzat, député
de la Corrèze et Saint-Férréol, député
de la Haute-Loire qui se fera le mémorialiste de la proscription
républicaine en Belgique. Il fallait vivre : Eugène
Baune reprit son métier de professeur, donnant des leçons
dans des institutions privées et surtout de nombreuses leçons
particulières. Il était membre de la commission de
solidarité qui répartissait les secours venus de France.
Julie Baune, avec sa générosité habituelle,
joua, elle aussi, un rôle important dans ce domaine. Saint-Férréol
l'appelle la " sur de charité de la proscription
". Elle se rendait aussi de temps en temps à Paris,
faisant le lien avec les républicains qui avaient pu rester
en France. Elle resta aussi plusieurs semaines pour assister Lamennais
dans sa dernière maladie et fut du petit nombre de ses amis
qui le protégèrent contre les manuvres de l'archevêché
de Paris qui essayait d'obtenir une rétractation de l'ancien
prêtre défroqué devenu l'un des chefs inspirés
du parti républicain. Elle assista à ses funérailles
: symboliquement, il avait demandé à être conduit
dans le corbillard des pauvres et inhumé dans la fosse commune.
Mais l'exil se prolongeait, coupant les proscrits de la réalité
même de leur pays et érodant les énergies. Après
1859, de nombreux proscrits rentrèrent, bénéficiant
de l'amnistie. Eugène Baune, comme son ami Edgar Quinet ou
comme Victor Hugo, fut des irréductibles qui ne voulaient
rien devoir à Napoléon III. Les Baune ressentaient
durement les privations et l'isolement de l'exil. Julie Baune, pourtant
autrefois si énergique, était gagnée par une
grave dépression, une sorte de " maladie de l'exil ".
On gardait cependant l'espoir d'une chute, toujours attendue, de
l'Empire de Napoléon III qui se révélait plus
solide que prévu. On suivait cependant avec attention les
nouvelles de France : les succès du parti républicain
en 1869 et l'émergence d'une nouvelle génération
de républicains - qu'incarne le jeune avocat Gambetta - redonnèrent
espoir aux exilés.
Leur fille Françoise Baune s'était mariée en
Suisse et était devenue veuve avec deux fillettes en 1864.
Leur fils, Frédéric Baune, venu les rejoindre en Belgique,
mourut prématurément en 1869, âgé de
39 ans. Eugène et Julie en furent brisés de douleur
En
1870, lorsque la République fut proclamée, Eugène
Baune ne rentra pas en France : Julie était très malade
et il la soigna avec dévouement ; elle mourut à Saint-Josse-ten-Noode,
près de Bruxelles, le 24 mars 1871. Eugène Baune,
brisé par l'exil et les épreuves familiales, se rendit
à Bâle auprès de sa fille. Il lui restait dix
ans à vivre : il trouva d'abord un poste de professeur à
l'Ecole polytechnique de la ville puis prit sa retraite, s'occupant
de ses petites filles, Fanny et Marie-Julie.
La fin d'une vie
Fin nostalgique d'une vie. Eugène Baune était presque
oublié. En 1878, ce pendant, il fut invité par les
républicains de la Loire et vint à Saint-Etienne puis
à Montbrison où il retrouva son ami Laurent Chavassieu
dont le fils, Jean-Baptiste, avait proclamé la République
en 1871. On le reçut au Cercle du Commerce où les
républicains de la nouvelle génération firent
fête à leur ancien de 1848. Visite nostalgique d'un
vieux républicain à la ville de son enfance. Il était
en partie oublié puisque le Républicain
de la Loire qui annonce sa visite est obligé de
rappeler qui est Eugène Baune
Comment n'aurait pas
évoqué ces jours de 1848 où, lui, le fils de
l'instituteur bâtard et bossu, avait incarné la république
triomphante et généreuse de Louis Blanc et de Lamartine
?
Eugène Baune mourut à Bâle le 8 mars 1880. A
l'annonce de sa mort, les groupes parlementaires républicains
se réunirent au Palais-Bourbon pour lui rendre hommage, sous
la présidence d'Eugène Spuller qui était l'un
des principaux collaborateurs de Gambetta. Et l'oubli recouvrit
son nom. Mais aujourd'hui, alors que grâce aux travaux d'historiens
comme Maurice Agulhon, Philippe Vigier et Raymond Huard, nous redécouvrons
l'importance des hommes de 1848, l'histoire - très romanesque
- d'Eugène et de Julie Baune, personnages attachants par
leur rectitude morale et leur courage dans l'adversité, nous
aide à mieux comprendre la nature, l'évolution et
les combats du mouvement républicain au XIXème siècle.
Claude Latta
Place Eugène-Baune,
à Montbrison
Montbrison
1898 - Etats-Unis (?) après 1851
Né
à Montbrison (Loire) le 5 juillet 1798, fils de Grégoire
Baune et de Marie Rochat. Marié, père de trois filles.
Instituteur, bibliothécaire, journaliste, Aimé Baune
participa à la communauté fouriériste de Citeaux
(Côte-d'Or) et fut, pendant la Seconde République,
un ardent militant des clubs. Acquitté par la cour d'assises
de la Loire (1837) et par la Haute Cour de Versailles (1849) devant
lesquelles ses activités politiques l'avaient envoyé.
Arrêté le 13 décembre 1851, il dut s'exiler
aux Etats-Unis où il est sans doute mort.
Issu d'une famille de colporteurs venus de Haute-Loire, Etienne,
dit Aimé Baune était le fils de Grégoire Baune,
un républicain devenu sous l'Empire chef de service des Contributions
de la Loire, dont le chef-lieu était alors à Montbrison.
Révoqué par la Restauration en 1815, il s'établit
comme instituteur, devenant un pédagogue réputé,
puis, après un duel qui l'obligea à quitter Montbrison,
devint secrétaire de mairie à Montaud, près
de Saint-Etienne. Le frère cadet d'Aimé Baune, Eugène,
professeur à l'Ecole de commerce de Lyon, fut l'un des dirigeants
de la Société des Droits de
l'Homme à Lyon en 1834, condamné à la
Déportation en 1835, co-rédacteur en chef de
La Réforme, commissaire du gouvernement provisoire
dans la Loire (1848), représentant du peuple (1848 et 1849).
Aimé Baune fit de brillantes études au collège
impérial de Montbrison, remportant de nombreux prix (les
palmarès de 1808 et 1809 ont été conservés).
Il devint ensuite instituteur, et obtint en 1828 le brevet de capacité
qui fut exigé pour l'enseignement primaire élémentaire.
Nommé en Saône-et-Loire, il se passionnait pour les
questions pédagogiques. Républicain actif, il fut
pressenti pour prendre la direction du L'Indépendant
qui devait paraître à Mâcon en 1833 et était
alors en relation avec André Marchais qui coordonnait les
activités de la presse républicaine et dirigeait la
Revue républicaine. Mais
le projet n'aboutit pas. En 1834, Aimé Baune est bibliothécaire
à Châlon-sur-Saône où il publie une notice
sur la bibliothèque publique de la ville. En 1835, il fait
l'objet de poursuites à Dijon sous l'inculpation d'"association
illicite" mais fut acquitté.
Ses opinions républicaines lui valurent d'être "rayé
du tableau de l'Université par jugement du conseil national"
en 1836. De
1835 à 1838, Aimé Baune revint à Saint-Etienne
(Loire) où il fut instituteur et journaliste. En 1835, il
fonda les Annales de l'Education,
une éphémère revue pédagogique dans
laquelle il publia un long article dans lequel il exposait ses conceptions
de l'éducation (dénonciation de la mise en nourrice,
nécessaire précocité de l'instruction, contact
avec la nature, importance de l'éducation physique, douceur
de la discipline). En novembre 1836, Aimé Baune fonda à
Saint-Etienne un hebdomadaire, L'Observateur
de la Loire. Dans le numéro du 21 mai 1837, il
dénonça les hypocrisies de la loi d'amnistie, ouvrit
une souscription pour secourir les prisonniers libérés
qui étaient sans ressources et s'en prit vivement au comte
Molé, président du conseil. Aimé
Baune fut aussitôt assigné devant la Cour d'Assises
de la Loire, sur citation directe et sans instruction préalable.
Absent, parce que la convocation ne lui était pas parvenue,
il fut condamné par défaut à un an de prison
et 1 000,00 francs d'amende (3 juin 1837). Mais son avocat, Me Portier
fit opposition et put faire reconnaître la nullité
de la procédure. Il fut jugé à nouveau le 14
août 1837 et acquitté par le jury populaire.
Aimé
Baune s'installa ensuite à Dijon où il fut à
nouveau instituteur de 1838 à 1842. En 1842, il vint à
Cîteaux (Côte-d'Or) et prit part à l'expérience
de colonie fouriériste, organisée en 1841 par Arthur
Young et Zoé Gatti de Gamond, dans l'ancienne abbaye de saint
Bernard. Aimé Baune appartenait à la mouvance fouriériste
sans être vraiment un adhérent de la doctrine. Il était
accompagné de son épouse et de leurs deux filles,
Héloïse, âgée de 11 ans et Henriette, âgée
de 9 ans (la 3e naît en 1843).
Cette colonie agricole appliqua le principe du minimum social garanti
et expérimenta quelques nouveautés agronomiques, en
particulier dans la culture des arbres fruitiers. Aimé Baune,
pour obtenir un emploi d'instituteur, fournit au maire de Saint-Nicolas-de-Cîteaux
deux certificats de moralité délivrés par les
conseil municipaux de Saint-Etienne (1839) et de Dijon (1842). Le
préfet de la Côte-d'Or, Nau de Champlouis, écrivait
cependant dans un rapport qu'il était "connu pour l'exaltation
de ses opinions". Dans la colonie de Citeaux, Aimé Baune
fut instituteur et membre du conseil d'éducation. Son enseignement
s'adressait à la fois aux enfants et aux adultes. Chaque
sociétaire était assuré, dès son acte
d'adhésion, de recevoir, outre un minimum d'instruction,
" une éducation morale et physique ". Cîteaux
disposait d'une salle de théâtre et cette activité
jouait un grand rôle dans l'éducation et la vie de
la communauté. La colonie eut vite des difficultés
financières. Elle tenta en vain de redresser la situation
et disparut en 1846. La plupart des sociétaires quittèrent
Cîteaux à l'automne 1843. Aimé
Baune s'installa ensuite à Paris. On le retrouve en 1848
: il participa activement au mouvement républicain. Délégué
démocrate socialiste du 11e arrondissement de Paris, il était
membre de la "Commission exécutive des 25" prépara
les élections du 13 mai 1849. Il était aussi président
du club révolutionnaire dit du "salon Ragache"
qui se réunissait deux fois par semaine. Il fut poursuivi
devant la Haute Cour de Versailles pour sa participation à
l'affaire du 13 juin 1849 - journée de protestation contre
l'expédition romaine - en tant que membre du "conseil
des vingt-cinq". Son frère Eugène Baune fut son
avocat et obtint pour lui l'acquittement. Arrêté le
13 décembre 1851 - et non dans la nuit du coup d'état
du 2 décembre 1851 comme l'écrit Louis Blanc. Accusé
d'avoir participé à la résistance au coup d'état,
il fut emprisonné à Mazas où se trouvait déjà
son frère Eugène Baune, arrêté dans la
nuit du 1er au 2 décembre. La femme d'Aimé Baune,
malade depuis huit mois, était morte le 4 décembre
1851 à Paris. Sa fille aînée, Héloïse,
âgée de 20 ans, multiplia les démarches auprès
des autorités en faisant valoir que, au moment du coup d'état,
son père, assistait sa femme à ses derniers instants
et que, chargé de famille, il n'avait pu participé
à la résistance au coup d'état. Il fut libéré
au bout de quelques semaines et se vit accorder 24 heures pour quitter
la France. Il gagna d'abord Londres avec ses filles et séjourna
quelque temps dans cette ville.
D'après Jean-Baptiste Boichot, ancien député
démocrate socialiste du Rhône, il serait mort aux Etats-Unis
où il était parti s'installer avec sa famille. Son
acte de naissance ne porte pas de mention marginale de décès.
Ni lui, ni ses filles n'ont fait de demande de pension, ainsi qu'ils
en avaient le droit, après le vote de la loi de réhabilitation
(1881) comme victimes du coup d'état du 2 décembre.
uvres :
- "De l'Education", Annales de l'Education, journal pédagogique
destiné aux départements du Sud-Est de la France,
de l'Ain au Var, pour l'amélioration de l'instruction, n°
1, 1835, (Médiathèque municipale de Saint-Etienne,
fonds ancien).
- Notice sur la bibliothèque publique de Chalon-sur-Saône,
Chalon-sur-Saône, 1834, brochure.
- " De l'amnistie ", L'Observateur de la Loire, 21 mai
1837 (Archives départementales de la Loire)
Sources :
- Etat civil de Montbrison.
- Archives de la Diana, société historique du Forez,
Montbrison (scolarité d'Aimé Baune, collection du
Journal de Montbrison ).
- Archives départementales de la Loire, 4 U 118, dossier
de Cour d'assises, 1837. Archives Nationales, W 577, W 584 et W
585.
- Inventaire : Charon-Bordas (Jeannine), Deux
grands procès politiques de la Seconde République.
Archives des Hautes Cours de Bourges et de Versailles.
Inventaire. Paris, Archives nationales, 1992.
Bibliographie :
Ouvrages à caractère de sources
:
-
Rey [Dr Eugène], Historiettes foréziennes
et vieux souvenirs, Montbrison, Emile Paul, 2 vol., 1896-1897.
- Schoelcher (Victor), Histoire des crimes
du deux décembre, Londres, Chapman, 1852. - Boichot
(Jean-Baptiste), Souvenirs d'un prisonnier d'Etat, nouvelle éd.,
Leipzig, Mucquart, 1869.
Ouvrages ou articles :
- Latta (Claude), Eugène Baune (1799-1880),
un républicain dans les combats du XIXe siècle,
préface d'Alain Corbin, Montbrison, 1994.
- Latta (Claude), "Aimé Baune,
un journaliste républicain devant la cour d'assises de la
Loire en 1837" , Bulletin de
la Diana, LXVI, n° 2, 2e trimestre 2007.
-
Latta
(Claude), Notice "Aimé
Baune", dans : Claude Pennetier (dir.), Dictionnaire
biographique du mouvement ouvrier français, version
CDRom, 2002.
- Hincker (Louis), "La politique d'Aimé
Baune, le frère d'Eugène, homme de lettres, démocrate
socialiste, à Paris en 1849-1851", Village
de Forez (Montbrison) n° 81-82, avril 2000.
- Voet (Thomas), La colonie phalanstérienne
de Cîteaux, 1841-1846. Les fouriéristes aux champs,
préface de Jean-Claude Caron, Dijon, Editions universitaires
de Dijon, 2001 [sources et bibliographie].
"Aimé
Baune", texte en ligne dans le Dictionnaire des fouriéristes
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du site : Joseph Barou
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